Matthias Langhoff à propos des Trois Soeurs de Tchekhov
Notice
En 1993, Matthias Langhoff met en scène Les Trois sœurs d'Anton Tchekhov au Théâtre National de Bretagne à Rennes. Alliant réalisme et grotesque, la création fait écho à l'histoire contemporaine de l'Europe de l'Est. Extraits du spectacle et entretien avec le metteur en scène.
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Éclairage
Anton Tchekhov a écrit Les Trois sœurs en 1900. La pièce fut mise en scène pour la première fois en 1901 au Théâtre d'Art de Moscou. Un an après la mort de leur père, le général Prozorov, trois sœurs (Macha, Olga et Irina) et leur frère (Andreï) célèbrent avec des amis la fête d'Irina. Vivant en province, les trois sœurs rêvent de retrouver Moscou, où elles ont grandi. La pièce décrit le deuil impossible du passé et la désillusion à l'égard de l'avenir. L'ennui assaille sans cesse les personnages, qui par ailleurs débattent régulièrement sur le progrès, le travail et l'éducation.
En 1993, Matthias Langhoff met en scène la pièce, dans une traduction d'André Markowicz et Françoise Morvan, au Théâtre National de Bretagne à Rennes. La pièce sera reprise en 1994 au Théâtre de la Ville. Le metteur en scène participe également à la création de la scénographie et des costumes avec Catherine Rankl et Jean-Marc Stehlé. Les personnages de Macha, Olga et Irina sont respectivement interprétés par Evelyne Didi, Christiane Cohendy et Agnès Dewitte, celui d'Andreï par Pascal Bongard. Le reportage présente trois extraits. Le premier est issu du premier acte : Verchinine, lieutenant-colonel et commandant de batterie, arrive chez les Prozorov et retrouve les trois sœurs qu'il connut lorsqu'elles étaient enfants. Les deux autres extraits sont issus du deuxième acte : Touzenbach, baron et lieutenant (interprété par Yann Collette), discute avec Verchinine et Macha au sujet du progrès, du travail et du bonheur. La mise en scène allie réalisme et grotesque. Elle fait parfois appel au cinéma en projetant successivement les visages d'ouvriers et de paysans en armes dans la Russie des années 20 puis de soldats de l'URSS.
L'interprétation de la pièce fait écho à l'histoire de l'Europe de l'Est. Au cours d'un entretien, Matthias Langhoff insiste sur l'importance de l'Histoire dans la fable ; la pièce ne saurait ainsi être considérée pour le seul drame intime qui s'y joue, comme dans certaines œuvres d'Ibsen. Passé et présent demeurent en conflit permanent et, s'il est toujours question de l'avenir, nul ne semble pouvoir entreprendre quoi que ce soit pour faire évoluer sa propre histoire.
En 1994, la pièce reçut le « Grand Prix du Syndicat de la critique ».