Marion de Lorme de Victor Hugo
Notice
Reportage sur les répétitions de Marion de Lorme de Victor Hugo au théâtre de Lorient avec Jutta-Johanna Weiss dans le rôle titre. Interview du metteur en scène, Eric Vigner.
Éclairage
Marion de Lorme, drame en cinq actes écrit pendant juin 1829 et créé un an et demi après Hernani – objet d'une célèbre querelle littéraire – a d'abord été frappé d'interdiction. « Il y a eu [...] veto de la censure, écrit Hugo dans sa préface, prohibition successive des deux ministères Martignac et Polignac, volonté formelle du roi Charles X » [1], alors même que la pièce avait été reçue par la Comédie-Française. La pièce met en effet en scène sous un jour peu flatteur Louis XIII – que son bouffon et son ministre manipulent à leur guise – et érige en femme exemplaire une courtisane, une prostituée de haut rang, Marion de Lorme, dont l'histoire n'a retenu que les aventures avec le Roi. Hugo était par ailleurs connu pour la versatilité de ses opinions politiques et, au moment où la pièce devait être jouée, pour son opposition à un régime qu'il avait autrefois loué. C'est donc seulement après la chute des Bourbons et l'échec de la Restauration que le texte de Marion de Lorme trouva toute la légitimité nécessaire pour être porté à la scène, en 1831, au Théâtre de la Porte Saint-Martin, avec dans le rôle principal l'une des égéries des auteurs romantiques, Marie Dorval qui, dans un jeu à la sensibilité exacerbée, incarnait à merveille les préceptes romantiques d'un art au plus proche de la vérité des sentiments et des passions (Hugo note à propos de son interprétation que Marie Dorval, au cinquième acte, est « constamment pathétique, déchirante, sublime, et, ce qui est plus encore, naturelle » [2]). Le rôle de Marion de Lorme sera repris plus tard, dans le même théâtre, par Sarah Bernhardt, qui jouera aussi la pièce à la Comédie-Française, avec Mounet-Sully dans le rôle de Louis XIII, en 1905. Depuis, la pièce est tombée en désuétude, pâtissant sans doute de longueurs et de développements « dans le nouveau goût » dont Hugo est généralement friand et où se mêlent à la fois détails historiques, gravité et lyrisme. Elle n'a été mise en scène que ponctuellement – à la Comédie-Française en 1922, avec Cécile Sorel, Pierre Fresnay, Maurice Escande et Fernand Ledoux dans les principaux rôles – et a quasiment disparu de l'affiche des théâtres subventionnés, jusqu'à sa remise sous les projecteurs par Eric Vigner, au Centre dramatique de Bretagne, en 1998.
[1] Victor Hugo, préface de Marion de Lorme, in Théâtre, vol. 1, Victor Lecou, J. Hetzel et cie éditeurs, Paris, 1855, p. 98.
[2] Victor Hugo, note I sur Marion de Lorme, in Théâtre, vol. 1, Victor Lecou, J. Hetzel et cie éditeurs, Paris, 1855, p. 246.