François BAYLE, Espaces Inhabitables
Notice
Cette musique est considérée par son auteur comme sa "vraie première œuvre". Les cinq mouvements qui la constituent ont été composés à la suite, et conçus pour former un tout : Jardins de rien ; Géophonie ; Hommage à Robur ; Le Bleu du ciel ; Amertumes.
Éclairage
Durée totale:18'
Cette musique est considérée par son auteur comme sa "vraie première œuvre". Les cinq mouvements qui la constituent ont été composés à la suite, et conçus pour former un tout : Jardins de rien; Géophonie; Hommage à Robur; Le Bleu du ciel; Amertumes.
Espaces inhabitables pose le problème des sons "anecdotiques" ou "figuratifs" et de leur rapport avec les sons "abstraits". Les premiers magnétophones stéréophoniques portables venaient de faire leur apparition, et une partie des matériaux utilisés pour l'œuvre provient de prises de sons en extérieur. Notamment : coups sur des coques de navire sur un chantier naval, klaxons dans le radôme de Pleumeur Bodou (fonctionnant comme un réflecteur de sons), divers bruits marins, pas sur des graviers, etc. Ce matériel fut complété par des prises de sons de cordes, de cithare et de piano.
Le travail sur la référence causale des sons permet dans cette pièce, non pas l'évocation pittoresque ou littéraire, mais au contraire son dépassement au profit d'une attention à l'avènement du musical à travers eux. L'écoute de "la nature" n'est pas ici recherche d'impressions, mais de lois sur lesquelles prendre appui.
Ainsi Jardins de rien (extrait entendu ici), est un mouvement où les sonorités sont pensées selon le critère énergétique allant du fluide au solide, et leur composition envisagée selon des principes de mutations allant de l'un à l'autre. A l'ordre du solide appartiennent : les notes de cithare, les attaques résonance en général, les figures chromatiques descendantes. A celui du fluide appartiennent : les bruits de graviers foulés, les bruissements de vague, les mouvements brusques se dissolvant.
Géophonie : travail sur des oppositions entre des "sons fusants" et de violentes percussions résonances; Hommage à Robur : progression du flou au net, du sourd au précis (Robur est le héros voyageur de Jules Verne); Le Bleu du ciel : constante équivoque mélodique et dessin repérable bien que masqué par des harmoniques; Amertumes : suite et reprise du premier mouvement.
"Espaces inhabitables, c'est tout simplement un propos théorique : celui d'explorer une autre géométrie que celle de la gravitation et des rapports d'échelle habituelle des sonorités normales – c'est à dire d'avoir un champ plus large qui autorise des modalités énergétiques en mutation, et donc un espace qu'on ne connaît pas. C'est pourquoi j'ai dit "inhabitable" " (François Bayle).
Cette démarche fait écho aux conceptions développées par Paul Klee dans sa Théorie de la Figuration, que Bayle connaissait dès cette époque.