Une piste de ski artificiel sur un terril à Loisinord

07 septembre 2002
03m 23s
Réf. 00293

Notice

Résumé :

Reportage sur la station de ski artificielle construite sur un ancien site minier à Noeux-les-Mines dans le Pas-de-Calais. Elle a une vocation sociale et permet de faire du ski à moindre frais tout en restant dans le Bassin minier. Jacques Villedary, maire et fondateur du site Loisinord, présente ce nouvel équipement. Dans l'avenir, il a comme projet d'amener de la neige en couvrant la piste.

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Date de diffusion :
07 septembre 2002
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Éclairage

L'implantation sur l'un des terrils de Noeux-les-Mines d'une piste de ski artificielle, intégrée dans un grand centre de loisirs sportif baptisé Loisinord, témoigne, sous une forme singulière, des dynamiques de réaménagement que connaît l'ex-Bassin minier à compter des années 1980. Jouent d'abord ici les projets de Jacques Villedary, maire socialiste de la ville à partir de 1983. Comme beaucoup de ses pareils, ce dernier arrive aux responsabilités dans un contexte marqué par la récession minière, à laquelle vient s'ajouter dans les années 1980 les effets de la crise économique. Sans doute la situation de Noeux-les-Mines comporte-t-elle certaines spécificités : les puits y ont été fermés de manière relativement précoce (1968 pour le dernier) et par ailleurs la ville est longtemps le siège d'une enseigne-phare de la grande distribution : Leroy-Merlin. La municipalité ne s'en trouve pas moins confrontée à des défis économiques et sociaux majeurs, et manifeste, par la voix de son maire, l'ambition d'opérer la sortie de la ville de sa période minière. Jacques Villedary se montre soucieux de préserver la mémoire et le patrimoine de cette période : c'est lui par exemple qui appuie la création d'un musée de la mine, inauguré en 1986. En même temps, il ne veut pas se limiter à la conservation patrimoniale et cherche à mener à bien la reconversion des anciens sites et friches industrielles minières. Ses projets sont portés par un contexte favorable. Nombre de collectivités locales se réapproprient alors notamment les terrils, pour les faire servir à de nouvelles fonctions, en particulier dans le domaine des loisirs.

Le plan d'eau de la base de Loisinord est inauguré en 1994 mais le plus original intervient deux ans après, lorsqu'en 1996 s'ouvre la piste de ski. On peut y voir une manière de tirer pleinement les conséquences de l'aspect de montagne artificielle qui est surtout celui des terrils les plus récents. En cherchant plus en amont, on y trouvera peut-être la trace d'une vieille ambition, très présente à gauche (par exemple au moment du Front Populaire) mais aussi dans certaines initiatives sociales des Houillères du Nord-Pas-de-Calais : parvenir enfin à démocratiser l'activité très élitiste que constituent les sports d'hiver. On y décèle enfin très nettement la tentation de changer les couleurs de l'image de la ville, du noir associé au charbon, au vert de la piste synthétique, au blanc associé au ski et au bleu du plan d'eau. L'initiative a en tous les cas connu du succès et s'est imposé dans la durée. La base de Loisinord est devenue un complexe couvrant des activités plurielles : sports nautiques et sports de glisse, mais aussi un centre d'animation et d'hébergement ainsi qu'un circuit automobile et de nombreuses enseignes commerciales. La reconversion d'une région traditionnellement marquée par le travail industriel vers les loisirs ne va cependant pas sans difficultés. Elle ne compense pas le départ d'autres activités (le siège de Leroy-Merlin a quitté durant la dernière décennie Noeux-les-Mines, laissant une nouvelle friche à gérer). Elle est marquée par la fluctuation de la fréquentation, la difficulté parfois à supporter dans la durée le poids de ces grands équipements et enfin la concurrence susceptible d'exister entre eux. Beaucoup d'élus comptent aujourd'hui sur l'ouverture du Louvre-Lens, en décembre 2012, pour donner une nouvelle dynamique à cet ensemble.

Marion Fontaine

Transcription

Laurent Guillaume
Si je vous que l’on peut skier en France, même en été, je ne vous étonnerai pas, vous savez qu’il existe des glaciers équipés, mais pour cela, il faut monter à 3200 mètres d’altitude, c’est le prix à payer. En revanche, si je vous dis que l’on peut skier 12 mois sur 12 y compris en août dans le nord de la France, dans le département du Pas-de-Calais, vous avez du mal à me croire et vous aurez tort. Vous savez qu’il existe là-bas des petites montagnes artificielles qu’on appelle des terrils, la suite, je vous laisse l’imaginer, il suffisait d’y penser.
(Bruit)
Guillaume Laurent
Bonjour Jacques, vous allez bien ? Dites-moi, il ne fallait pas être un peu fou quand même pour vouloir créer une station de ski artificiel dans le département du Pas-De-Calais, qui est plutôt tourné vers ses plages, a priori ?
Jacques Villedary
Ben, le problème est qu’on a connu une grande richesse avec l’exploitation du charbon pendant 150 ans. Il y a 20 ans, on a perdu notre dernier puits de mine, donc il fallait assurer la reconversion complète de la ville. Et c’est la raison pour laquelle, on s’est ouvert sur le tertiaire, développement touristique et sportif et cetera.
Laurent Guillaume
Oui, mais qu’est-ce qui vous a emmené à penser au ski alors qu’a priori dans ce département, ben, ce n’est pas dans la culture habituelle ?
Jacques Villedary
Si on avait fait une patinoire, c’est commun, une piscine, c’est commun, donc il fallait trouver quelque chose d’original.
Inconnu
Quand tu vas aller, tu pousses sur tes talons, tu te tapes les talons sur le premier. Tu peux appuyer, tu appuies sur la jambe pour tourner, extérieur. Suivant !
Laurent Guillaume
Elle est bonne la neige ?
Inconnue
Elle est bonne la neige !
Jacques Villedary
Les difficultées sont nées avec le fait que trouver un perchman dans un coron ce n’est pas évident. Trouver un moniteur de ski dans le Bassin Minier, pas évident. Donc tout ça a été à penser, à réfléchir, à négocier. On a essayé de faire au mieux et la preuve, c’est que maintenant, ça marche.
Inconnu
Alors, content, heureux, alors ? Il faut venir plus souvent dans le Nord, vous voyez ? On n’a pas que du pétrole dans le Nord, on n’a pas de pétrole mais on a autre chose, hein, on a des idées.
Laurent Guillaume
L’autre vocation de ce site c’est un petit peu social aussi, pour apprendre aux gens à faire du ski à moindre frais, puisque ça coûte quand même moins cher que dans les vrais massifs montagneux ?
Jacques Villedary
On a un pouvoir social ici qui est très bas, avec une population qui a été extrêmement perturbée, avec la récession, le chômage. On ne pouvait pas créer une station qui soit aussi honéreuse que les stations montagnardes, quoi.
Laurent Guillaume
Qu’est-ce qu’on peut encore imaginer pour développer cette petite station ?
Jacques Villedary
Bien, on a pris de l’avance puisqu’on est sorti du Bassin minier, on a une identité, et cetera, mais maintenant on est copié. Mon collègue [Carnot] fait la même chose, nous on l’a fait en hauteur, lui l’a fait dans un trou. Donc il faut garder au moins nos 10 ans d’avance, ou 20 ans d’avance. Donc, on a l’intention d’amener ici de la neige.
Laurent Guillaume
De la vraie neige ?
Jacques Villedary
De la vraie neige. Donc là on étudie la couverture de la piste, avec un toit qui pourrait éventuellement nous permettre de garder l'ensoleillement. Et puis le couvrir au moment où il y a de l’eau, car l’ennemi principal de la neige, c’est l’eau.
Laurent Guillaume
Oui, partout.
Jacques Villedary
Voilà, et à ce moment là, on va faire un vrai frigo sur un terril, et on aura une piste enneigée.
Laurent Guillaume
Et ça c’est envisageable, c’est possible ?
Jacques Villedary
Ça coûte dans les 35 millions. On va reprendre notre bâton de pèlerin, et puis chercher de l’argent là où il y en a.