Le Louvre-Lens, c'est quoi ? L'historique du projet
Notice
Historique du projet du "Louvre-Lens" à base d'archives. En 2003, Lens se porte candidat pour accueillir le Louvre décentralisé. En novembre 2004, la ville est choisie. Le Louvre sera implanté sur le site de la fosse 9-9 bis de Lens. Dès le départ, le projet s'est construit avec les habitants, en témoigne la Maison du projet. Interrogés dans un micro-trottoir, les lensois sont dans l'attentisme, ou le désintérêt. Lens et le Louvre ont fait un pari : celui de la culture dans une ville marquée par les mines et le football.
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Éclairage
Diffusé au Journal télévisé régional à l'occasion de la pose de la première pierre du musée le 4 décembre 2009, ce document rappelle l'histoire du projet en utilisant les images d'archives de la visite de Renaud Donnedieu de Vabre pour découvrir le projet de l'installation du Louvre à Lens le 20 juillet 2004 et le retour de celui-ci le 29 novembre 2004, lors de la désignation officielle de la ville de Lens comme site d'accueil de la nouvelle antenne du musée du Louvre. Si le reportage présente cette désignation presque sous l'angle du conte, celle-ci est en réalité moins surprenante qu'il y paraît. Le choix de Lens satisfait en effet les attentes de toute une série d'acteurs. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et le président de la République Jacques Chirac, qui remettent au même moment sur l'agenda la décentralisation, se montrent favorables à une installation du Louvre hors de Paris. Établir cette installation dans une zone qui peine toujours à se remettre de la fin de l'exploitation du charbon, est de bonne politique et concrétise le sentiment encore présent d'un devoir de la collectivité nationale à l'égard des mineurs, ou de leurs descendants (l'émotion soulignée par le ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, atteste ce sentiment). Du côté du Louvre, l'implantation à Lens s'inscrit dans un processus plus global de "succursalisation" des grands musées et de leur transformation partielle en marque, exportable à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire national (1). Le Louvre-Lens s'agrège ainsi à d'autres exemples antérieurs ou contemporains : Guggenheim à Bilbao (le principal modèle pour les élus de l'ex-Bassin minier), la Tate Gallery à Liverpool ou encore le Centre Pompidou à Metz.
Ces différents exemples ont pour point commun d'être localisés dans des zones urbaines longtemps articulées à l'activité industrielle et frappées ensuite de plein fouet par la crise. Dans tous les cas ici, le musée, et en général les grands équipements culturels, sont envisagés comme un nouvel outil de relance économique, d'aménagement urbain et d'inclusion sociale. Les élus et les responsables du Nord-Pas-de-Calais se sont montrés sensibles à cette perspective qui fait de l'innovation culturelle une base du développement. On le voit bien à travers l'inauguration en 2001 du Musée d'art et d'industrie La Piscine, dans la vieille ville textile de Roubaix, ou encore dans les manifestations auxquelles a donné lieu en 2004 l'opération "Lille, capitale européenne de la culture". Les représentants de l'ex-Bassin minier ont cherché, eux aussi, surtout à partir des années 1990, à intégrer ce processus, comme l'attestent la naissance de la scène nationale Culture Commune et plus encore le projet de classement du Bassin minier sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco, projet qui d'ailleurs se déploie simultanément à celui du Louvre-Lens. Pour ce dernier, il faut relever le rôle particulier de deux élus : Daniel Percheron, président socialiste du Conseil régional, qui a passé son enfance dans la cité de la fosse 12 de Lens, à deux pas du site du futur musée (le carreau de la fosse 9-9 bis), et Guy Delcourt, député-maire socialiste de Lens depuis 1998. Les deux hommes se montrent particulièrement actifs dans leur soutien à la nouvelle antenne, dans laquelle il voit un facteur de changement, à la fois sur le plan matériel et le plan symbolique : le prestige du Louvre doit venir effacer l'image misérabiliste qui colle encore à la peau du Pays Noir. Il doit permettre également de contrebalancer un peu le poids écrasant de l'agglomération lilloise, en redonnant sa centralité à Lens, pour laquelle sont prévus de nombreux aménagements (transports, création d'un centre économique "Euralens", etc.). L'inauguration officielle du Louvre-Lens intervient le 4 décembre 2012 mais seule les années et les décennies qui vont suivre pourront décider de ce qu'il adviendra dans les faits de ce grand dessein.
(1) Dominique Poulot, Musée et muséologie, Paris, La Découverte, 2009, p. 81-96.