Louis Chaigne

10 juillet 1965
05m 25s
Réf. 00544

Notice

Résumé :
L'écrivain Louis Chaigne explique que son livre La Vendée confidentielle est un recueil de confidences écrit en toutes liberté, pour élever l'âme du lecteur. Il précise que ce livre, illustré par Aymar de Lézardière, n'est pas un témoignage littéraire mais qu'il s'attache à l'intrinsèque de grands personnages et replace de grands auteurs dans le paysage vendéen.
Date de diffusion :
10 juillet 1965
Personnalité(s) :
Lieux :

Éclairage

Comment être Vendéen et Parisien ? Dans les années 1950 et 1960, la question n’était pas incongrue puisque des personnalités comme Jean Yole ou Louis Chaigne bâtissaient des œuvres intellectuelles nourries des traditions catholiques vendéennes tout en jouant un rôle dans le monde littéraire parisien. La situation n’était pas propre à la Vendée puisque d’autres auteurs venus d’autres régions suivaient la même trajectoire, mais en l’occurrence Louis Chaigne est un très bon témoin de cette époque.
Né et décédé en Vendée, Louis Chaigne (1899-1973) avait commencé des études de notariat quand il est poussé à s’installer à Paris pour faire carrière dans la littérature. Son premier ouvrage, paraît alors qu’il a 28 ans, tandis qu’il entame une activité professionnelle en participant ou dirigeant des revues littéraires, comme Les Lettres, Les Etudes, Ecclesia ou encore La Revue du Bas-Poitou et des maisons d’éditions, de Gigord, Alsatia. Ses travaux personnels sont consacrés à des auteurs comme Paul Valéry, André Gide, André Maurois ou Paul Claudel, avec qui il a des liens d’amitiés.
La Vendée qui paraît en 1933 rappelle son intérêt pour la région considérée dans ses dimensions spirituelles et symboliques. Humaniste chrétien, attaché à la régionalisation et au développement des régions de l’Ouest, homme de lettres « touche à tout », il est un très bon représentant des intellectuels catholiques, critique littéraire et écrivain, poète, éditeur et animateur de revues, établis entre le milieu éditorial parisien et l’ancrage régional. Il a légué une œuvre composée de soixante-douze ouvrages auxquels il convient d'ajouter une multitude d'articles.
Jean-Clément Martin

Transcription

Journaliste
Le grand écrivain Louis Chaigne vient de publier un ouvrage intitulé La Vendée Confidentielle . Louis Chaigne connaît bien son sujet puisqu’il habite Venansault au coeur même de la Vendée. C’est d’ailleurs à Venansault que nous l’avons trouvé au retour d’un voyage en Italie, il converse avec Roger Bordy.
Roger Bordy
Poète, critique, écrivain, vous avez derrière vous déjà, Monsieur Louis Chaigne, une longue carrière d’écrivain. Vos livres sur la littérature contemporaine sont connus, et votre dernier livre, La Vendée Confidentielle, vient de sortir. Je voudrais vous demander de nous le présenter vous-même.
Louis Chaigne
Comme le titre l’indique, c’est un recueil de confidences que j’ai eu la joie d’écrire en toute liberté sans la moindre contrainte. L’idée première est venue de l’illustrateur dont je regrette l’absence aujourd’hui. Aymar de la Lézardière était vraiment l’artiste capable de comprendre et d’interpréter cette région dont il est originaire. Il l’a fait avec beaucoup de sensibilité, beaucoup de nuances, et je crois pouvoir assurer qu’il a donné de la Vendée une physionomie tout à fait nouvelle.
Roger Bordy
A part écrivain, vous êtes un témoin de votre temps, et avec votre dernier livre, La Vendée Confidentielle , vous devenez un témoin de cette région que vous aimez beaucoup, la Vendée. Je voudrais vous demander, si nous découvrons la Vendée touristique, la Vendée littéraire ou la Vendée historique dans votre livre ?
Louis Chaigne
Vous dites témoin, je ne voudrais pas être ce qu’on appelle un témoin littéraire, car la littérature ne doit jamais être absente de la vie. Et j’ai l’impression que ce sur quoi j’ai pu témoigner, les plus humbles gens de Vendée pourraient apporter un témoignage à peu près identique, n’est-ce pas ? Ce qui me paraît essentiel, c’est de sauvegarder un certain frisson de l’âme, n’est-ce pas, et ce frisson de l’âme, des gens très discrets et très modestes le possèdent quelquefois beaucoup mieux que les intellectuels.
Roger Bordy
Alors, la Vendée littéraire, par exemple ?
Louis Chaigne
La Vendée littéraire, je crois que la Vendée est comme toute province, comme toute région, est marquée inévitablement par ceux qui l’ont vue d’un certain regard. C’est vrai pour les artistes, pour les peintres, c’est vrai aussi pour les écrivains. Il est évident que quand je me promène du côté de la Réorthe ou de Saint-Vincent-sur-Jard, je ne puis pas oublier les descriptions qu’un Clemenceau nous a laissées de ces régions. Quand je vais dans le Haut Bocage ou dans le Marais de Challans, je vois inévitablement ces régions marquées par la vision qu’en eut Jean Yole. Quand je vais du côté de Peault, c’est le poète Pierre Menanteau que je trouve. Et si je m’égare du côté de Pouzauges et de Monsireigne, c’est Eusèbe de Brémont d’Ars.
Roger Bordy
Et la Vendée historique ?
Louis Chaigne
La Vendée historique n’est pas oubliée dans cet ouvrage, je me suis gardé, je crois, à la fois, du moins, j’ai voulu faire, d’un certain lyrisme simplificateur comme aussi d’une certaine désinvolture trop facile. Je me suis appliqué à dégager ce qu’il y eut d’intérieur chez des hommes difficilement accessibles, comme Charette, par exemple. C’est aussi vrai pour Clemenceau, c’est aussi vrai pour de Lattre.
Roger Bordy
Comment voyez-vous la Vendée de demain ?
Louis Chaigne
Je ne suis pas prophète, et cette Vendée où nous sommes change avec une incroyable rapidité. Il importe de faire sien un message qui a été apporté par un des hommes les plus remarquables de notre temps, je veux dire Lyautey, rester jeune jusqu’au soir de l’âge, qui a été moderne en faisant audacieusement la part de l’éternel et du périmé, et qui a écrit en urbaniste exemplaire ceci, que je me permets de lire : faire des maisons, construire des villes, planter des jardins, dessiner des routes, c’est bien, mais il est aussi nécessaire d’élever les âmes de ceux à qui on les destine. Il faut faire de l’urbanisme jusque dans le coeur des hommes. Eh bien, je crois que cette dernière phrase devrait être inscrite au programme de tous ceux qui veulent aller de l’avant, qui veulent aider la Vendée à écrire de nouvelles pages d'histoire.