Isabelle Huppert dans Orlando, de Virginia Woolf
Notice
En 1993, Bob Wilson adapte et met en scène Orlando, un roman de Virginia Woolf, dont Isabelle Huppert interprète le personnage éponyme. Représenté dans le cadre du Festival d'Automne à l'Odéon-Théâtre de l'Europe, le spectacle a pour point de départ l'histoire d'Orlando, jeune courtisan qui un jour se réveilla femme. Extraits du spectacle, interviews de Bob Wilson et d'Isabelle Huppert.
- Orlando (Virginia Woolf - Auteur / Bob Wilson - Mise en scène / Bob Wilson - Adaptation)
Éclairage
En 1993, Robert Wilson adapte et met en scène le roman de Virginia Woolf (1882-1941) intitulé Orlando, dont Isabelle Huppert interprète le personnage éponyme. Le spectacle, créé au Théâtre Vidy-Lausanne, est repris dans le cadre du Festival d'Automne à l'Odéon-Théâtre de l'Europe. Une précédente version du spectacle avait été proposée à Berlin en 1989 avec Jutta Lampe dans le rôle-titre. En 1992, Robert Wilson avait participé au Festival d'Automne en mettant en scène, au Théâtre de Gennevilliers, Doctor Faustus lights the lights de Gertrude Stein.
Ecrit en 1928, Orlando prend la forme d'une biographie fantastique. Le personnage d'Orlando, inspiré de la poétesse Vita Sackville-West, traverse en effet trois siècles en ayant toujours trente ans. D'abord jeune courtisan auprès de la reine Elisabeth Ire, il vit un amour déçu auprès d'une princesse russe. Au cours d'un voyage en Orient, il se réveille femme. Après être partie sur les routes avec des femmes tziganes, Lady Orlando revient à Londres, se marie avec un voyageur et devient, jusqu'en 1928, un écrivain à succès. Le roman, qui étudie notamment le rapport entre les sexes en Angleterre et mêle à l'histoire du pays celle de l'écrivain, influença la littérature féministe. L'œuvre met en avant le pouvoir subversif de la poésie en relatant l'histoire d'un personnage qui s'affranchit des limites du temps, de l'espace, des sexes et des classes sociales.
A la poésie de Virginia Woolf répondent ici les dessins et la peinture de Robert Wilson. Ce dernier a adapté pour la scène ce texte non-théâtral avec Darryl Pinckney. Outre la mise en scène et la scénographie, l'artiste américain a conçu, avec Heinrich Brunke, les centaines d'effets-lumières du spectacle. Orlando sert de matériau à la création : celle-ci ne cherche nullement à illustrer la fable mais bien à proposer, à partir du récit, une succession de tableaux abstraits. Seuls trois accessoires viennent occuper l'espace : un escalier, un chêne (en référence au titre du poème qui rendit célèbre Orlando) et un manuscrit. Le reportage, diffusé lors du « Journal de 20h » du 26 septembre 1993, donne un aperçu de la structure architecturale du spectacle qui joue avec les motifs du clair-obscur. Isabelle Huppert est seule en scène pendant plus de deux heures. Les changements de costumes, créés par Suzanne Raschig, illustrent les différentes étapes du récit, notamment le changement de sexe du personnage qui devient Lady Orlando. La comédienne n'incarne pas le personnage mais en offre une interprétation ludique. Le texte devient ici un monologue lyrique agencé selon une partition verbale. Dans cet espace dépouillé, véritable aire de jeu pour le corps et la langue, résonnent la musique de Hans Peter Khun et les différentes modulations de la voix de l'actrice, dont la prononciation peut-être amplifiée ou déformée par des micros. L'écriture du spectacle passe également par le geste qui est précis et non-illustratif.
Cette esthétique formelle refuse de donner une signification au texte. Il en appelle à l'imagination du spectateur qui vient faire une expérience visuelle et auditive. Le spectacle rencontra un grand succès auprès du public. En 2006, Isabelle Huppert sera de nouveau dirigée par Robert Wilson dans Quartett d'Heiner Müller, spectacle présenté à l'Odéon-Théâtre de l'Europe dans le cadre du Festival d'Automne.