Un stage d'occitan à Sivergues

Ce film montre l’une des nombreuses initiatives de formation pour adultes sous forme de stage de terrain organisées dans les années d’après-guerre, et dont la Provence fut l’un des terrains principaux. Il met en contrepoint, de manière très classique et sans doute assez binaire, le dernier habitant d’un village du Luberon semi-abandonné – qui en est aussi le maire – filmé dans ses occupations de paysan (transport de fourrage à la main), et un groupe de jeunes gens, avec plusieurs gros plans sur le visage d’une jeune beauté provençale. Ce groupe de jeunes personnes vient du centre culturel de Chantebelle, près d’Orange, et suit une formation de langue et civilisation occitanes, en lien avec le milieu et son histoire.

Les stages linguistiques et culturels intégrant la découverte du milieu étaient particulièrement vivaces en Provence, développés notamment à Marseille à partir de 1946 par Jòrgi Reboul, animateur de l’association Lou Calen et de l’Auberge de jeunesse d’Allauch. Ils constituaient à la fois des lieux de formation personnelle et de formation pédagogique, puisqu’ils étaient suivis par de très nombreux enseignants. Une autre archive, portant sur Jean Boudou, montre que celui-ci animait des stages équivalents en Rouergue.



Le groupe de Sivergues est mené par Pierre Pessemesse et Joseph Ferrandi. Le premier est un écrivain et infatigable militant, né en 1931 et décédé en décembre 2018. Il fut l’ami et compagnon d’aventures occitanistes de Serge Bec, comme lui résidant dans le pays d’Apt. Tous les deux venus du Félibrige, ils rejoignirent le mouvement occitan dès le milieu des années 1950. À la fin de sa vie, Pessemesse fréquentait aussi bien le Félibrige que le mouvement occitan, participant par exemple systématiquement aux congrès de l’Association internationale d’études occitanes. Il était également très attaché aux amitiés occitano-catalanes. De formation germaniste, après avoir enseigné quelques années, notamment à l’école normale de Digne, il renonça à une carrière d’enseignant. et ouvrit à Buoux, près de Sivergues où se situe le stage montré dans le film, une auberge, l’auberge des Seguins, qui servait aussi de lieu de rassemblement amical de la jeunesse occitaniste des années 1960-1970. Ce n’est pas une simple anecdote de dire qu’il aida la revue Òc pendant plusieurs années par une insertion systématique de publicités pour son auberge, présentée aussi comme « Centre de Cultura Occitana Pèire Pessemessa ».