Regroupement en Oranie [muet]
Notice
Ce reportage muet montre les réussites de la politique de pacification menée par l'armée française.
Éclairage
Dès 1954, sont identifiées, sur le territoire algérien, des zones d'insécurité qui contraignent les militaires à se déplacer sous escorte. Par mesure de sécurité, ces zones deviennent alors interdites, leurs populations étant obligées à quitter terres et habitats. Mais au fur et à mesure de l'avancée de la guerre, le nombre et la localisation de ces zones se multiplient ; ce qui provoque le déplacement de milliers de personnes et met sous contrôle une population dont les repères sont désormais bouleversés. En outre, de zones interdites, on passe à des zones de regroupement qui rassemblent des groupes de paysans déracinés, sous la surveillance étroite de l'armée.
Si le projet de modernisation constitue l'argument principal de la politique massive de regroupement pratiquée pendant la guerre d'Algérie, celui-ci ne tient pas face à l'analyse des dispositifs mis en place. Non seulement cette politique a favorisé le quadrillage administratif d'une grande partie du territoire, mais elle a également contribué à la répression des populations colonisées, selon un modèle hérité des stratégies mises en place en Indochine.
Instrument au service de la guerre contre-révolutionnaire, non seulement le regroupement n'a pas totalement empêché que des liens se tissent entre ruraux et nationalistes, mais il a profondément transformé – si ce n'est ruiné – le milieu rural, et ce de façon définitive.
C'est à partir de 1960 que se développe, d'abord dans le cadre du plan Constantine, un projet d'amélioration visant à transformer les villages en des lieux possédant des infrastructures comparables à celles des villes modernes. Eau, électricité, maison en dur, écoles, infirmeries, doivent embellir le quotidien des populations rurales mais rompre aussi avec les modes de vie antérieurs. La paix doit se substituer à la guerre, la dimension sécuritaire des regroupements cédant la place au confort.
Le reportage diffusé le 6 mai 1961 au journal télévisé de 20 heures s'inscrit dans cette perspective. Il est construit selon une logique conforme à un discours de propagande. Ainsi élude-t-il tout ce qui a trait à la guerre pour traiter de la pacification et montrer les réussites de celle-ci. Par une juxtaposition d'images qui jouent sur le contraste entre l'avant et l'après, la modernité du village de Oued-El-Kheir est valorisée. Elle semble annonciatrice d'une promesse d'abondance, eau et pain faisant leur apparition dans un lieu désertique. Ceci pour le bonheur des enfants qui, de manière quelque peu guindée, démontrent – devant la caméra – les bienfaits du progrès en portant des bacs d'eau, une eau désormais facilement accessible.