Les premières élections de la Sécurité sociale
Notice
La gestion de la Sécurité sociale, qui vient de naître, est confiée aux représentants des syndicats de salariés et aux représentants des employeurs. Les représentants des syndicats sont élus. La participation est très élevée et le score de la CGT très important.
Éclairage
Au printemps 1947 se déroulent les premières élections des administrateurs des caisses de sécurité sociale, pour remplacer ceux qui avaient été simplement désignés depuis la mise en place de la Sécurité sociale en octobre 1945. Le contexte politique de l'époque, lié à la Libération, est marqué par une influence très forte du Parti Communiste et de la CGT. La composition des Conseils, que ce soit à la caisse nationale ou dans les caisses locales, se traduit par une majorité d'administrateurs représentant les salariés, et donc par une minorité de représentants des employeurs.
On voit donc qu'à l'occasion de cette première élection se posent des questions que l'on va retrouver tout au long de la période qui marque le 70e anniversaire de la Sécurité sociale.
La première de ces questions est l'opposition entre désignation d'une part, élection d'autre part.
La deuxième question est l'opposition entre le paritarisme, c'est-à-dire entre une stricte égalité d'administrateurs représentant les salariés et ceux représentant les employeurs.
La troisième question est l'opposition entre la démocratie sociale et la démocratie politique. Lorsque l'une et l'autre sont issues d'élections, laquelle est la plus légitime pour décider et gouverner la Sécurité sociale ?
L'idée originelle en 1945 est que c'est aux assurés eux-mêmes de gérer leur Sécurité sociale. Mais une chose est de gérer, une autre est de décider les grandes règles de la Sécurité sociale. Ce pouvoir de décision revient au Gouvernement et au Parlement, c'est en pratique ce qui se passera tout au long des 70 années d'existence de la Sécurité sociale.
En termes de participation, ces premières élections sont un succès indéniable, puisque près de 75 % des électeurs inscrits se rendent aux urnes. La CGT obtient 59,2 % des suffrages, les listes CFTC 26,4 %, les listes mutualistes 9,1 % et les listes divers 5,2 %. Malgré ce « triomphe » de la CGT, la CFTC, en s'alliant aux élus employeurs, met cette dernière en minorité dans la plupart des caisses. Pourtant, de 1945 à 1947, c'est la CGT seule qui assume la gestion de la Sécurité sociale.
Ce recours aux élections perdure jusqu'en 1967, année où elles sont supprimées et où le paritarisme est instauré dans les conseils d'administration des Organismes de Sécurité sociale.
En 1982, conformément aux engagements de campagne de François Mitterrand, les élections sont rétablies et les représentants des syndicats de salariés redeviennent majoritaires, marquant ainsi la fin du paritarisme. Ce dernier sera rétabli en 1996 avec les ordonnances Juppé, en même temps que seront supprimées les élections, qui n'avaient plus eu lieu depuis 1982.