Discours du 29 janvier 1960
Notice
Annoncé depuis trois semaines, le discours radiotélévisé du Général a lieu alors qu'Alger est en état d'insurrection (semaine des Barricades). Le Général, en uniforme, parle d'une voix grave et ferme ; tout concourt à donner une impression de grande solennité à ce discours. Il commence par rappeler les principes de l'autodétermination : les Algériens décideront librement de leur destin, une fois le pays pacifié, et après une période de transition. Il renvoie dos à dos les "rebelles" du FLN et les "ultras" de l'Algérie française, qui refusent "la seule politique qui soit digne de la France". Il s'adresse ensuite avec fermeté aux Français d'Algérie, puis à l'armée, enfin à la France elle-même, avec des mots où perce l'émotion.
- L'autodétemination est la seule politique qui soit digne de la France.
- Je suis le responsable suprême. C'est moi qui porte le destin du pays.Tous les soldats français doivent donc m'obéir.
- Eh bien, mon cher et vieux pays, nous voici ensemble, une fois encore, devant une lourde épreuve.
- Cela, je ne le ferai pas non plus !
- La France ne serait plus qu'un pauvre jouet disloqué sur l'océan des aventures.
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Éclairage
Ramené au pouvoir en juin 1958 par l'impuissance de la IVème République à résoudre la guerre d'Algérie, le général de Gaulle sait que la solution du conflit constitue une attente prioritaire pour les Français. Après avoir en vain proposé aux combattants du FLN de déposer les armes, il prend conscience que la paix en Algérie ne saurait résulter de la seule action militaire, même assortie d'un développement économique proposé par le " Plan de Constantine ". Aussi a-t-il dans son discours du 16 septembre 1959 proposé aux Algériens l'autodétermination, c'est-à-dire le droit de choisir leur destin, leur offrant trois options, la sécession, la francisation ou l'association. Ce discours a provoqué l'inquiétude des Européens d'Algérie et la colère des activistes et d'une partie de l'armée, c'est-à-dire des artisans du 13 mai qui se sentent trahis par de Gaulle qu'ils estiment avoir porté au pouvoir. En janvier 1960 dans un entretien publié par un journal allemand, le Général Massu, ancien président du Comité de Salut Public et commandant le Corps d'armée d'Alger, a vivement critiqué la politique du Chef de l'Etat. Il est aussitôt rappelé à Paris et relevé de son commandement. C'est le signal de violentes manifestations organisées le 24 janvier par les activistes, manifestations qui tournent à l'émeute et aux heurts avec la gendarmerie. Réfugiés dans l'enceinte des Facultés, les insurgés érigent des barricades autour de celles-ci et tentent d'obtenir le soutien de l'armée qui les isole sans les réduire. Averti le jour même à Colombey, le Général regagne Paris pour lancer un appel à la raison aux Algérois et réaffirmer sa confiance aux représentants de l'autorité de l'Etat sur place.
Depuis le 24 janvier, suite à l'émeute déclenchée ce jour-là, le face à face se poursuit entre les insurgés d'Alger retranchés dans leur réduit des facultés et les pouvoirs civils et militaires. Le général Challe et le délégué général Delouvrier ont quitté Alger pour s'installer à une quarantaine de kilomètres de la ville. Pour mettre fin au pourrissement de la situation, de Gaulle prononce le 29 janvier une allocution, en uniforme, précisant qu'il le fait, non seulement en tant que Chef de l'Etat, mais en tant que général de Gaulle, mettant ainsi en avant à la fois son grade et le rôle historique qui a été le sien durant la guerre. Réaffirmant son but de parvenir à la paix en Algérie et le moyen qu'il préconise, l'autodétermination, il rejette catégoriquement la prétention du FLN à s'ériger en représentant unique de l'Algérie et la volonté des activistes d'imposer par la force l'intégration. Il en appelle à la raison des Européens d'Algérie afin qu'ils soutiennent l'idée d'une Algérie liée à la France, au loyalisme de l'armée dont il exige l'obéissance à ses ordres, et à l'union des Français autour de l'autorité de l'Etat qu'il incarne.