La renaissance de la villa Cavrois
04 juin 2015
03m 54s
Réf. 00062
Notice
Résumé :
Visite de la Villa Cavrois, rénovée après 12 années de travaux. Cette oeuvre de l'architecte Robert Mallet-Stevens a été construite dans l'entre-deux-guerres pour un couple de riches industriels. A la mort de Mme Cavrois, l'édifice est vendu et cesse d'être entretenu. Quand l'Etat la rachète en 2001 ne subsiste que l'ossature des murs. Les travaux de rénovation ont permis de redonner au lieu l'esprit voulu par Mallet-Stevens.
Date de diffusion :
04 juin 2015
Source :
Personnalité(s) :
Thèmes :
Lieux :
Éclairage
Quelques jours avant l’ouverture officielle de la villa Cavrois au public, ce reportage de la journaliste Chloé Chauvris nous fait découvrir l’histoire et la renaissance de ce chef d’œuvre de l’architecte Mallet-Stevens sis à Croix, ville industrielle entre Lille et Roubaix. La parole est à Paul-Hervé Parsy, administrateur de la villa pour le compte du CMN, Centre des Monuments Nationaux. Après 12 ans de travaux d’un coût de quelques 23 millions d’euros, la villa qui est considérée comme une œuvre d’art total, représentative de l’architecture de style international de l’entre-deux-guerres, au même titre que la villa Tugendhat de l’architecte Mies Van der Rohe à Brno en Tchéquie, est enfin présentable au public.
L’histoire de la construction est des plus mouvementée : un couple de bourgeois issu de l’industrie textile décide dans les années 1920 de faire construire une demeure familiale pour ses sept enfants à l’écart de la pollution des usines [1] et choisit la partie encore agreste de Croix, en limite de Roubaix où s’entassent les lieux de production. M. Paul Cavrois fait appel dans un premier temps à l’architecte en vogue dans la région, Jacques Greber, qui dessine un projet régionaliste, conforme aux goûts de l’époque. Mais l’exposition des Arts Décoratifs de 1925 à Paris où le pavillon des productions textiles de Roubaix-Tourcoing jouxte le pavillon du tourisme, réalisation de Mallet-Stevens, révèle le Mouvement Moderne à Paul Cavrois qui contacte l’architecte et lui confie la réalisation de sa demeure. Celle-ci est achevée en 1932 en respectant le programme "air, lumière, travail, sports, hygiène, confort, économie".
Mais pendant la Seconde Guerre mondiale, la famille doit fuir les lieux occupés par l’armée allemande. P.H Parsy précise que la maison reste entretenue puisque des factures d’entretien ont été retrouvées dans les archives, prouvant que les Allemands reconnaissaient là un chef-d’œuvre de l’architecture moderne.
Après la guerre, la famille réinvestit la demeure en y apportant des modifications : l’architecte roubaisien Pierre Barbe intervient pendant une dizaine d’années sur l’organisation intérieure afin de répondre à de nouveaux besoins familiaux en créant des appartements individualisés à l’étage.
A la mort de Madame Cavrois en 1986, l’édifice est vendu et cesse petit à petit d’être entretenu. Le jardin est amputé d’une partie de sa surface pour faire place à un lotissement. Une association de sauvegarde se met en place pour éviter la démolition et les constructions prévues par la société immobilière alors propriétaire. On doit au travail érudit de l’historien de l’architecture Richard Klein le classement de la villa au titre des Monuments Historiques à la fin des années 1990 et finalement son achat par l’Etat en Juillet 2001.
Commence alors la restauration d’un bâtiment très dégradé et dont l’intérieur a été totalement vandalisé, ne laissant plus que l’ossature, les murs et les menuiseries métalliques des fenêtres, "un cadavre d’architecture". Depuis 2008, la demeure est propriété du Centre des monuments nationaux qui a travaillé à redonner aux lieux l’esprit "d’architecture totale" voulue par Mallet-Stevens : le mobilier d’origine a été racheté en salle des ventes ; les marbres volés dans les années 94 -95 ont été remplacés par des marbres de même origine dans des carrières ré-ouvertes pour l’occasion en Suède, en Italie, en Belgique. On peut déambuler maintenant dans la villa qui a retrouvé son décor et ses couleurs. Une seule pièce non restaurée témoigne de l’état de décrépitude de la demeure avant les travaux [2].
A la suite du reportage sonore, une visite "muette" des différents espaces depuis l’extérieur où l’on appréhende le grand vaisseau de briques jaunes entre ses jardins et ses plans d’eau (piscine et miroir d’eau), et une visite de l’intérieur se conformant à la description faite dans le fascicule publié en 1934 par la revue L’architecture d’Aujourd’hui, Une demeure 1934.
[1] Les usines Cavrois-Mahieu, fondées en 1887 par Jean Cavrois-Lagache et Auguste Cavrois, étaient situées rue Montgolfier et rue Claude Lorrain à Roubaix. Aujourd'hui, lieu de résidence de l'association Le Non-Lieu qui préserve, entre autres, deux cheminées de l'usine.
[2] On peut suivre les différentes étapes de la rénovation de la villa Cavrois sur le site http://www.villa-cavrois.fr/
L’histoire de la construction est des plus mouvementée : un couple de bourgeois issu de l’industrie textile décide dans les années 1920 de faire construire une demeure familiale pour ses sept enfants à l’écart de la pollution des usines [1] et choisit la partie encore agreste de Croix, en limite de Roubaix où s’entassent les lieux de production. M. Paul Cavrois fait appel dans un premier temps à l’architecte en vogue dans la région, Jacques Greber, qui dessine un projet régionaliste, conforme aux goûts de l’époque. Mais l’exposition des Arts Décoratifs de 1925 à Paris où le pavillon des productions textiles de Roubaix-Tourcoing jouxte le pavillon du tourisme, réalisation de Mallet-Stevens, révèle le Mouvement Moderne à Paul Cavrois qui contacte l’architecte et lui confie la réalisation de sa demeure. Celle-ci est achevée en 1932 en respectant le programme "air, lumière, travail, sports, hygiène, confort, économie".
Mais pendant la Seconde Guerre mondiale, la famille doit fuir les lieux occupés par l’armée allemande. P.H Parsy précise que la maison reste entretenue puisque des factures d’entretien ont été retrouvées dans les archives, prouvant que les Allemands reconnaissaient là un chef-d’œuvre de l’architecture moderne.
Après la guerre, la famille réinvestit la demeure en y apportant des modifications : l’architecte roubaisien Pierre Barbe intervient pendant une dizaine d’années sur l’organisation intérieure afin de répondre à de nouveaux besoins familiaux en créant des appartements individualisés à l’étage.
A la mort de Madame Cavrois en 1986, l’édifice est vendu et cesse petit à petit d’être entretenu. Le jardin est amputé d’une partie de sa surface pour faire place à un lotissement. Une association de sauvegarde se met en place pour éviter la démolition et les constructions prévues par la société immobilière alors propriétaire. On doit au travail érudit de l’historien de l’architecture Richard Klein le classement de la villa au titre des Monuments Historiques à la fin des années 1990 et finalement son achat par l’Etat en Juillet 2001.
Commence alors la restauration d’un bâtiment très dégradé et dont l’intérieur a été totalement vandalisé, ne laissant plus que l’ossature, les murs et les menuiseries métalliques des fenêtres, "un cadavre d’architecture". Depuis 2008, la demeure est propriété du Centre des monuments nationaux qui a travaillé à redonner aux lieux l’esprit "d’architecture totale" voulue par Mallet-Stevens : le mobilier d’origine a été racheté en salle des ventes ; les marbres volés dans les années 94 -95 ont été remplacés par des marbres de même origine dans des carrières ré-ouvertes pour l’occasion en Suède, en Italie, en Belgique. On peut déambuler maintenant dans la villa qui a retrouvé son décor et ses couleurs. Une seule pièce non restaurée témoigne de l’état de décrépitude de la demeure avant les travaux [2].
A la suite du reportage sonore, une visite "muette" des différents espaces depuis l’extérieur où l’on appréhende le grand vaisseau de briques jaunes entre ses jardins et ses plans d’eau (piscine et miroir d’eau), et une visite de l’intérieur se conformant à la description faite dans le fascicule publié en 1934 par la revue L’architecture d’Aujourd’hui, Une demeure 1934.
[1] Les usines Cavrois-Mahieu, fondées en 1887 par Jean Cavrois-Lagache et Auguste Cavrois, étaient situées rue Montgolfier et rue Claude Lorrain à Roubaix. Aujourd'hui, lieu de résidence de l'association Le Non-Lieu qui préserve, entre autres, deux cheminées de l'usine.
[2] On peut suivre les différentes étapes de la rénovation de la villa Cavrois sur le site http://www.villa-cavrois.fr/
Dominique Mons
Transcription
Journaliste
Il aura fallu 12 ans de travaux pour que la Villa Cavrois se dévoile au public. Dans les années 20, les Cavrois, un couple de riches bourgeois, confient la construction de la demeure familiale à l’architecte français Robert Mallet-Stevens. La maison est achevée en 1932, mais pendant la Deuxième Guerre mondiale, la famille doit fuir les lieux, alors occupés par l’armée allemande.Paul-Hervé Parsy
L’armée allemande, mais ce n’est pas le seul exemple, a pris soin de cette maison, puisque nous avons retrouvé des archives des factures d’entretien de la maison. Ils avaient conscience que c’était une maison moderne, que c’était une maison particulièrement de son temps, et eux avaient vraiment conscience, je pense, que c’était un chef-d’oeuvre d’architecture.Journaliste
Robert Mallet-Stevens, comme Le Corbusier, appartient au courant du style international. Après la guerre, la famille Cavrois réinvestit la demeure, mais à la mort de la veuve, l’édifice est vendu et cesse petit à petit d’être entretenu. Quand l’État la rachète, la villa n’a plus rien à voir avec son aspect originel.Paul-Hervé Parsy
Lorsque l’État a acquis la maison en 2001, on peut dire que c’était une quasi-ruine. Il ne subsistait que l’ossature, les murs et une grande partie des menuiseries métalliques des fenêtres. Mais l’intérieur était déjà ravagé, des arbres poussaient dans certains espaces de la maison et sur la terrasse. Et donc, c’est devenu comme un cadavre d’architecture.Journaliste
Depuis 2008, la demeure est la propriété du centre des monuments nationaux. Les travaux de restauration ont coûté 23 millions d’Euros, ils ont permis de redonner au lieu l’esprit d’architecture totale voulu par Mallet-Stevens. Ce mobilier d’origine, par exemple, a été acquis lors d’une vente aux enchères et 80 % du marbre originel a été restauré.Paul-Hervé Parsy
Ces marbres ont été volés dans les années 94, 95, enfin volés ou vendus, peu importe, notre objectif a été de les retrouver. Donc nous avons pu, en Italie, en Suède, en Belgique, rouvrir des carrières et retrouver des marbres appartenant aux mêmes veines.Journaliste
Le public pourra investir les lieux dès le 13 juin, l’entrée sera de 7,50 € et gratuite pour les moins de 26 ans.(silence)