L'application de la loi Montagne à Monêtier les Bains

08 mars 1985
03m 35s
Réf. 00103

Notice

Résumé :

Reportage sur la loi Montagne, consacrée à l'aménagement du territoire. Elle doit répondre aux problèmes que rencontrent les agriculteurs de montagne. Ceux-ci comptent sur cette loi pour les aider dans le domaine foncier. La ville de Monêtier les Bains, dans les Hautes Alpes, est prise en exemple d'une bonne application de celle-ci avec le couple Boussouar, qui élève des chèvres ; fabrique des fromages ; possède des gîtes ruraux ; et dont Hélène, l'épouse, est monitrice de ski.

Date de diffusion :
08 mars 1985
Personnalité(s) :

Éclairage

Ce reportage, diffusé au journal télévisé de France 3 Provence Méditerranée en mars 1985, a pour vocation d'illustrer par un cas concret et complet, une des applications de la loi Montagne votée tout récemment, le 9 janvier 1985.

Cet exemple n'a pas été choisi au hasard, puisque les images ont été tournées dans la ferme d'Hélène et Karim Boussouar (président du syndicat des éleveurs caprins) à Monêtier les Bains, dans les Hautes-Alpes. Alors que l'on peut s'attendre à un éclairage du contenu de cette loi, de son champ d'application, notamment en matière d'aménagement de la montagne, le reportage participe essentiellement à véhiculer un certain nombre de stéréotypes. En réalité, les montagnards n'ont jamais « hiberné comme des marmottes », leurs activités hivernales étaient simplement différentes (artisanat, ou emploi en ville). Ainsi, la pluriactivité illustrée avec le cas de cette éleveuse, également monitrice de ski, n'est pas nouvelle contrairement à ce que semble dire le journaliste. De même, en fin de reportage, il oppose les travailleurs des cimes à ceux des plaines. Cette opposition est inadéquate et rend bien compte des stéréotypes associés aux sociétés de montagne que les journalistes continuent de véhiculer. Il aurait été préférable de parler de spécificité des économies et des activités de montagne qui ont toujours été basées sur la complémentarité de plusieurs activités professionnelles saisonnières. Cependant, cette phrase du journaliste correspond à la vision de la montagne qui prévalait à l'époque de la rédaction de la loi Montagne, c'est-à-dire une montagne perçue comme un handicap à la productivité. Les normes de rendement agricole étant basées sur les parcelles de plaines, elles ne prennent donc pas en compte les spécificités locales.

En outre, les commentaires n'apportent que très peu d'éléments d'analyse, seulement quelques chiffres sur la production de fromage. Les véritables apports proviennent de l'interview de l'éleveuse, qui présente de façon précise les problèmes des éleveurs de montagne et les solutions apportées par cette loi spécifique, qui ne s'applique que sur une seule partie du territoire (les zones classées en zone montagne par décret). Elle évoque le problème de la gestion du foncier qui échappe aux éleveurs et agriculteurs, car les parcelles sont très morcelées. La loi Montagne institue des mesures pour récupérer des terres laissées en jachère. Elle propose également un outil juridique, l'association foncière pastorale, permettant de regrouper les terres de propriétaires privés pour les donner à cultiver à un agriculteur. Mais, comme le précise l'éleveuse, les montagnards doivent s'approprier les mesures de cette loi pour la rendre opérationnelle.

Les images montrent bien les différentes activités de la personne interrogée, on la voit successivement dans sa bergerie, dans son atelier en train de mouler ses fromages, puis sur ses skis à l'occasion d'une leçon. Les gîtes ruraux qu'elle loue sont aussi filmés. Notons, que l'orientation des commentaires sur les différentes activités est particulière. L'absence de son mari parti au salon agricole est bien mentionnée. Malgré cela, « elle se démène », mène « tambour battant » ses activités « avec compétence et dextérité ».

La loi Montagne aborde d'autres thématiques que celles de l'économie et du tourisme, elle fixe par exemple des règles spécifiques en matière d'urbanisme avec comme objectif la préservation des paysages. Elle crée de nouvelles institutions propres pour la montagne et surtout, reconnaît un droit à la prise en compte des différences et instaure une forme de solidarité nationale en faveur des territoires de montagne.

Pour aller plus loin :

- DATAR

- Version originale de la Loi Montagne du 09/01/1985

- Loi Montagne actuellement en vigueur

Lauranne Jacob

Transcription

Thierry Stampfler
La loi sur la montagne, elle vient tout juste d’entrer en application. C’est la première fois qu’un texte est consacré uniquement à l’aménagement d’une partie du territoire. Alors comment est perçue cette nouvelle législation ? L’exemple d’un couple d’agriculteurs à Monêtier-les-Bains, dans les Hautes-Alpes.
(Bruit)
André Hatchondo
On craignait que la Loi Montagne accouchât d’une souris. Agréable surprise avec 174 articles savamment calculés, elle cerne tous les problèmes particuliers posés aux agriculteurs évoluant en altitude.
(Bruit)
André Hatchondo
Et la preuve que le montagnard n’hiberne plus comme une marmotte, la voici, avec ce cas exemplaire d’un couple qui représente à lui seul quatre cas de figures prévus par la loi récemment promulguée. Hélène Boussouar se démène au milieu de ses 55 chèvres et 26 chevreaux. En l’absence de son époux Bel Kassim, Président du Syndicat National des Eleveurs Caprins, actuellement au salon agricole, elle mène tous les travaux tambour battant. Elle assure le ravitaillement de son troupeau et la traite avec compétence et dextérité.
Hélène Boussouar
Allez !
(Bruit)
André Hatchondo
Bon an, mal an, 31 000 litres de lait sont transvasés de la sorte. Reste à savoir comment l’ancienne animatrice du SNJA a perçu la Loi Montagne.
(Bruit)
Hélène Boussouar
Je crois qu’elle peut beaucoup nous servir, euh, entre autres sur le problème foncier, parce que en montagne, comme on le sait, c’est un foncier très morcelé. C’est un foncier que, qu’on ne maîtrise pas, que les agriculteurs ne maîtrisent pas du tout. Et je crois qu’avec ce que la loi nous apporte concernant la récupération des terres incultes, concernant la facilité pour mettre en place des associations foncières pastorales entre autres, je crois que cette loi peut nous apporter beaucoup.
(Bruit)
André Hatchondo
Deuxième aspect, la fabrication des fromages, en 1984 quelques 3300 kilos. Dans la mesure où la loi Montagne prône une politique de produits de qualité, les Boussouar ont anticipé. Tout se passe comme si les acheteurs leur avaient accordé ce label depuis trois ans. 60 % de leur production est écoulée sur place, 30 % chez les commerçants de la vallée, 10 % à Paris à Lyon et Marseille.
Hélène Boussouar
Je crois qu’il faut aussi qu’on ajoute, qu’il faut que nous, agriculteurs, on sache s’en servir, et qu’on ait surtout la volonté de s’en servir. Une loi peut exister et être inopérante si personne n’en a besoin.
André Hatchondo
Troisième volet de l’activité des Boussouar, leurs deux gîtes ruraux qui affichent toujours complet.
(Silence)
André Hatchondo
Quatrième métamorphose, enfin Hélène troque son habit de bergère contre la tenue officielle de monitrice de ski de fond.
(Bruit)
Hélène Boussouar
D’une part, c’est un plus financier, il faut le reconnaître, mais c’est aussi un plus euh, comment je peux dire, j’allais dire culturel. On rencontre des gens, que ce soit par les gîtes ruraux ou que ce soit euh, comme ça, par une activité de loisir, et ça nous permet de ne pas rester trop seuls, perdus au fond de la vallée, quoi.
(Bruit)
André Hatchondo
Sans doute, tenons-nous en cette agricultrice ou monitrice un sujet peu banal, mais n’empêche que l’émulation aidant, la loi Montagne semble en mesure de promouvoir de nouvelles vocations. Désormais, les travailleurs des cimes ne devraient plus être pénalisés par rapport à ceux des plaines, comme c’était le cas dans le passé.
(Bruit)