Le prieur de l'abbaye de Boquen
Notice
Reportage sur Dom Bernard Besret, ancien prieur de l'abbaye de Boquen, dans les Côtes-d'Armor. Il vient d'être destitué.
Éclairage
26 octobre 1969. Bernard Besret, né en 1935, moine prieur de l'abbaye cistercienne de Boquen depuis 1964, célèbre sa dernière messe à Boquen (22). Il vient d'être destitué.
Le concile Vatican II (1962-65) a largement ouvert l'Eglise aux vents du monde mais des questions sont restées en suspens dont celle du célibat des prêtres. C'est dans cette période de questionnements que Dom Bernard Besret, qui a d'ailleurs pris part aux travaux de Vatican II, prend le poste de prieur. Son premier geste est symbolique : il enlève les clés du monastère. Il veut en faire un lieu d'accueil, de réflexion et de dialogue pour tous, qu'ils suivent ou non les règles de l'Eglise. Rapidement, l'abbaye devient un centre spirituel qui accueille de nombreux étudiants en quête d'une spiritualité et d'un mode de vie nouveau. Les offices magnifiés par de superbes psaumes et célébrés en français accueillent une grande foule.
On y vient aussi pour les discussions qui traitent des problèmes du moment : la sexualité, la contraception, la place des prêtres. En juin 1968, Boquen est le lieu d'une université populaire d'été. Les rencontrent se multiplient et le 10 mai 1969, Dom Bernard organise une fête. Lors du discours d'accueil, il dit sa volonté de faire des monastères « des centres de construction du peuple chrétien » et affirme « que le célibat comme l'ascèse et la prière doivent être choisis en fonction de notre aptitude à l'amour [...] chaque fois que sous prétexte de religion nous voulons imposer un carcan à la vie privée, domestique ou professionnelle de l'homme, nous allons à l'opposé de la libération que le Christ est venu apporter ». Suite à cela, il propose que les prêtres puissent bénéficier d'une année sabbatique pour réfléchir à leur engagement face au célibat.
Le lendemain, le discours est reporté en première page de Ouest-France. Les catholiques se divisent, les intégristes allant jusqu'à menacer la vie et les œuvres du prieur. Aussi l'Eglise n'annoncera t-elle le verdict qu'en octobre : Bernard Besret doit quitter Boquen. L'affaire est largement médiatisée et des milliers de jeunes assistent à sa dernière messe.
Le monastère ne survivra pas au départ de Bernard Besret. Après une période de flottement, les moines cisterciens laisseront la place aux petites soeurs de Bethléem. Quant à Bernard Besret, marginalisé par l'Eglise, il s'exprimera deux ou trois fois à la télévision dans les années 70 et 80. Il a poursuivi une carrière scientifique, à la Cité des Sciences notamment, et a continué à nourrir sa réflexion personnelle. Il a publié en 1976, un ouvrage intitulé De commencement en commencement, qui participe des réflexions émises à la fin du reportage et de de sa quête « du fil rouge » qui sous-tend toutes les vies...
Actuellement, il veut monter un Centre de Culture Traditionnelle Chinoise dans un ancien monastère taoïste au Qiyunshan, dans la province du Anhui. Reprenant les principes de Boquen, il souhaite en faire un lieu de rencontre pour les asiatiques et les occidentaux.
En savoir plus :
voir le site de Bernard Besret.