L'enfance de Gérard de Nerval
Notice
Le poète Jean Rousselot évoque l'enfance de Gérard de Nerval à Mortefontaine dans l'Aisne. Il ne reste plus que la maison délabrée qui appartenait à l'oncle du poète où, peut-être, il habita. Sur les images des décombres de la maison, sont évoqués les livres que le jeune Gérard a pu lire. Ce voyage se termine à Loisy, village où Gérard de Nerval était en nourrice, puis à l'école de Mortefontaine.
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Éclairage
C'est en décembre 1836, écrivant dans le Figaro, que Gérard Labrunie prend le pseudonyme Gérard de Nerval. Ce journaliste de 28 ans (né en 1808) est un Parisien du cœur de Paris. Son père exerce la médecine rue Saint-Martin à hauteur du n°168 actuel. Sa mère est la fille d'un commerçant linger établi rue Coquillière, le futur quartier des Halles. Cependant toute la petite enfance de Gérard, jusqu'à l'âge de 6 ans, s'est déroulée dans le Valois. D'abord mis en nourrice au village de Loisy, il a été élevé par son grand oncle maternel Antoine Boucher habitant Mortefontaine. C'est d'ailleurs en référence à une pièce de terre limitrophe de Loisy et appartenant à cet oncle, dite Clos de Nerval, que le poète prendra son pseudonyme. Le Valois, qui va figurer de manière récurrente et quasiment transfigurée dans l'œuvre de l'écrivain est demeurée, aujourd'hui encore, malgré la trouée brutale que font à terre l'autoroute A1 ou dans les airs les incessants croisements des longs courriers décollant de Roissy, une région secrète de forêts et de châteaux. Tout au long des vallées de la Launette et la Nonette, à Ermenonville, Versigny, Fontaine-Chaalis, mais aussi bien dans les alentours de Senlis, à Ognon, Brasseuse et Raray, se cachent des résidences au milieu de somptueux hectares de parcs qui, protégés par le label Parc Régional, donnent l'idée de ce que pouvait être cet espace à l'époque du poète. Villages de petites fermes en pierre locale de teinte jaune ocre pâle, aux façades couvertes de vignes, de roses et roses trémières, ce sont autant de villages royaux blottis au milieu de forêts royales fréquentées pour la chasse depuis François Ier où Nerval, grand voyageur à travers l'Europe et l'Orient, étalonna ses premières marches. Qu'on se reporte par exemple à La Bohème galante (1852) résonnant des mystérieux poèmes chantés qui constituent le répertoire des plus pures chansons françaises, ou bien qu'on se tourne vers Sylvie (1853) et Aurélia (1854) sans omettre le récit Les Faux Saulniers (1850), sans cesse y reviennent les noms et les paysages de Senlis, Chaalis et Ermenonville, à la fois lieux de départ pour l'imagination (la route des Flandres) mais aussi points d'ancrage d'une incurable nostalgie pour un avant, un arrière-pays ressemblant à l'enfance. De ce territoire, Gérard de Nerval a sans doute fait, par la littérature, le paysage français le plus véritablement romantique. Il est vrai qu'il fut toute sa vie durant le fidèle adaptateur de la poésie allemande (Goethe, Schiller, Heine) et que ses incursions vers le Rhin sur les pas de son père, médecin attaché aux armées impériales à partir de 1808 et de sa mère morte et enterrée deux ans plus tard à Glogow en Basse Silésie constituèrent la matière même de ses rêves de retour impossible. Dans cet extrait des Bonnes adresses du passé, une émission de l'ORTF qui faisait découvrir les villes, villages et demeures de personnages célèbres, l'auteur du commentaire assez hasardeusement psychanalytique n'est autre que le poète Jean Rousselot.