Le groupe de jeunes chanteurs de Laruns dans les Pyrénées-Atlantiques
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Notice
Résumé
De jeunes gens de Laruns, en vallée d’Ossau, se réunissent dans les cafés ou dans un lieu qu'ils ont baptisé le « Casino de la placette » pour chanter le répertoire traditionnel de la vallée. L'un des participants, Jacques Cauhapé, explique l'origine du nom du lieu. Il explique le but de ces réunions : chanter en toute convivialité, collecter le vaste répertoire auprès de personnes âgées, se l’approprier et en assurer la transmission. Ils entonnent un chant en occitan au caractère pastoral : Pastorejant lo long d'acera aigueta.
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Date de diffusion :
20 janv. 1969
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- 00077
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Contexte historique
Par
La rue du Bialé, l’une des plus vieilles rues du village de Laruns dans le haut de la vallée d’Ossau (Béarn, Pyrénées-Atlantiques) nous introduit dans l’environnement montagnard de l’hiver 1968-1969. Un monde pastoral illustré ici par trois anciens, dont Joseph Haget et Jean Gros, menant des vaches à l’abreuvoir situé en haut de la rue.
La dernière maison filmée est la « maison vieille » de la famille Sanchette, rebaptisée le « Casino de la placette » par les jeunes du village. Âgés d’une vingtaine d’années, ce sont les premiers enfants de la génération du baby boom : bergers, saisonniers de la station de ski d’Artouste, commerçants, élève ingénieur.
Le groupe d’amis se donne là rendez-vous le samedi soir pour le plaisir de se retrouver, boire, manger et chanter en toute convivialité. Le reportage nous fait entendre Pastorejant lo long d’acera aigueta (Gardant mon troupeau au bord de ce ruisseau), une chanson lettrée, en occitan béarnais, dans le style galant du XVIIIe siècle, chantée en polyphonie à deux et trois parties comme le veut l’usage très enraciné dans les Pyrénées gasconnes.
Ce chant est interprété par Jacques et Jean-Claude Cauhapé, Georges Casadebaig, Jean-Pierre Feugas, Robert Arruébo, Alain Casadebaig, André Béchat, Bernard Mounicou, Jean Géraut, Bernard Cauhapé, Georges Sanchette, Pierre Berdou, Pierre Mounaut, Jean-Jacques Lalanne, Pierre Monjuste, Jacques Haure, et Jean-Baptiste Sanchette, en présence de Simon Sanchette.
La notion – parodique – de « Casino » n’est pas neutre dans cette vallée qui a connu les heures glorieuses de la villégiature thermale, visitée par élites et artistes - notamment français et anglais - des années 1820 jusqu’à l’Entre-Deux Guerres. Cette villégiature a particulièrement impacté la patrimonialisation des répertoires chantés, musicaux et chorégraphiques, instrumentarium, costumes et pratiques festives (particulièrement les fêtes du 15 août à Laruns) et conduit ainsi à un exceptionnel niveau de transmission : ces pratiques jouissent toujours, aujourd’hui, d’une grande vitalité.
Signe des temps, en cette fin des années 1960 où s’amorce une « ère patrimoniale », la nécessité de conserver, se réapproprier et transmettre s’exprime également parmi ces jeunes Ossalois, certains éprouvant le besoin de rassembler le répertoire chanté qu’ils compilent en un volumineux cahier de quelques 150 chansons.
À l’instar de ses aînés du village, le groupe d’amis – « Los joens de Laruntz » (Les jeunes de Laruns) – se mue ponctuellement en groupe scénique en montant en 1969 sur les planches du Hestau de Siròs, festival de la chanson béarnaise de Siros créé en 1967. Il y chante La plenta deu pastor, la première création dudit festival et du renouveau polyphonique. C’est là l’œuvre de Georges Sanchette et Jean-Claude Coudouy, le jeune boucher-charcutier et conteur de Laruns qui deviendra l’une grandes figures du Béarn et de la Gascogne. Ce festival, catalyseur de l’abondante vocalité polyphonique béarnaise – le Béarn est réputé être lo pais de las cantas (le pays des chants) – qu’il ravive et structure, est à l’origine d’innombrables formations musicales.
« Le petit casino de la placette » que visite ici le jeune ethnomusicologue du Musée de l’Homme Bernard Lortat-Jacob, et dont le label Le Chant du Monde publiera en 1975 un titre dans l’album Musique traditionnelle des pays de France, se dissout après quelques années au gré des parcours de vie de chacun. Il constitue toutefois les fondations du groupe Los de Laruntz qui naît officiellement en 1983, présidé par Jean-Claude Coudouy, et dans lequel plusieurs générations d’Ossalois se succèdent, participant ainsi activement à la vie du chant polyphonique en Ossau et au-delà, à travers cantèras (réunions apéritives et chantées) enregistrements. Leur répertoire, notamment les créations de Sanchette et Coudouy telles que La plenta deu pastor ou O mon país, jouissant d’une très grande notoriété.
Transcription
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(Silence)
Journaliste
Jacky Cauhapé, pourquoi avoir appelé ce lieu de rencontre Le Casino ?
Jacques Cauhapé
Nous l’avons appelé Le Casino parce que c’est le lieu où nous nous réunissons d’habitude.Nous sommes un petit groupe de jeunes, ici, qui aimons chanter.Alors, nous nous réunissons d’abord dans les bistrots et ensuite quand les bistrots sont fermés, nous venons ici.Et comme c’est un petit club, si vous voulez, nous sommes entre nous.Il ne faut pas la cravate.On est comme ça.On vient y casser la croûte.Alors, nous l’avons appelé Le Casino par, peut-être, pas pour humilier les gens d'Eaux-Bonnes qui ont un casino mais, enfin,à Laruns il n’y a pas de casino alors nous avons fait notre casino.
Journaliste
Et vous chantez des chansons alors folkloriques ?
Jacques Cauhapé
Nous chantons des chansons surtout folkloriques, oui, en français ou en patois, peu importe.
Journaliste
Vous en avez réuni beaucoup ?
Jacques Cauhapé
Actuellement, nous en avons copié et réuni 150 environet nous comptons bien continuer et arriver aux 250.Et les apprendre en faisant chanter les plus âgés, ceux qui les savent, ceux qui les ont entendues.
Journaliste
C’est-à-dire que vous ne voulez pas que ce patrimoine ne se perde ?
Jacques Cauhapé
Nous ne voulons pas qu’il se perde et c’est pour ça que nous avons copiéeset c'est pour ça que nous nous réunissons de temps en temps pour les remettre dans le vent.
Journaliste
Alors, pour nous faire plaisir, est-ce vous voudriez nous chanter maintenantune chanson qui vous semble particulièrement typique de Laruns ?
Jacques Cauhapé
Si vous voulez nous allons chanter par exemple Pastorejant,qui est la chanson d’un berger qui est en montagne et qui rencontre, bien entendu, une bergère.Et l’histoire se passe dans des coteaux, dans des vallons, enfin, au bord de l’eau un peu.Et puis tous les deux, ils s’appellent l’un et l’autre et chantent une chanson avec chacun.L’un a sa trompette, sur la chanson, sa trompette, l’autre sa lyre.Et tous les deux sont à l’unisson et sont tranquilles dans un coin.Personne ne les ennuie.
(Chant)