Autre banlieue, autre époque

05 novembre 2009
03m 05s
Réf. 00803

Notice

Résumé :

Reportage consacré au quartier des Dervallières à Nantes. Dans cette cité, plus de 25 nationalités se côtoient chaque jour. Comme tant d'autres, Founé, Mariama et Mama sont des enfants d'immigrés. Parfaitement intégrées dans le quartier, elles portent en elles les valeurs et les traditions de leur communauté africaine. Founé, Mariama et Mama se connaissent depuis l'école maternelle. Leur amitié c'est avant tout une histoire de terre, de racines maternelles. Dans le quartier, elles ont leurs habitudes leurs repères. Ensemble elles ont créé "Diamant noir", un groupe de danse africaine. Ballottée entre deux mondes que tout oppose, ces filles au large sourire ont trouvé leur place et leur identité. Fières d'être Françaises, fières aussi de leur bout d'Afrique.

Type de média :
Date de diffusion :
05 novembre 2009
Source :
FR3 (Collection: TV Estuaire )
Thèmes :

Éclairage

Autre banlieue, autre époque.

Le quartier des Dervallières a été construit dans les années 50 pour pallier le déficit de logements d'une agglomération nantaise en plein développement. Dès 1959, ce nouveau faubourg accueille une population ouvrière avec le confort et les nouveaux standards de la “vie moderne” qu'apporte une économie nationale en pleine croissance. Mais la crise économique arrive et se traduit pour ses habitants par le chômage, l'appauvrissement, voire la marginalisation et l'exclusion. Des interventions urbaines sont décidées à partir des années 1990 pour valoriser ce quartier jugé “sensible” par les institutions. Mais elles n'évitent pas aux Dervallières d'être touchées en 2005 par les émeutes des banlieues, cri d'alarme de ces populations délaissées. L'enjeu de ces violences urbaines, et les réponses qui leurs sont apportées dans le débat public, dépassent la simple considération économique, et finissent par se concentrer sur des problématiques culturelles et identitaires qui questionnent le modèle culturel et social français.

Qui sont ces jeunes oubliés des banlieues, enfants des migrations économiques de la seconde moitié du XXe siècle?

Ces trois jeunes Françaises, originaires de différents pays d'Afrique subsaharienne, formulent une première réponse. Vivant une existence modeste, dans un environnement urbain jugé “difficile” – bien qu'elles soient nées en France et instruites dans ses institutions – elles ont hérité et même cultivé simultanément un autre patrimoine culturel, celui-ci malien, guinéen, sénégalais... Cet entre-deux mondes, vécu comme un échec par les tenants d'un modèle français de tradition intégrationniste, exprime simplement l'évolution d'une société, de ses populations et des représentations sociales et culturelles qui la façonnent. Ces Françaises tant européennes qu'africaines, se nourrissent de leurs origines, de leurs quotidiens partagés avec d'autres individus, et de leurs rêves d'horizons lointains, pour vivre dans l'hexagone une identité nouvelle, pluri-nationale, en rythme avec leurs existences globalisées. Et quand vient le temps de l'exprimer par le corps, la danse qu'elles performent est le Coupé Décalé : style ivoirien créé à Paris, repris en Côte d'Ivoire, diffusé dans toute l'Afrique francophone, et relayé dans leurs différentes diasporas. Cette incarnation d'une identité africaine-française inédite est celle d'une nouvelle génération qui danse et chante, s'inspire et reprend sur le territoire hexagonal, à travers une myriade de groupes (La Saomera, Anges d'Afrik, Angelo Capitaine...) une Afropop transnationale.

Thomas Jacques Le Seigneur

Transcription

(Musique)
Journaliste
Elles sont nées à Nantes, dans la cité des Dervallières, mais leur cœur est voué tout entier à ce lointain continent, l’Afrique. Leurs parents y ont grandi, elles rêvent d’y passer leurs vieux jours. Au deuxième étage, l’appartement est modeste. Founé y vit avec sa mère et ses sœurs plus jeunes, ici, tout rappelle le pays.
Inconnu
Alors, qu’est-ce qu’on dit, qu’est-ce qu’on donne comme conseil à nos enfants, de ne pas voler, de ne pas mentir…
Founé Diarra
C’est comme une double culture, on a, quand on sort dehors, quand on va à l’école et tout, on vit à la française, et quand on rentre chez nous, on vit plus à la mode africaine, à la mode…. Pour moi, c’est Mali, ça se retrouve dans les plats qu’on mange, dans la façon de se parler et tout, on ne parle pas forcément français. Ou dans, c’est une double culture, c’est on s’adapte aux deux, en fait.
Journaliste
Et c’est une vraie richesse en même temps !
Founé Diarra
Ah oui, d'avoir une double culture, c’est une vraie richesse, c’est sûr !
Mama Kaba
Ben moi, je suis d’origine, originaire de Guinée, donc je sais que je vis, là, ben, chez moi, j’ai des plats guinéens, je, enfin, il y a plein de trucs que je fais mais ce n’est pas exactement, je…. Ce n’est pas exactement comme si j’étais en Guinée en fait. Il y a des trucs que je, enfin, il y a des trucs qu’on fait en Guinée que je ne peux pas faire en France en fait.
Mariama Fofana
Nos parents en fait, ils nous ont toujours indiqué les cultures de là-bas. Donc, c’est pour ça qu’en fait, on a de la chance d’avoir des doubles cultures parce que nos parents, ils nous ont montré les modes de vie qu’ils avaient un peu là-bas. Mais comme on ne peut pas tout faire comme en Afrique, ben, on fait, on s’adapte par rapport à ici.
(Musique)
Journaliste
Founé, Mariama et Mama se connaissent depuis l’école maternelle. Leur amitié, c’est avant tout une histoire de terre, de racine maternelle. Dans le quartier, elles ont leurs habitudes, leurs repères, même si elles ne sortent plus autant que par le passé.
(Musique)
(Bruit)
Inconnu 2
C’est normal, les filles, elles ne traînent pas dans le quartier, elles n’ont pas à traîner. Mais c’est la vérité, il faut arrêter. Ce n’est pas pour les filles, le quartier.
Mama Kaba
Des fois, il y a des petites délires mais voilà, sans plus. Ça ne peut pas être tout le temps là, on se pose avec eux quoi, c’est, on se dit bonjour, c’est tout, c’est ça.
Journaliste
Ensemble, elles ont créé Diamants Noirs, un groupe de danse africaine et elles répètent chaque semaine.
(Musique)
Mariama Fofana
Depuis qu’on est petites, on a toujours fait ça ensemble, eh ben, depuis qu’on a grandi, on est toujours ensemble et on aime danser ensemble.
Journaliste
C’est culturel aussi, puisque vos mamans, elles dansent ?
Mariama Fofana
Oui, tout le temps, oui, elles dansent.
Founé Diarra
Elles aiment ça, c’est une transmission aussi, c’est la joie de vivre, c’est exprimer un peu tout ce qu’on ressent à travers la danse et tout, c’est, ben oui, ça permet de se défouler, c’est bien.
Journaliste
Ballottées entre deux mondes que tout oppose, ces filles aux larges sourires ont trouvé leur place et leur identité, fières d’être françaises, fières aussi de leur bout d’Afrique.
(Musique)