Jamel Debbouze

13 novembre 1995
02m 06s
Réf. 00246

Notice

Résumé :

Ce reportage présente Jamel Debbouze, jeune comédien originaire de Trappes, qui joue son premier spectacle au café-théâtre Le Movies. Il se livre d'abord à un micro-trottoir, interrogeant quelques passants sur les problèmes des banlieues. Il est ensuite interviewé sur son rapport à ces banlieues dont il est issu. Enfin, des extraits du spectacle, montrant la diversité des personnages interprétés, sont présentés.

Date de diffusion :
13 novembre 1995
Source :
A2 (Collection: JA2 20H )
Artistes et personnalités :
Thèmes :

Éclairage

Jamel Debbouze est né le 18 juin 1975 à Paris. Il passe sa jeunesse à Trappes, où il entre dans la compagnie d'improvisation d'Alain Degois, Déclic Théâtre. Avec cette compagnie, il ira en finale du championnat de France junior de la Ligue d'improvisation française. C'est également avec Alain Degois qu'il crée son tout premier spectacle, en 1995. La galerie de portraits de C'est tout neuf, qui aborde naturellement le thème de l'immigration, ou celui des banlieues, est un succès : Jamel investit d'abord un petit théâtre du onzième arrondissement avant de se produire au café théâtre Le Movies. Les médias commencent alors à s'intéresser au phénomène Jamel, qui propose un regard neuf et différent sur les jeunes issus des banlieues. Jamel est engagé sur Radio Nova, puis à la télévision, sur Paris Première et Canal Plus. Cette exposition médiatique va lui permettre d'explorer également le cinéma (Zonzon, Indigènes). Profitant de sa notoriété, Jamel lance en 2006, sur Canal +, le Jamel Comedy Club : il y constitue une équipe de jeunes humoristes qui se présente face au public sur le mode du Stand-up, c'est-à-dire sans accessoires autres qu'un micro, n'ayant que les mots pour se défendre. Il y révèle de futurs talents, comme Claudia Tagbo, Fabrice Eboué ou Patson. Il acquiert également un théâtre, le Comedy Club, où il donne leur chance à de jeunes artistes, révélant les talents en leur offrant une scène libre sur laquelle ils peuvent venir s'exprimer.

Jamel Debbouze est indissociable de ses origines. Français d'origine marocaine, avouant sans complexe sa religion musulmane, il décrit souvent, dans ses spectacles, la vie dans les banlieues, se jouant des clichés qui y sont attachés. Il s'est également créé, à ses débuts, un personnage qui a fait son succès : survolté, jamais sérieux, il cultive son accent, parle un verlan fleuri d'expressions typiques, et bute souvent sur les mots « compliqués ». Ce personnage, récurrent également dans ses sketches, a permis au grand public d'ouvrir un regard différent sur les banlieues, sur lesquelles Jamel Debbouze a toujours accepté de s'exprimer. Il inaugure une génération d'humoristes issus de minorités, qui empoignent les questions de l'immigration et de l'intégration et mettent à profit leur expérience du racisme ordinaire et de la pauvreté pour créer un nouveau type d'humour. Lors du lancement du reportage, le journaliste fait allusion à Smaïn, qui, depuis A star is beur en1986, fonde lui aussi son humour sur les thématiques de l'immigration. Mais Jamel Debbouze renouvelle le genre, notamment en s'appropriant cette technique particulière du stand-up, que de nombreux humoristes après lui vont explorer. Alors que le one-man show en France consiste souvent à créer pour chaque sketch un personnage qui évolue en vase clos, sans adresse directe au public, les acteurs de stand-up n'utilisent que le langage, et s'adressent directement au public, cherchant à partager avec lui leurs expériences.

Anaïs Bonnier

Transcription

Présentateur
Je vous propose maintenant deux minutes de rires, jusqu’à présent en effet, le comique de ce que l’on appelle les beurs, était principalement illustré par Smaïn. Aujourd’hui, vous allez découvrir un talent, venu des banlieues, Jamel. Il se moque de lui et des autres. Thierry Hay, Daniel Lefebvre.
Jamel Debouzze
Et si je cours tout de suite…
Journaliste
Comme tous les journalistes, Jamel Debouzze est très excité quand il s’intéresse aux problèmes de banlieue.
Jamel Debouzze
J’aimerais savoir qu’est-ce que vous pensez des problèmes graves qu’y a dans la banlieue ? Tu sais les problèmes graves, qu’est-ce que t’en penses Monsieur ?
Inconnu 1
Bah, ouais c’est grave quoi…
Inconnu 2
Je vous jure que je n'y suis pas encore allé.
Jamel Debouzze
Y a des problèmes graves quand même !
Inconnue 1
Bah oui, vous excitez pas comme ça !
Jamel Debouzze
Non, parce que moi ça, ça, ça… ça me touche… ça me prend les tripes moi, c’est pour ça.
Journaliste
Mais lui, si cela lui tient tant à coeur, c’est parce qu’il en vient, qu’il y vit et qu’il y vivra. Lui aussi il veut en faire, du spectacle, mais à sa manière.
Jamel Debouzze
Je paie des impôts comme tout le monde. Oui ? Oui ! Moi je suis au chômage comme tout le monde ! Oui ! Em, em, em [Marjouké], arrête de crier s’il te plaît. Et lâche les cheveux de la dame. Et rends lui ses dents, viens faut que je te parle, viens, viens.
Journaliste
Vingt ans, franco-marocain, un bras paralysé pour, un jour, avoir voulu prendre un train trop vite, Gavroche des cités difficiles, il s’est lancé sur scène pour rire des banlieues avec le secret espoir de mieux les faire comprendre.
Jamel Debouzze
Quand on me parlait de Paris, pour moi Paris, c’est loin, c’est Mars pour moi Paris tu vois. De savoir qu’y a des gens qui viennent me voir jouer sur scène et qui viennent payer leur billet pour venir voir un mec comme moi, sur scène, c’est fabuleux pour moi. Tu vois ce que je veux dire ? Putain ! Faut pas me parler d'aller au commissariat de police ou va-t-en hein ! J’ai de graves problèmes, j’ai… Mon père il s’est suicidé, il s’est suicidé déjà deux-trois fois, il en a marre je te dis !
Journaliste
Un grand rôle de cinéma au Maroc et toute la France à conquérir, Jamel a décidé de faire exploser les banlieues mais de rires.
Jamel Debouzze
Comme ça tu captes quelque chose ?
Journaliste
La haine ? Connais pas !
Jamel Debouzze
La première fois que je t'ai vu en bas de mon HLM je me suis dit, ça y est, c’est toi que je l’aime. Je voulais prendre une affaire, j’ai perdu la tête, je ne voulais même plus jouer au « basket ».