Footit et Chocolat

09 novembre 1983
58s
Réf. 00790

Notice

Résumé :

Présentation du duo clown blanc et Auguste composé par Footit (Tudor Hall) et Chocolat (Raphaël Padilla). Des gravures et des photos des deux partenaires précédent un sketch très rythmé, dans lequel Footit peut faire valoir ses talents d'acrobate.

Date de diffusion :
09 novembre 1983
Thèmes :

Éclairage

George Tudor Hall (George Foottit), artiste de cirque, écuyer et acrobate, (Manchester, 1864 - Paris, 1921), et Raphaël Padilla (Chocolat), dit aussi Raphaël de Leios (Cuba, 1868 - Bordeaux, 1917), constituent un des premiers duos célèbres (de 1886 à 1910) dès que les clowns (blanc) s'adjoignent les services d'un auguste. Ils se rencontrent à l'occasion du sketch intitulé le Chemin de fer d'Asnières.

A cette époque, le Maître incontesté de la piste, est, dans tous les domaines, même celui du jeu dramatique, le clown. L'auguste n'est que son faire valoir. Pour André Sallé, la dualité construite avec « d'un côté, celui qui réussit tout, qui accomplit des prouesses, mais les assaisonne d'extravagances portant le public à rire d'un rire admiratif ; de l'autre, celui qui, de ses incessants ratages, tire des effets comiques mais, là, le rire est moqueur » [1] est préexistante et active dans le clown initial. Le clown-parleur, installé dans une posture qui cherche à rayonner, exerce son pouvoir sur celui qu'il aime à considérer comme sa propre ombre imprimée en négatif. « Estimant peut-être qu'il s'était fourvoyé dans des situations indignes de sa Seigneurie, reniant le "vilain" qu'il hébergeait sous une même identité, [il] mobilise l'auguste pour recevoir les coups à sa place » [2].

Le duo Foottit et Chocolat est symptomatique de la dualité clown/auguste, dominant/dominé, dans laquelle Chocolat est la victime de Footit. De plus, nous ne pouvons nier la dimension raciale contenue dans le jeu qui consistait en un clown blanc humiliant le clown noir et ce en pleine exposition coloniale (1889). Adrian avance l'idée que Chocolat « semblait jouer le jeu sans arrière-pensée, conscient de ce que sa nature et son physique conféraient à ce qui n'était, en fin de compte, qu'un rôle » [3]. A. Sallée, faisant référence au spectacle A la cravache, qui permet à Footit de parodier Sarah Bernhard, dans lequel Chocolat incarne un esclave, précise qu'il ne faut y déceler « aucun relent de racisme », quoique l'auguste, le faible, le maltraité, le mal aimé, puisse figurer dans la galerie des persécutés ; mais il s'en sortira très vite, et avec vigueur » [4]. Pour Adrian, Footit défendait une conception particulière du rôle du clown, « un personnage qui devait fustiger, en le caricaturant, un certain type d'homme dédaigneux, hautain et sarcastique » [5]. Cependant, Roland Auguet mentionne la différence de succès obtenue par le duo, remarquable au Nouveau Cirque devant un public très mondain, mais plus modeste dans les cirques de quartiers, touchant une population plus populaire. Il pense que « ce public était trop sensible à l'injustice pour en rire. Il s'identifiait à Chocolat [...]. Et s'identifiant à lui, il ne pouvait que le plaindre » [6].

Précisons encore que la tyrannie de Foottit ne se limitait pas à la piste ; « dans la vie privée [il] traita souvent Chocolat comme un domestique méprisé » [7]. Le fait que le duo a fait école et que nombre de clowns ont calqué leur comportement, au moins scénique, sur celui de Footit est sans doute à mettre en liaison, en partie, avec le mode de recrutement de l'auguste qui est engagé bien souvent sur proposition du clown qui le rétribue sur son propre cachet. Tristan Rémy assure que les clowns « en profitaient pour les assujettir à une servitude économique dont les augustes avaient du mal à se libérer » [8].

[1] André Sallée, « L'Age d'or des clowns », dans Jacques Fabbri, André Sallée (dirs), Clowns et Farceurs, Paris, Bordas, 1982, p. 38.

[2] Ibid., p. 40.

[3] Adrian, « Repères et références », dans Clowns et Farceurs, Op. cit., p. 182.

[4] André Sallée, « Naissance du clown », dans Clowns et Farceurs, Op. cit. , p. 40.

[5] Adrian, « Repères et références », Op. cit. , p. 184.

[6] Roland Auguet, « Les fêtes populaires et le comique clownesque », dans Clowns et Farceurs, Op. cit., p. 156.

[7] Adrian, « Repères et références », Op. cit. , p. 184.

[8] Tristan Rémy, Les Clowns, Paris, Grasset, 1945, réédition 2002, p. 242.

Martine Maleval

Transcription

Annie Fratellini
On construit à Paris et autour de Paris, une vingtaine de cirques dont le nouveau cirque du faubourg Saint Honoré. C’est là en 1889 que Footit et Chocolat débuteront.
(Musique)