Le quotidien joyeux du Cirque Désaccordé

Les artistes du Cirque désaccordé se sont rencontrés au CNAC. Après leur cursus de formation, ils décident de fonder ensemble une compagnie, et de s'essayer à la vie en chapiteau, d'abord sur le terrain vacant d'un ancien camping à Gap, puis à Aix-en-Provence. Cette expérience influe directement sur leur manière de travailler, jusqu'à devenir source d'inspiration. Le nom de la compagnie sonne comme un clin d'œil à cet apprentissage de la vie en commun, où les concessions font loi : « Désaccordé », parce que les joyeux trublions n'arrivaient pas à trouver un nom qui fasse l'nuanimité. Vivacité, pluralité, polyvalence : l'énergie du collectif se retrouve dans des créations débridées, où les discipline se croisent et se complètent. Acrobaties, fil, jonglage, bascule, mât chinois, porté, saut acrobatique, trapèze, clown, chanson, fanfare : la prouesse s'insère dans la narration du quotidien, dans des spectacles qui, toujours, cherchent à « réduire l'écart entre le théâtre et la vie. La part de l'individuel, la part du collectif : que de mystères à éclaircir, que de conquêtes intérieures et collectives pour s'accorder ! Et cette réflexion inlassable sur ce qu'ils sont tout seuls, sur ce qu'ils sont entre eux est devenue leur matière artistique, le premier jet de toute création. » [1]

Les collaborations iront toutes dans ce sens : leur spectacle fondateur, C'est pour toi que je fais ça ! [2], est mis en scène par Guy Alloucherie : « A chacun des jeunes artistes, il a demandé de dire une bribe de sa propre histoire (en poème, chanson, sketch), de rejouer des déchirures du quotidien (de la bagarre de bistrot à la scène de ménage, en passant par le mauvais rêve) ou des bons côtés (la rencontre, l'histoire drôle). Les numéros s'inscrivent naturellement dans cette trame, qu'ils prolongent une situation, ou qu'ils servent momentanément à la résoudre. » [3]. C'est ensuite au tour de François Cervantes de mettre en piste Les oiseaux - le bord du monde, en 2001 : «  une histoire de cirque autour d'une compagnie. Il s'agit du cirque de l'intérieur, en dehors de la piste, qui s'exprime pourtant à travers toutes les disciplines circassiennes. » [4]. Après une création collective en 2002 autour des héros populaires de la télévision (Ildemik), le thème de la mise en abyme est de nouveau abordé en 2004. Après la pluie... s'inspire de la vie d'un cirque : «  un jour de printemps, après la pluie, dans un décor de campement, naît une ambiance particulière de fête aux tonalités burlesques et mélancoliques. La vie reprend toujours la même histoire : trouver sa place parmi les autres, rester soi-même. » [1]. Dans un décor suranné qui fleure bon les années 50, les tâches les plus anecdotiques sont prétexte à digression comique : quand il y a un balai à passer, c'est en équilibre sur un fil ; si le téléphone sonne, il faut aller le décrocher tout en haut du mât chinois... Le spectacle entérine une collaboration avec Christian Lucas, qui mettra en scène la création suivante, Petites Mythologies Populaires (2008). Après 17 ans de création collective, la compagnie opère un virage à partir de 2010, avec deux créations en comité plus restreint : Ce qu'on oublie dans l'armoire, autour du clown ; Couple ouvert à deux battants, transposition de la pièce de théâtre de Dario Fo et Franca Rame dans univers circassien. En parallèle de son travail de création, le Cirque Désaccordé poursuit ses actions de médiation culturelle sur son lieu d'implantation (résidences de travail, stages d'initiation aux arts du cirque...).

[1] Dossier de Presse Après la pluie... par Le Cirque Désaccordé à l'Espace Cirque d'Antony, 2007

[2] Spectacle de la 9e promotion du CNAC, 1997

[3] René Solis, Libération, 20 décembre 1997

[4] La Dépêche, février 2003