Bouvines le champ de bataille de 1214

27 juillet 1214
03m 23s
Réf. 00032

Notice

Résumé :
Faut-il installer des pylônes électriques sur le site du champ de bataille qui opposa  les troupes royales françaises de Philippe Auguste à une coalition organisée par Jean sans Terre, roi d'Angleterre, et soutenue par l'empereur du Saint-Empire Germanique Otton IV, le 27 juillet 1214 ? Facteur, cafetier, habitants sont interrogés sur leur ville et ce projet.
Date de diffusion :
21 février 1974
Date d'événement :
27 juillet 1214
Source :
Lieux :

Éclairage

Comment à partir d’un reportage sur l’installation d’une ligne à haute tension contestée sur le territoire de Bouvines faire parler les villageois de la bataille de Bouvines ?

Au cœur d’une campagne verdoyante, le clocher de l’église de Bouvines apparaît ; un écolier récite sagement sa leçon d’histoire : Le dimanche de Bouvines, comme le titre de Georges Duby [1]. Le 27 juillet 1214, des milliers de guerriers se battent furieusement près du pont de Bouvines qui enjambe la Marque. Des rois les conduisent, l'empereur du Saint Empire Romain Germanique allié du roi d’Angleterre d'un côté et le roi de France de l'autre. Ce dimanche-là, le roi de France Philippe Auguste affronte la coalition organisée par Jean sans Terre, duc d'Aquitaine, de Normandie et roi d'Angleterre, soutenue par le redoutable empereur du Saint-Empire Otton IV, et des comtes rebelles dont le comte de Flandre fils du roi du Portugal Ferrand ou le comte de Boulogne Renaud. Un plan d'invasion a été mis au point : après avoir décimé la flotte française, Jean sans Terre doit attaquer La Rochelle pendant qu'au nord les troupes d'Otton IV et de la coalition s'installent près de Valenciennes. Philippe Auguste a décidé de combattre au nord. Le 27 il refuse de transgresser l'interdiction papale de se battre le dimanche mais il fait de sorte que les coalisés attaquent et il est, grâce à Dieu, resté maître du camp. L’empereur a détalé ; les deux comtes rebelles ont été pris. Victoire, comme on l’a dit et répété, fondatrice : les assises de la monarchie française furent raffermies. Un événement ponctuel, mais retentissant.

En juillet 1914, une commémoration est organisée pour le 700e anniversaire de la bataille. Une souscription est lancée pour ériger un obélisque. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, y est apposée une plaque avec les noms des morts de la Grande Guerre. Puis un monument aux morts (que l'on aperçoit dans le reportage) est construit au cimetière. Un lien est néanmoins fait avec la bataille de Bouvines avec en haut du monument, "Bouvines 1214-1914". Y figure aussi sur le pilier droit une inscription de l'écrivain Paul Bourget : "La bataille de la Marne c'est Bouvines renouvelé à sept cent ans de distance."

Interrogés successivement le facteur, un cafetier, un agriculteur, une riveraine occupée à nettoyer sa maison, tous connaissent la bataille de Bouvines ; tous contestent l’installation des pylônes électriques sur un site historique et évoquent l’église et ses vitraux.

Les vitraux de Bouvines ont été conçus à un moment où la France panse ses blessures de 1870 et prépare ses forces pour la revanche. C’est pourquoi, aux fenêtres de Bouvines, la bataille apparaît surtout comme une victoire sur "les Teutons", promesse d’autres victoires. C’est en 1879, qu’on décide de parer la nouvelle église d’une série de vitraux ; Neuf ans plus tard une souscription nationale est décidée, mais il faudra plus de 20 ans pour que soit réunie la somme nécessaire. Le maître verrier Champigneulles, de Bar-le-Duc, se met au travail. L’église commencée en 1892 est achevée en 1906. 21 vitraux en arc brisé hauts de huit mètres et larges de plus de trois mètres retracent la journée de Bouvines. Chaque verrière comporte trois parties : en bas, les blasons des familles nobles dont les ancêtres ont pris part à la bataille ; au-dessus, le tableau proprement dit (peinture sur verre) ; tout en haut, des anges au visage gai ou triste selon que l’épisode représenté est favorable ou non aux armes françaises. Les vitraux sont inscrits aux monuments historiques depuis  1981, et l'église depuis 2010.

Le souvenir de la bataille est toujours vivace : en 2014, pour le 800 ème anniversaire, une importante commémoration a mobilisé le village : spectacles, expositions et... passage du Tour de France.


[1] Duby, Georges, Le Dimanche de Bouvines : 27 juillet 1214, Paris, Gallimard, coll. "Les journées qui ont fait la France",‎ 2005, XIV-302 p
Martine Aubry

Transcription

(musique)
Enfant
Le 27 juillet 1214, Philippe Auguste a remporté la victoire de Bouvines. Il a combattu contre Otton IV le roi d’Angleterre, le comte de Flandre et le comte de Boulogne.
(bruit)
Journaliste
Vous savez ce qui s’est passé en juillet 1214 ici ?
Inconnu 1
Non !
Journaliste
Vous ne savez pas ? Cela ne vous dit rien le 27 juillet 1214, ça ne vous dit rien ?
Inconnu 1
Ah ben non, c’est la bataille de Bouvines, Philippe Auguste…
Cafetier
Ben, Bouvines, c’est Bouvines, vous savez pour beaucoup de monde, c’est Bouvines. Moi je tiens le café ici à Bouvines, ben, je vends énormément de cartes postales de Bouvines. Donc, il y a quand même un lien qui reste là.
(musique)
Inconnu 2
Ben, je suis d'avis de quand c'est le cas, concernant Bouvines, on devrait pas y toucher quoi, c’est une victoire historique.
Inconnue 1
Oui, malgré tout, c’est un village quand même historique. Je trouve qu’on est fiers de notre village malgré tout.
Journaliste
Et alors, vous, ça vous embêterait de voir par exemple cette ligne passer ?
Inconnue 1
Oui, certainement.
Journaliste
Vous pensez que ça enlèvera quelque chose au village ou même à la campagne ?
Inconnue 1
Oui, certainement, oui. Vous voyez, ces affaires modernes et tout ça, qu’il y a maintenant, je trouve qu’on aime bien notre petit village comme il est.
(bruit)
Inconnue 1
On a les vitraux de l’église qui rappellent la bataille de Bouvines, alors on ne peut pas l’oublier, parce qu’on est toujours en train de les voir. A chaque fois qu’on va à l’église, on y pense.
(musique)
Cafetier
Ça fait plusieurs années déjà qu’on empêche le maire de bâtir à Bouvines à cause de cette fameuse zone verte là. Alors maintenant, là qu’on va implanter ces astronomiques piquets-là de ligne à haute tension plus le Train à Grande Vitesse, qui doit passer aussi à Bouvines.
Journaliste
Oui, mais enfin, c’est un peu curieux que l’on invoque une bataille qui s’est déroulée il y a sept siècles, non ?
Cafetier
Ben oui, sept siècles, mais on n’a quand même plus le respect de rien, alors ?
(musique)