Le Snowkite
Notice
Reportage à Vars, dans les Hautes Alpes, sur la pratique du snowkite, où le skieur ou snowboarder est tiré par une voile. Ce sport fait de plus en plus d'adeptes. Il nécessite toutefois d'avoir une première base en ski ou en snowboard.
Éclairage
Des années 1960 aux années 2000, la culture sportive compétitive jusque là référentielle a vu s'élever face à elle une culture plurielle incarnée par les pratiques libres (1). De ce tournant dans l'évolution du phénomène sportif découle une multiplication de l'offre. Avec elle, de nombreuses innovations technologiques et sportives sont apparues telle la glisse aérotractée représentée par le snowkite dans ce reportage diffusé à l'échelon national lors du journal de 20 heures du 7 février 2005. De même que la motivation de ces pratiquants d'un nouveau genre s'affirme à travers une attirance pour les éléments naturels, contemplation et goût pour les sensations, une conscience écologiste collective se construit avec la montée en puissance des pratiques de pleine nature. Dans le cas du snowkite, émanation des sports californiens (2), le moteur est remplacé par un élément naturel, le vent, qui en fait un sport à « énergie douce » et « à machine écologique » (3).
Après l'apparition du kitesurf au milieu des années 1980 la glisse aérotractée sur neige émerge une décennie plus tard. Comme son frère aîné nautique, le snowkite repose sur l'articulation de trois éléments : engin de déplacement, snowboard ou skis, aile de traction accompagnée d'une barre de direction et harnais. Il semble que le vent et l'espace suffisent pour accéder à l'autonomie et à la liberté, caractéristiques qui fondent l'opposition des sports « libres » (4) où la machine s'articule à l'homme sans l'englober et des sports lourdement machinisés, vol à voile, yachting à voile.
Le reportage insiste sur la simplicité du matériel et donne l'impression que le snowkite est accessible facilement aux débutants. Les représentations sociales adossées à ce sport relèvent de l'absence de contraintes et d'efforts, illustrée par l'expression « c'est un peu pour les fainéants ». L'exigence ne se situe pas dans l'utilisation de la force en vue d'affronter un adversaire mais dans la recherche d'équilibre avec les éléments. Tels des oiseaux, les snowkiteurs préfèrent voler par opposition aux skieurs « coincés » au sol. La maîtrise de la mobilité acrobatique autorise une diminution de l'effort, le « sportif glisseur » sollicite non pas la résistance mais la souplesse. La « fainéantise » est permise au profit d'une aptitude à l'habileté.
L'augmentation rapide du nombre de snowkiteurs et leur emprise sur de grands espaces de nature posent la question de leur réel droit d'expression. Sont-ils libres de s'exercer partout ? Le terrain paraît illimité « en bord de piste, loin des skieurs ». L'une des caractéristiques de ce sport est de ne pas solliciter les remontées mécaniques mais il est intéressant de noter que les stations livrées entre elles à une forte concurrence cherchent à capter ce public en plein essor. A l'instar de Vars – dont le nom apparaît sur le casque du moniteur, aux couleurs de la station des Hautes Alpes – nombre d'entre elles s'adressent aux néophytes en organisant des stages adaptés.
L'approche journalistique évoque avec légèreté les capacités techniques à acquérir sans insister sur les pré-requis, une base en ski ou snowboard et la maîtrise de la puissance de la voile.
Les intervenants élogieux à propos du snowkite n'insistent pas non plus sur les dangers inhérents (collision, conditions d'aérologie). Derrière les discours enjoués, il est question de vigilance face au risque d'accident. La Fédération Française de Vol Libre aurait-elle contribué à en réduire le nombre ? A l'inverse d'autres sports de glisse, le kitesurf et ses dérivés (5) se sont paradoxalement très vite rapprochés de la FFVL, fait rare dans l'histoire des fédérations car le plus souvent les nouvelles pratiques s'en écartent. Dès son émergence, la FFVL réussit à intégrer ce sport en accompagnant la formation des enseignants, en déployant de nouvelles écoles, permettant ainsi un développement maîtrisé.
(1) Ces pratiques sont caractérisées par la volonté de ne pas adhérer à une fédération ou à ne pas participer à des compétitions. Voir : Attali Michaël (2007) L'explosion des pratiques sportives : massification, différenciation (des années 1970 à nos jours). In : Tetart Philippe, Milza Pierre (eds.), Histoire du sport en France [Tome 2] : de la Libération à nos jours. Paris [Le Mans] : Vuibert Musée national du sport Université du Maine (coll. « Sciences, corps et mouvements »), 1 vol. 523p.
(2) Sont regroupés sous cette appellation les activités de type surf, wind-surf (planche à voile), skate-board, vol libre (delta-plane), ski, hot-dog, free-style etc, dont l'origine géographique et culturelle se situe sur la côté ouest des Etats-Unis.
(3) Pociello Christian (1982) Les éléments contre la matière : sportifs glisseurs et sportifs rugueux. In : Revue Esprit. p.19.
(4) Ibid. Christian Pociello opère une différence entre les sports qu'il dénomme « libres » par opposition aux sports lourdement machinisés.
(5) Mountainboard, snowkite.