Glissement de terrain au plateau d'Assy
Notice
Le plateau d'Assy vient de subir un glissement de terrain particulièrement meurtrier. 70 victimes sont à déplorer, notamment dans le sanatorium du Roc des Fiz. 350 sauveteurs ont œuvré pour trouver d'autres blessés. De son lit d'hôpital, une salariée du sanatorium raconte l'accident et son sauvetage.
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Éclairage
La catastrophe du plateau d'Assy, survenue le 5 avril 1970, résulte d'une coulée de boue qui a affecté un sanatorium pour enfants et provoqué la mort de 71 personnes. Cette catastrophe, intervenue sur la commune de Passy (proche de la ville du Fayet, connue pour son thermalisme), a suscité une très vive émotion. Le reportage, diffusé le 16 avril 1970 sur la 1ère chaîne de l'ORTF, effectué sur les lieux mêmes, avec une forte interpellation du public, vise à rendre compte de l'ampleur de la tragédie.
Que voit-on dans ce reportage ? Tout d'abord des sauveteurs ou, plus exactement, une armée de sauveteurs qui occupe le terrain de la catastrophe. Ils témoignent par leur présence de l'importance de l'élan de solidarité. Ils font ce qu'ils peuvent, même si, comme l'indique le journaliste, il n'y a plus grand chose à faire. C'est une impression d'impuissance qui se dégage de cette foule d'hommes qui, sans grand espoir, continuent à creuser, fouiller la masse de terre qui s'est déversée. On voit aussi – plus exactement on entend – un expert anonyme expliquant les raisons de ce désastre qui, dit-il, est à la fois inédit (ce n'est pas une avalanche) et imprévisible (il résulte d'une situation vraiment exceptionnelle). Enfin, une jeune fille survivante rend compte, sur un lit d'hôpital, de son expérience d'où, une nouvelle fois, ressort un sentiment d'impuissance. Les images qui suivent, muettes, ne font qu'en rajouter à propos d'une situation qui, telle qu'elle est présentée, est l'exemple même de la fatalité. Une « fatalité » dont on devine cependant les causes lorsque sont faits de larges plans du sanatorium et de l'important massif, situé juste au-dessus.
Mais que ne voit-on pas ? Tout d'abord des témoins, parfois victimes de l'événement, qui remettent en cause cette fatalité. Ce sont notamment des employés du sanatorium qui rappellent qu'un écoulement s'était déjà produit quelques jours auparavant, que des alertes ont été lancées (en raison de fissures dans le bâtiment) et que celles-ci n'ont pas été prises en compte par le responsable de l'établissement. De même, ne voit-on pas comment ce responsable se justifie et s'exonère de toute responsabilité, estimant qu'il avait pris les mesures adaptées à la situation et qu'il ne voulait pas susciter de craintes inutiles. Des interpellations publiques ont donc eu lieu à d'autres moments, alors que cette vidéo se concentre sur le caractère fatal de l'événement.
L'intérêt principal de cette archive télévisuelle est qu'elle montre un mode de traitement médiatique d'une catastrophe qui est sur le point d'être dépassé. Après la catastrophe du plateau d'Assy, mais également après celle du Val d'Isère qui s'est produite peu auparavant (avalanche survenue en février 1970 et ayant entraîné la mort de 39 jeunes, ensevelis), les experts ne pourront plus dire qu'un tel risque était imprévisible voire inimaginable. De même, les responsables ne pourront plus se contenter de dire qu'ils ont agi comme il leur semblait raisonnable de le faire. Quant aux victimes, elles n'apparaîtront plus seulement comme des personnes subissant des événements et auxquelles il faut porter secours. Elles deviendront des acteurs demandant des comptes, exigeant des réparations morales voire matérielles. C'est d'ailleurs à la suite de ces événements, ayant conduit à la mise en cause et à la condamnation de différentes autorités, que des politiques de prévention des risques naturels en montagne ont été véritablement engagées.