La CUMA
Notice
Des agriculteurs finistériens se sont réunis afin d'acheter en commun du matériel agricole. Les adhérents de la CUMA (coopérative d'utilisation du matériel agricole) de Saint Allare expliquent le fonctionnement et les avantages de ce groupement.
Éclairage
Qu'est ce qu'une CUMA ? L'acronyme cache une Coopérative d'Utilisation de Matériel Agricole en commun, organisation phare de l'agriculture de groupe si florissante en Bretagne dans les années 60-70.
En 1945, dans l'esprit de la reconstruction, l'Union Nationale des Cuma est créée. Les Cuma, qui doivent permettre l'obtention de matériel agricole - dont les tracteurs américains - se propagent alors très rapidement dans le pays (en 1949, 8000 Cuma et coopératives de battage et service). Toutefois ce mouvement semble très fragile, sans doute parce qu'il a été bâti dans l'urgence volontariste d'après-guerre, sans reposer sur l'engagement de la base agricole. Aussi un grand nombre de CUMA est-il dissout dès les années 50.
A partir de 1954, avec l'aide des pouvoirs publics, les Cuma vont se réorganiser sur de nouvelles bases. Une organisation fédérale se met en place : La FNCUMA qui est la tête du groupe. Peu après les FRCUMA sont créées et 84 fédérations départementales se partagent l'espace national en 1964. Ces dernières s'organisent, se structurent et embauchent progressivement des conseillers en machinisme, des animateurs, des comptables. Dans les années 70, l'organisation est fortement marquée par la volonté de laisser aux agriculteurs le pouvoir de décision, et par la méfiance face aux groupes ou aux coopératives capitalistes. La priorité est la mécanisation. Quel que soit le capital investi, chaque homme vaut une voix face à l'outil partagé et à la décision à prendre.
En 1966, il ne reste plus que 79 Cuma de la première vague mais 900 nouvelles ont été créées de 1957 à 1966. Leurs 12 000 adhérents représentent alors environ 7 à 8% des agriculteurs bretons. Le nombre de Cuma se stabilise à la fin des années 70.
Les années qui suivent vont être défavorables au mouvement CUMA pour de multiples raisons : l'augmentation de la production qui implique une relance de la mécanisation (gros tracteurs pour ensilage) devient l'objectif premier de tous les producteurs. Certains craignent alors que les Cuma ne puissent pas faire face aux besoins. Nombre de cumistes suppriment leur adhésion pour se tourner vers d'autres solutions : la co-propriété, l'entreprise de matériels agricoles etc... Toutefois, en Ille-et-Vilaine, le mouvement perdure mieux qu'ailleurs puisque l'on compte 209 Cuma en 1978, 237 en 2000 (6 000 cumistes). Cette résistance au temps, aux évolutions techniques et économiques est à mettre en rapport avec les formes de la modernisation souhaitées par les agriculteurs de l'Ouest.
Outre l'intérêt de montrer la vie d'une CUMA, au jour le jour, ces témoignages d'hommes et de femmes convaincus nous rappellent que le milieu agricole, souvent taxé d'individualisme, semble paradoxalement avoir beaucoup réfléchi aux configurations modernes de la solidarité et avoir été très loin dans la mise en application de leurs démarches.
Bibliographie :
- Denis Lefèvre, A l'ombre des machines, Les CUMA, 50 ans de solidarités locales, ed Entraid', 1996.
- Martine Cocaud, "Un cadre associatif pour l'innovation technique dans les campagnes bretonnes", ABPO, 2001, n°3.
- Martine Cocaud, "Un modèle de solidarité du monde agricole d'après-guerre : le mouvement des CUMA", Sociabilités et politique en milieu rural, 2007.