Un nouveau théâtre en milieu rural
Notice
La commune de Pont Scorff, dans le Morbihan, mise sur la culture afin de développer son économie. Le Strapontin, le théâtre municipal, vient d'être inaugurer. Plus qu'un théâtre, cet espace est un lieu de vie rassemblant musique, cinéma, théâtre.
Éclairage
Dans les années 1980, la culture devient un enjeu territorial. La nouvelle importance que lui donne le gouvernement Mitterrand, les lois de décentralisation permettent aux élus locaux de s'emparer de la question culturelle. Ils peuvent prendre plus d'initiatives, mais doivent aussi engager plus de moyens au service des arts et des équipements socioculturels. En un sens, la culture rentre dans le champ de la vie collective des territoires.
Dans un premier temps, cela est surtout vrai dans les métropoles : elles trouvent dans la culture un moyen d'affirmer une image, mais aussi de construire une attractivité pour leur ville. Pour le monde rural, la question est plus complexe. La culture ne représente pas un enjeu de prime abord. Même si quelques exemples isolés peuvent contredire la chronologie, comme par exemple avec le théâtre de poche à Hédé, c'est très récemment que l'on assiste à la mise en place d'un politique culturelle en milieu rural. C'est donc bien d'une action politique volontariste qu'il s'agit, et non d'un saupoudrage financier donné à quelques associations ou pour diffuser des spectacles.
On peut penser que cette action est liée à la prise en compte des mutations du monde rural des cinquante dernières années. D'abord, les activités économiques se sont diversifiées, l'agriculture n'est plus la seule ressource. Cela va de pair avec un changement de la population qui se traduit par une nouvelle donne sociologique. On parle de rurbanisation des campagnes. Ainsi, la culture est pensée comme un service, répondant à une nouvelle population, ayant des habitudes culturelles plus urbaines. C'est une "offre" que se doit de proposer le monde rural pour répondre à une nouvelle "demande". Les termes économiques d'offre et de demande sont employés ici à bon escient. Car pour les élus, il s'agit bien, avec la culture, de contribuer à une logique de développement.
A cet égard, les conseils prodigués par les experts culturel et rural sont très clairs. Dans leur ouvrage sur les politiques culturelles en milieu rural, messieurs Laffont-Grellety et Mazurier proposent que la culture soit partie prenante au développement économique des territoires ruraux. Le maire de Pont Scorff que l'on voit dans le reportage proposé conçoit lui aussi son nouvel équipement culturel comme une nouvelle dynamique pour sa ville située en zone rurale. La culture, qui doit également attirer de nouvelles populations, est pensée comme une valeur ajoutée sensée dynamiser, voire redynamiser l'économie locale en créant une attractivité. D'autre part, dans ces territoires où la culture institutionnalisée est rare jusque dans les années 1990, il est nécessaire de penser les équipements de manière globale, avec plusieurs entrées pour ne pas attirer qu'un seul type de public. Par exemple, à Pont Scorff, on imagine une salle de théâtre, mais aussi un musée de la découverte du saumon sauvage et des métiers d'art qui ancre la structure dans une démarche plus patrimoniale. L'équipement est aussi composé d'un cinéma. Pour créer du lien social, le lieu se doit d'être ouvert sur plusieurs activités. Le projet culturel doit s'inscrire de manière conforme au projet territorial et en adéquation avec ces atouts déjà existants. En résumé, on peut dire que l'arrivée de ces formes d'actions culturelles est possible à partir des années 1980-1990 grâce à trois changements majeurs dans le monde rural : un changement économique, un changement sociologique et démographique, enfin un changement institutionnel (les lois de décentralisation).