La baie d'Authie

18 novembre 2006
05m 13s
Réf. 00533

Notice

Résumé :

Escapade au sud de la baie d'Authie avec un groupe de touristes accompagné par Sébastien Roche de l'association Balade en Baie qui présente le massif dunaire, sa faune, sa flore. Une plante, la spartine, accélère le dépôt de sédiments dans la baie. Rencontre avec Hugues Retaux, guide animateur du littoral qui, avec Eden 62 et le Conservatoire du littoral, a la gestion du massif dunaire de la rive nord, victime de l'érosion qu'il s'agit d'enrayer pour le préserver.

Date de diffusion :
18 novembre 2006
Source :

Éclairage

Située à la limite entre la Somme et le Pas-de-Calais, la baie d'Authie est un des trois estuaires qui jalonnent la plaine maritime picarde (les deux autres étant la baie de Somme et l'estuaire de la Canche). Cet espace, d'une superficie totale de 3000 ha, est constitué d'un estran (espace recouvert à marée haute et découvert à marée basse) d'environ 2200 ha, de dunes et de marais poldérisés. Etant donné qu'elle n'a jamais connu de développement balnéaire et portuaire important, la baie d'Authie présente une mosaïque de milieux estuariens remarquables, bien que leur évolution soit influencée par des aménagements. Elle présente les éléments caractéristiques des estuaires de type "picard" avec un poulier, associé à un musoir, et des vasières.

On appelle "poulier" la flèche sableuse qui ferme le Sud de l'estuaire et tend à s'étirer vers le Nord, barrant l'embouchure du fleuve. Cette forme résulte du fait que le transport sédimentaire vers le Nord, le long de la côte, par la dérive littorale est freiné par les écoulements de l'Authie. Les sédiments tendent donc à se déposer au Sud du fleuve, dont la puissance est insuffisante pour les chasser. Le cours de l'Authie est ainsi dévié vers le Nord de l'estuaire. Cette zone nord, appelée "musoir", subit une forte érosion : le recul du massif dunaire est estimé à plus de 300 m entre 1947 et 1999 (1). Cette érosion s'accompagne d'un risque de submersion marine, notamment sur le territoire de la commune de Berck. Pour lutter contre ces menaces, des digues, des épis et des enrochements ont été mis en place.

Alors que le Nord-Ouest de la baie d'Authie est en érosion, les vasières, qui constituent la majeure partie de l'estuaire, s'épaississent par sédimentation. Deux principales unités physiques composent les vasières : la slikke et le schorre. La slikke est une étendue sablo-vaseuse, sans végétation, qui se développe en bordure du chenal du fleuve, dans les zones protégées de la houle. Elle est recouverte par chaque marée, ce qui n'est pas le cas du schorre (appelé "mollière" en Picardie ou "pré-salés") submergé lors des marées de vive-eau. Le schorre, totalement végétalisé, est traversé par des chenaux de marée qui prolongent la slikke. Etant donné que le courant de flot apporte plus de sédiments que le courant de jusant, plus lent, n'en n'évacue, l'estuaire se colmate progressivement, comme la baie de Somme. Cette évolution se traduit par le développement des mollières surtout au Sud de la baie d'Authie. Dans ce secteur, les mollières ont été successivement endiguées (par des "renclôtures"), du XIIe siècle à 1862, pour créer des polders. Le schorre s'est naturellement développé à partir de cette rive artificielle, à l'Est d'une flèche sableuse Sud-Nord qui a pris appui sur la digue. Par ailleurs, certains experts estiment que cette évolution serait accélérée par le développement de deux espèces de spartines sur la slikke, qui favoriseraient le dépôt des particules sédimentaires.

La mosaïque d'écosystèmes de la baie d'Authie se traduit par une richesse écologique. Les oiseaux viennent s'alimenter sur la slikke et s'abritent dans les mares (ou "pannes") qui ponctuent le schorre. Une flore remarquable (tel que l'orchis incarnat, par exemple) se développe dans ces zones humides, qui constituent généralement des étangs de chasse. Sur le schorre poussent également la salicorne et l'aster (appelée "oreille de cochon") recherchées par les pêcheurs à pied.

Dans l'objectif de préserver ces milieux physiques remarquables, la baie d'Authie est, avec une grande partie de la vallée fluviale, intégrée au réseau "Natura 2000". Elle est aussi au centre du Parc naturel marin des trois estuaires, incluant aussi les embouchures de la Canche et de la Somme, créé en décembre 2012.

(1) DOBRONIAK C. (1999), Les progrès de la sédimentation dans Un estuaire de type picard : l'estuaire de l'Authie (Nord-Pas-de-Calais), Méditerranée, 93, 4, p. 65-68 (www.persee.fr/web/revues/home/ prescript/article/medit_0025-8296_1999_num_93_4_3134)

Stéphane Desruelles