Marc Veyrat, le cuisinier-berger

05 octobre 1994
03m 19s
Réf. 00108

Notice

Résumé :

Marc Veyrat est un cuisinier-berger. Il a ouvert un restaurant à Veyrier-du-Lac en Haute-Savoie. Il y propose des plats élaborés avec des plantes qu'il va lui même cueillir dans la montagne à 2000 mètres d'altitude.

Date de diffusion :
05 octobre 1994
Source :
Antenne 2 (Collection: MIDI 2 )
Personnalité(s) :
Thèmes :

Éclairage

Marc Veyrat est un cas à part parmi les grands chefs français. Il n'a pas fait d'études dans une grande école de cuisine et n'est pas passé par l'apprentissage chez de grands chefs. Pour autant, celui dont le chapeau est devenu la marque – il explique son origine dans le reportage – se veut avant tout enfant de la Haute-Savoie et de Manigod, où il ouvre sa première auberge en 1978. Ce qui fait sa réputation c'est sa connaissance des qualités gustatives des plantes de ses montagnes natales où il a été berger aux côtés de son grand-père.

Cet adepte de la cuisine spontanée, qui se veut peu scientifique, n'est pas à une contradiction près. Il apparaît aussi comme un partisan de la cuisine moléculaire. Si son parcours n'est pas linéaire, il partage avec les tenants de ce que les critiques culinaires Gault et Millau ont qualifié de nouvelle cuisine une opposition radicale aux fonds préparés à l'avance qui servaient de base à la préparation des sauces. Il le dit d'ailleurs très clairement dans le reportage. Pour lui les bouillons de légumes, les infusions et les décoctions, sont à la base des sauces légères qui correspondent à la volonté d'avoir une grande cuisine fondée sur l'authenticité des produits qu'aucun artifice ne doit venir dénaturer.

De fait, Marc Veyrat est de plain-pied avec les principes que préconisent depuis les années 1970, les critiques culinaires et en particulier Gault et Millau. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard s'il obtient dans leur guide en 1989 la note prestigieuse de 19,5/20 et il obtiendra même 20/20 en 2003. Dans le même temps, il a obtenu sa première étoile Michelin en 1985, alors qu'il venait d'ouvrir son nouveau restaurant de l'Eridan à Veyrier-du-Lac, à côté d'Annecy. Il obtient la seconde en 1988 et la troisième en 1995, l'année où est diffusé ce reportage. Très créatif, passionné d'herbes des montagnes, des plantes aromatiques et des racines, associant tradition régionale et techniques modernes (il ose les cuissons à très basse température), audacieux et parfois iconoclaste, Marc Veyrat occupe une place à part parmi les acteurs de la gastronomie.

La grande cuisine française, de plus en plus médiatisée, objet de nombreuses émissions télévisées possède en Marc Veyrat ce que les journalistes appellent un « bon client », susceptible de retenir l'attention du spectateur par son côté anticonformiste, son sens de la provocation, sans oublier les accessoires indispensables à toute mise en scène comme le chapeau noir, véritable symbole de celui qui revendique avant tout son authenticité savoyarde au point de reconstituer dans son restaurant un chalet qui ouvre sur la cuisine.

Aujourd'hui, celui qui a développé le concept de « cuisine environnementale » s'est retiré et l'auberge de l'Eridan a été reprise par un de ses élèves .

Voir le site Art et gastronomie.

Jean-Luc Pinol

Transcription

Présentateur
Loin des voitures, si un jour vous vous arrêtez à l’auberge de L’Eridan, à Veyrier-du-Lac en Savoie, et bien vous rencontrerez là un très bon chef, il s’appelle Marc Veyrat. Sa spécialité à lui, ce sont les herbes et les plantes de la montagne qu’il va cueillir très régulièrement. Car avant d’être cuisinier, Marc Veyrat lui, était berger. Reportage Marie-Pierre Samitier, Frédéric Faure.
Journaliste
D’avril à septembre, Marc Veyrat se lève avec le soleil et monte à 2 000 mètres dans les alpages. Il part y cueillir les plantes dont il a besoin pour sa cuisine.
Marc Veyrat
Ah, ce serpolet, chez nous on l’appelle le pimpiolet.
Journaliste
Il y a donc le thym sauvage mais aussi la sauge et la chicorée. Toutes ces plantes dont il connaît par cœur les secrets depuis son enfance.
Marc Veyrat
Ah la racine de chicorée, exceptionnelle.
Journaliste
A quel âge vous avez commencé à garder des moutons ?
Marc Veyrat
Oh, j’avais 7 ou 8 ans. Vous savez, ce chapeau, ce chapeau c’est quelque part le patrimoine de ce que je peux préserver de la nature parce que lorsque je revenais de l’école, mon grand-père avait quelques fraises accrochées, avait quelques feuilles là qu’il est, et lorsque j’arrivais de l’école, je me jetais dans les bras de mon grand-père qui gardait les chèvres et les moutons et je mangeais les fraises des bois. Il ne manque que les fraises des bois là, on les a là-bas.
Journaliste
Et aujourd’hui, vous êtes un berger ou vous êtes un chef ?
Marc Veyrat
Je suis toujours un chef berger. Incroyable, tout ce tas d’origan, c’est exceptionnel. Un peu d’origan et d'achillée...
Journaliste
Et l’ancien berger du village de Manigod, là haut dans la montagne des Aravis, reçoit à sa table les hommes politiques les plus éminents, les chefs d’entreprises les plus prestigieux. Il a même reçu la consécration, 19 et demi au Gault Millau, et deux étoiles au Michelin pour des menus qui vont de 300 francs à 1 000 francs, avec quelques mondanités sans supplément.
(Musique)
Marc Veyrat
Voilà, bon appétit.
Inconnus
Merci.
Journaliste
Est-ce que votre cuisine est une cuisine scientifique ?
Marc Veyrat
Je veux surtout pas qu’elle soit scientifique. Elle est tout sauf scientifique. Elle est, elle est absolument spontanée, naturelle, puisque vous savez, tout est là hein, les plantes sont là. C’est très simple, on évite les fonds de veau, les cumins, on les remplace par des bouillons de légume simplement parce que la plante a du mal à absorber les fonds, elle absorbe plus facilement les bouillons de légume. C’est un peu le principe de la tisane que l’on prend le soir avant d’aller au lit.
Journaliste
Tisane, vous avez dit tisane. Est-ce que ça ne vous rappelle pas quelqu’un la tisane. Et vous ne trouvez pas que vous nous la faites un peu à la Rika Zaraï là ?
Marc Veyrat
Ne me parlez pas de Show Biz vous hein, s’il vous plaît.
Journaliste
Le Show Biz, Marc Veyrat en est encore loin pour l’instant. D’ailleurs au cœur de son superbe hôtel restaurant de luxe, il s’est construit un petit chalet authentique situé, tenez-vous bien au fond des cuisines. Au rez-de chaussée. C’est son jardin secret, comme ça il reste l’authentique berger de Manigod.
Marc Veyrat
J’ai toujours dit que Manigod et la Haute-Savoie c’était le plus beau pays du monde. Mais il faut le dire en chantant.
(Musique)
Marc Veyrat
[Incompris]
Présentateur
Et si vous voulez en savoir plus sur Marc Veyrat et ses plantes, et bien vous pouvez lire son livre chez Hachette Fou de Saveurs .