Voyage en Seine-et-Marne

17 juin 1965
12m 43s
Réf. 00246

Notice

Résumé :

En visite en Seine-et-Marne, le général de Gaulle est accueilli par les élus locaux des différentes villes et prononce des discours dans lesquels il met en avant la place de la France en Europe et dans le monde.

Type de média :
Date de diffusion :
17 juin 1965

Éclairage

À partir de février 1959, le général de Gaulle réalise un gigantesque voyage qui le conduit d'un bout à l'autre de la métropole, dans toutes les provinces, dans toutes les régions. C'est pour lui l'occasion de créer un contact direct avec les Français, de " récolter des moissons d'impressions et de précisions pratiques " sur les grandes questions de l'heure. Du 16 au 20 juin 1965, le général de Gaulle entreprend son vingt-quatrième et tout dernier voyage dans les départements de la Seine-et-Oise, de la Seine-et-Marne et de l'Eure-et-Loir : son tour de France est bouclé.

Le reportage retrace la journée du 17 juin 1965, où le général de Gaulle arpente la Seine-et-Marne en compagnie de Louis Joxe (ministre chargé de la Réforme administrative), Roger Frey (ministre de l'Intérieur) et Marc Jacquet (ministre des Travaux publics et des Transports). Après s'être arrêté à Champs, Chelles, Meaux, Coulommiers, et après de rapides haltes dans un grand nombre de villages, le président arrive à Provins, dont le maire n'est autre qu'Alain Peyrefitte, le ministre de l'Information, qui contrôle alors la télévision française. À la tribune installée sur la place Saint Ayoul, le président s'adresse aux Palois. Six mois avant la première élection présidentielle au suffrage universel, et tandis qu'il se refuse toujours à déclarer ou non sa candidature, le général de Gaulle évoque le parcours qui l'a entraîné, depuis " vingt-cinq ans ", depuis l'Appel du 18 juin 1940, à assumer le destin de la France.

Poursuivant son périple à travers la Seine-et-Marne, il se rend à Montereau, Nemours, Fontainebleau (où il dépose une gerbe sur le monument commémoratif du site où a été abattu le Résistant Georges Mandel en 1944) pour achever sa journée à Melun, où, de nouveau, il prend la parole pour parler cette fois-ci du rôle de la France dans le monde. Il rappelle son aspiration à construire une Europe " de l'Atlantique à l'Oural ", qui associerait les États démocratiques et les satellites de l'URSS, et permettrait au vieux continent de se dresser face aux deux blocs dominant alors le monde.

La diffusion de ce reportage sur les antennes de l'ORTF, le soir même, est essentielle aux yeux du général de Gaulle : elle donne à voir et à ressentir la communion et l'unité entre les Français et leur président : "Au total, il se produit autour de moi, d'un bout à l'autre du territoire, une éclatante démonstration du sentiment national qui [. . .] apparaît ensuite partout grâce à la télévision." (Mémoires d'Espoir - Le Renouveau).

Aude Vassallo

Transcription

(Musique)
Présentateur
C'est au Château de Champs, où il est arrivé par hélicoptère et où il était attendu par le Préfet Monsieur Jean Verdier, que le Général de Gaulle a commencé ce matin cette deuxième journée de son vingt-troisième et dernier voyage en province. C'était hier la Seine-et-Oise, aujourd'hui la Seine-et-Marne, en compagnie de quatre ministres, Messieurs Joxe, Frey, Peyrefitte et Marc Jacquet. Et tout d'abord Chelles, dont le député-maire est Monsieur Rabourdin, Chelles où le Chef de l'Etat devait déposer une gerbe devant la plaque commémorant le martyr de treize résistants fusillés en 1944 et dont Monsieur Moussa Ben Abbes, gardien du parc, que vous allez voir, fut l'unique rescapé. Le Général de Gaulle remerciait pour les cadeaux, avant de serrer les mains et de prendre la route par de charmantes localités. Un arrêt surprise à l'entrée de Meaux, le Général était entouré par une foule enthousiaste, et c'était enfin Meaux. Meaux, sous-préfecture, où le maire Monsieur Bouvin, présentait son conseil municipal, et les personnalités, avant que le président de la République prononce sa première allocution de la journée. Beaucoup de monde à Meaux, et le chef de l'Etat, avant de reprendre la route, allait vers la foule qui l'acclamait. Premier arrêt après Meaux, la petite ville de Quincy Voisins, où un accueil sympathique et particulier attendait le chef de l'Etat. C'est la fanfare des Aiglons, de l'Ecole de sauvegarde de l'enfance qui se trouve dans le château de Quincy Voisins. Ces jeunes enfants en tenue de Grognards de l'époque du premier empire, jouant fifres et battant tambours. Accueil sympathique par conséquent, le Général de Gaulle devait s'intéresser précisément à cette école de Quincy Voisins avant de reprendre la route cette fois-ci pour Coulommiers. Mais un petit arrêt à Pont-aux-Dames. Pont-aux-Dames, vous le savez, c'est là que se situe la maison de retraite des vieux comédiens, et c'étaient des vieilles comédiennes qui avaient accueilli le Général de Gaulle. Et au son des cloches, sonnant à toute volée, c'était l'accueil à Coulommiers, qui vous le savez, était renommée et est toujours renommée par une qualité de fromage, mais dont le maire devait dire, le maire Monsieur Tourneur devait dire que maintenant Coulommiers s'orientait vers l'industrie et l'économie, très active. Il faisait beau comme depuis le matin, et la foule était nombreuse à Coulommiers comme elle l'avait été depuis le départ de Champs. Toujours par ces routes de Seine-et-Oise extrêmement sympathiques, c'était enfin l'arrivée à Provins, Provins une ville illustre à plus d'un titre, Provins qui fait penser à la fois à Carcassonne et au Mont Saint-Michel. Provins avec ses remparts et ses tours césar, Provins où un membre du gouvernement attendait le chef de l'Etat. Ce membre du gouvernement, vous l'avez reconnu, c'est Monsieur Alain Peyrefitte, ministre de l'information, maire de Provins. Et c'est en sa compagnie que le Général de Gaulle devait traverser la ville où s'était massée une foule innombrable jusque sur la Place Saint Ayoul, où le président de la République devait prononcer l'allocution de fin de matinée dans cette sous-préfecture. Là, le Général de Gaulle allait évoquer de nouveau les grands problèmes, il allait parler notamment du rôle de la France et de sa place retrouvée au sein des grandes nations, et il devait dire combien il fallait poursuivre cet effort.
Charles de Gaulle
Il faut poursuivre dans cette voie. Et pour poursuivre, il est bien certain que nous devons apparaître au monde comme un Etat solide, conduisant un peuple rassemblé. Demain, il y aura vingt-cinq ans, mes chers compatriotes de province, vingt-cinq ans que les événements m'ont, si je puis le dire, désigné pour porter la charge et la responsabilité - je vous prie de le croire, qu'elles furent souvent et qu'elles sont encore lourdes - la charge et la responsablité de représenter la souveraineté nationale, et toutes les fois qu'il le fallait, d'assurer le destin du pays. Depuis vingt-cinq ans, je n'ai jamais pensé, voulu, dit, fait autre chose que ce qu'aujourd'hui je dis, je fais et je veux. Je suis profondément ému et heureux d'avoir trouvé aujourd'hui à Provins cette adhésion, Ce témoignage qui encore une fois comme je vous le disais au début, me vont au coeur, qui me sont un réconfort précieux, et que j'emporterai comme un élément de résolution pour la suite. Vive Provins, vive la République, vive la France. Monsieur le maire, c'est une très belle assemblée !
Présentateur
C'est sur cette remarque applaudie par la population que s'achevait le discours du Général de Gaulle, avant qu'il ne gagne à pieds l'Hôtel de Ville depuis la Place Saint Ayoul où s'était prononcée cette allocution. Mais Provins, vous le savez, est non seulement une ville d'art et d'histoire, mais c'est aussi une ville de la rose. Et elle s'enorgueillit de ce titre. D'ailleurs, c'est sous ce signe que nous avons terminé la matinée.
Petite fille de Provins
Madame, nous vous offrons cette broche qui représente une rose, et ces bouquets de roses nouvelles qui s'appellent « renouveaux de Provins », pour témoigner de notre reconnaissance et de notre affection.
Présentateur
Et c'est sur cette note que nous allions quitter Provins en début d'après-midi, après un déjeuner à la sous-préfecture, pour gagner cette fois-ci par d'autres arrêts encore, Montereau. Mais cet arrêt, le premier, est à Gurcy le Chatel, où se trouve L'Ecole Nationale des Métiers, celle de l'EDF. Et on offrait là les premières fraises de la région, au Président de la République. Les jeunes étaient en tenue sportive, ils étaient venus applaudir le chef de l'Etat. Et nous arrivions à Montereau, cette ville en pleine expansion, la ville des bateliers aussi qui l'accueillaient au son des trompes de leurs péniches. Le député-maire, Monsieur [Pezot] était là, ainsi que la [madelon] des bateliers et le Général de Gaulle allait recevoir un cadeau. La Collégiale, si célèbre, et c'est dans cette atmosphère de sympathie et de chaleur que le Général de Gaulle allait quitter quelques instants plus tard la ville de Montereau, une ville en pleine expansion. A Nemours, cité appelée à un futur de grand avenir, le Général de Gaulle était accueilli par Monsieur Dailly, sénateur-maire, après l'allocution, il serrait quelques-unes des nombreuses mains tendues. Dans la forêt de Fontainebleau, devant le monument dressé là où fut assassiné Georges Mandel par la milice en 1944, le Général de Gaulle déposait une gerbe. Ensuite, face à l'obélisque, les cavaliers de Fontainebleau faisaient une haie d'honneur au chef de l'Etat et c'était enfin la ville de Fontainebleau où le Président de la République était accueilli là par Monsieur Sérami, député-maire. Beaucoup de monde vous le voyez sur cette place qui porte le nom du Général de Gaulle, le chef de L'Etat saluait les représentants de l'Etat-Major Centre-Europe de Fontainebleau, avant de prononcer face au château une allocution. Enfin Melun, la préfecture. Beaucoup de soleil, beaucoup de monde sur le parcours pour attendre le Général de Gaulle qui, debout dans son automobile, saluait la foule. Après avoir reçu les honneurs militaires et passé les troupes en revue, le Général de Gaulle était accueilli par Monsieur Petit, maire de Melun. Il devait dans une dernière allocution de la journée évoquer une nouvelle fois les grands problèmes de l'heure, notamment les grands problèmes internationaux.
Charles de Gaulle
Il y a l'Europe occidentale, c'est-à-dire nos Etats, qui ont retrouvé leur réalité politique, leur capacité économique, et qui tendent à se réunir, à coopérer, de manière à faire un ensemble qui puisse progresser, agir, et au besoin se défendre par lui-même. Et puis à l'Est, il y a les Etats de l'Europe orientale, soumis au régime que j'ai dit, mais qui sont en train d'évoluer à l'intérieur d'eux-mêmes peu à peu, parce que c'est toujours l'homme qui finit par l'emporter, et que l'homme c'est la liberté, la dignité, la fraternité. Alors au fur et à mesure que ce double mouvement se produit à l'ouest de l'Europe et à l'est, on peut envisager le jour où depuis l'Atlantique jusqu'à l'Oural notre ancien continent redeviendra dans l'équilibre et dans la coopération ce qu'il fut de tout temps, je veux dire l'élément principal, l'élément capital de la civilisation. Ailleurs, il y a tous les autres peuples. Les uns grands, les autres petits, en Asie, en Afrique, en Orient, en Amérique Latine, qui s'efforcent de se doter d'Etats solides, de bonnes administrations, de cadres valables, pour vivre et aussi pour se développer, Eh bien, vous comprenez que ce monde entier en pleine transformation, ce monde qui tend à retrouver autre chose que ce qui est aujourd'hui, qui tend en un mot à retrouver la paix, ce monde là a besoin de la France. La France a son rôle à y jouer, parce qu'elle est la France, et que de tout temps, sa vocation l'a conduite à servir la liberté, l'équilibre et la paix. Aujourd'hui il en est de même, et à mesure qu'elle le fait, je vous assure qu'elle n'en est que plus écoutée, plus entourée et plus considérée.