Message à l'Assemblée nationale du 11 décembre 1962
Notice
Message du président de la République Charles de Gaulle, lu à l'Assemblée nationale nouvellement élue, par le Président de l'Assemblée, Jacques Chaban-Delmas.
- Politique extérieure > Construction européenne > Traité de Rome
- Politique extérieure > Relations internationales > Guerre froide > Relations Est-Ouest
- Politique extérieure > Relations internationales > Organisation internationale > OTAN
- Politique intérieure > Economie > Vie économique > Croissance > Progrès économique et social
- Politique intérieure > Vie politique > Institutions > Constitution > Constitution de 1958
- Politique intérieure > Vie politique > Institutions > Parlement > Assemblée nationale
Éclairage
Depuis la conclusion en mars 1962 de la paix en Algérie et l'accession de l'Algérie à l'indépendance le 3 juillet, une page de l'histoire de la Vème République est tournée. De Gaulle n'ignore pas que, la guerre d'Algérie terminée, les forces politiques sont décidées à le chasser du pouvoir pour restaurer la toute-puissance du Parlement. Au cours des mois de juin et juillet, l'alliance de fait entre une gauche hostile au régime de la Vème République et une droite au sein de laquelle les nostalgiques de l'Algérie française ont un poids considérable prive virtuellement de majorité le gouvernement formé au printemps par Georges Pompidou. Aussi de Gaulle est-il résolu à reprendre l'initiative. Il y est poussé par un attentat de l'OAS dirigé contre lui le 22 août 1962 au Petit-Clamart, au cours duquel il échappe de justesse à la mort. Après le Conseil des ministres du 29 août, le Général annonce son intention de proposer une révision constitutionnelle pour assurer la continuité de l'Etat et on apprend le 12 septembre qu'il s'agit de proposer un référendum disposant que le Chef de l'Etat sera désormais élu au suffrage universel, ce qui provoque un tollé de toutes les formations politiques à l'exception des mouvements gaullistes. A la rentrée parlementaire, celles-ci adoptent une motion de censure contre le gouvernement Pompidou, constitutionnellement responsable d'avoir proposé la révision. Après en avoir pris acte, le Général annonce son intention de dissoudre l'Assemblée nationale (un décret du 10 octobre prononcera cette dissolution) et décide de maintenir en fonctions le gouvernement jusqu'à la réunion d'une nouvelle Assemblée nationale qui sera élue les 18 et 25 novembre. Aussitôt, les partis qui ont déposé la motion de censure constituent un " Cartel des non " manifestant ainsi leur intention de gouverner ensemble si le référendum était négatif. C'est l'épreuve de force entre de Gaulle et les partis, attendue de longue date.
Or le Général l'emporte sur toute la ligne. Le 28 octobre, 61,75% des électeurs approuvent la révision portant élection du président de la République au suffrage universel contre 38,25% qui la rejettent. Ce résultat acquis s'ouvre la campagne pour les élections législatives des 18-25 novembre. Les partis du "Cartel des non" sont nettement battus, alors que le parti gaulliste, l'UNR (Union pour la Nouvelle République) et ses alliés Républicains-Indépendants, conduits par Valéry Giscard d'Estaing remportent la majorité absolue des sièges.
A l'ouverture de la session de l'Assemblée nationale nouvellement élue, son président Jacques Chaban-Delmas lit aux députés un message du président de la République, auquel la Constitution interdit de paraître en personne devant le Parlement. Le message du général de Gaulle prend acte du résultat des consultations électorales de l'automne au cours desquelles le suffrage universel a solennellement confirmé les institutions de 1958 et surtout la lecture qu'en fait le Chef de l'Etat. En conséquence, il fixe comme objectif à l'action politique le progrès dans tous les domaines de politique intérieure, progrès qui doit résulter de la libre délibération, ce qui exclut, affirme-t-il, toute idée de parti unique, avertissement aux tentations éventuelles de l'UNR d'abuser de sa victoire. Sur le plan extérieur, il souligne l'appartenance de la France au camp des démocraties libérales. Mais il entend qu'elle dispose à l'intérieur de l'alliance atlantique d'une puissance militaire moderne, c'est-à-dire fondée sur l'arme nucléaire.
Il souhaite que l'Europe dépasse le stade économique du Marché commun pour se diriger vers une union politique. Enfin, considérant que le grand problème de l'époque est l'accession de tous les peuples à la civilisation moderne, il cite en exemple les liens de coopération établis entre la France et les Etats d'Afrique, Algérie comprise.
Message qu'il faut comprendre comme un véritable programme de gouvernement qu'il invite les députés nouvellement élus à soutenir de leurs votes.