Appel à l'union du peuple français au soir de Noël

24 décembre 1943
03m 06s
Réf. 00310

Notice

Résumé :

Le soir de Noël 1943, le général de Gaulle s'adresse à tous les Français en les appelant à l'union contre l'ennemi et ses collaborateurs - "les quelques traîtres qui le servent" - afin de participer à l'effort final pour la victoire. Il exalte le courage et le sacrifice de celles et ceux qui luttent pour la France sur le champ de bataille ou dans la clandestinité. Par-delà les "divergences" et les "partis", il proclame plus vivante que jamais la fraternité de coeur qui unit les Françaises et les Français entre eux comme elle les unit aux alliés de la France.

Type de média :
Date de diffusion :
24 décembre 1943
Type de parole :

Éclairage

Le 31 mai 1943, le général de Gaulle arrive à Alger. Le 3 juin, le Comité français de la libération nationale (CFLN) y est créé sous la co-présidence des généraux de Gaulle et Giraud. Le 26 août, le CFLN est reconnu par l'Angleterre, les Etats-Unis et l'URSS. Le 3 novembre, l'Assemblée consultative provisoire tient sa séance inaugurale à Alger ; elle compte 87 membres dont 40 issus de la Résistance intérieure ; le 19 décembre, elle sera élargie à 103 membres dont 49 issus de la Résistance intérieure. Le 6 novembre, le CFLN est remanié ; de Gaulle en demeure le seul président et une séparation nette entre commandement militaire et pouvoir politique est entérinée ; des représentants des principales tendances politiques et des mouvements de résistance font leur entrée au Comité. Le 21 novembre, les premiers éléments du corps expéditionnaire français débarquent en Italie pour combattre aux côtés des forces anglo-saxonnes. En d'autres termes, à la fin de l'année 1943, le général de Gaulle préside un gouvernement provisoire de fait. Celui-ci est adossé à un organe consultatif de nature parlementaire et dispose d'une administration, d'une police et de forces armées en état de faire la guerre. Le chemin parcouru depuis le 18 juin 1940 est considérable. Il reste, et c'est essentiel, à faire en sorte de participer à la libération du territoire métropolitain, à préparer les réformes qui permettront de relever la France après la victoire, et, peut-être plus encore, à rapetasser un tissu national mis à rude épreuve depuis près de quatre années.

Guillaume Piketty

Transcription

Charles de Gaulle
Devant l'étoile de la victoire qui brille maintenant à l'horizon, Français, Françaises, unissons-nous pour les efforts suprêmes et pour les suprêmes douleurs de l'ennemi, de l'ennemi qui recule, l'ennemi dont la nation ne sépare pas les quelques traîtres qui le servent. Voilà qui nous devons maudire, attaquer, détruire. Mais ce soir, ce soir de Noël, que chacun de nous pense aux autres Français et aux autres Françaises qui, comme lui, souffrent pour la France, luttent pour la France, espèrent en la France. Qu'il y pense amicalement, frater(...) chacun de nous porte son âme vers nos soldats, nos marins, nos aviateurs aux prises avec l'Allemand sur le sol d'Italie, sur toutes les mers du monde, dans le ciel de Méditerranée, de Russie, d'Angleterre ou qui s'apprêtent à gagner, à leur tour, les champs de bataille vers nos combattants de France qui luttent comme ils peuvent, tant qu'ils peuvent, sous le joug ennemi. Et ces collaborateurs, vers nos garçons prisonniers et déportés qui se rongent de fureur là où l'Allemand les détient. Que chacun de nous lève son coeur vers nos jeunes gens, nos jeunes filles humiliés, nos petits-enfants malheureux, vers les mamans françaises. Que l'angoisse n'étouffe pas ces soldats, ces combattants, ces jeunes et ces vieux. Tous, ils sont notre peuple, le fier, le brave, le grand peuple français dont nous sommes. Qu'importent, dans le drame présent, nos divergences et nos partis. Estimons-nous. Aidons-nous. Aimons-nous. D'abord, nous le méritons. Et puis, pour refaire ensemble la chère grande et libre France, il nous faut, oui, il nous faut marcher la main dans la main. Que chacun de nous, enfin, adresse, en lui-même, ses souhaits ardents de Noël à nos vaillants alliés, à ces millions et ces millions d'hommes et de femmes qui, dans le monde, combattent, résistent, travaillent comme nous, avec nous, pour la même victoire que nous ! Ce soir de Noël, les mêmes voeux montent en même temps du coeur de tous les Français. Comme nous découvrons bien dans notre épreuve commune et dans notre effort assemblé que nous sommes frères des coeurs. Oui, tous et toutes, pareillement, les fils et les filles de la France !