Les Arts Sauts, Kayassine

27 décembre 1998
02m 30s
Réf. 00553

Notice

Résumé :

Sous une bulle gonflée d'air, le public prend place sur des transats pour assister à l'envolée des Arts Sauts qui présentent Kayassine, au Parc de la Villette. Stéphane Ricordel, Fabrice Champion et Florence de Magalhaes abordent les questions du rapport à la musique, à l'exploit et l'originalité de la démarche.

Date de diffusion :
27 décembre 1998
Source :
FR3 (Collection: 19/20 )
Compagnie :

Éclairage

En 1993, dix trapézistes, dont une femme, formés dans des écoles différentes, se regroupent autour de Stéphane Ricordel pour fonder "Les Arts Sauts". Certains d'entre eux s'étaient croisés sur les pistes, notamment autour du « Camion trapèze » [1] présent dans Métal Clown et DJ d'Archaos. Leur objectif est de construire une démarche artistique centrée sur leur spécialité, le trapèze volant. Ils déclarent vouloir « voler comme on nage, comme on respire, comme on aime... se laisser porter par les ailes du désir » [2].

Au-delà de l'engagement artistique, pour assurer leur indépendance économique, ils investissent collectivement dans leur premier portant aérien, structure autonome utilisable en extérieur, puis dans leur chapiteau, concentré de technologie. Elaborée par l'architecte Hans Walter Müller cette structure autoportante, en forme de bulle de 40 m. de diamètre et de 20 m. de hauteur, est constituée d'une double paroi stabilisée par de l'air pulsé. Kayassine se joue en deux temps, qui définissent, selon Hervé Lelardoux, metteur en scène, « deux espaces en un. Au début, on est sous terre, dans une caverne, un lieu de nulle part, à la fois vide et à l'écoute du monde. Ce n'est qu'ensuite que l'on s'élève vers la voûte céleste » [3]. Les spectateurs, allongés dans des transats, répartis de part et d'autre des agrès du pont de volant, sont invités au rêve.

Les Arts Sauts (1994), Kayassine (1998), Ola Kala (2004) et son dispositif en croix, concrétisent l'originalité des Arts Sauts qui se manifeste dans la complexité des enchaînements. Fabrice Champion explique : « Un passage traditionnel pour un voltigeur jusqu'au porteur dure un peu plus de dix secondes, c'est le temps incompressible du ballant : tu t'élances de la plate forme, tu fais deux ballants, tu fais ta figure, le porteur te rattrape, c'est dix secondes. Nous, grâce aux trois porteurs par voltigeur, on arrivait à étirer ce temps à presque une minute » [4]. Les changements de niveau, les croisements possibles entre voltigeurs, les alternances de rythmes structurent la dramaturgie globale. Selon Marc Moreigne « ils ont su créer à travers les lumières et la scénographie, le chant, la musique et l'architecture de la représentation, un véritable écrin à la voltige aérienne, qui a permis de la voir comme on ne l'avait encore jamais vue. » [5] C'est en construisant « des tableaux, des couleurs qui agissent directement sur l'imaginaire du spectateur » [6], que Les Arts Sauts veulent dépasser la stricte évocation de l'envol et de son corollaire la chute liés à leur technique. Refusant tout esthétisme, Fabrice Champion désire qu'il y ait « un équilibre entre l'image et la réalité de ce que l'on fait » [7], autrement dit que s'affirme la matérialité des corps propre à rendre l'exploit humain.

Après avoir acquis une reconnaissance internationale, Les Arts Sauts mettent fin à leurs envolées en 2007. Ils ont réussi à suggérer la possible transgression de l'interdit de vol avec lequel l'homme doit composer.

[1] Le « Camion trapèze » a été conçu par Ernest Clennell, chef des ateliers du CNAC – qui permet à ses élèves de produire leurs premiers agrès – puisque quatre des membres fondateurs de la compagnie sont issus de la 3e Promotion.

[2] Cet extrait est mentionné en exergue du dossier de presse de Kayassine.

[3] Hervé Lelardoux est cité par Véronique Cohen, dans « Sous les trapèzes exactement », Paris, La Scène, 2 novembre 1998, p. 12.

[4] Fabrice Champion, dans Marc Moreigne, Les Arts Sauts, Paris, Actes Sud/CNAC, 2010, p. 51.

[5] Marc Moreigne, Op. cit., p. 13.

[6] Florence de Magalhaes, « L'angoisse est fondamentale dans le trapèze », propos recueillis par Marc Moreigne, dans Jean-Claude LALLIAS (dir.), Le Cirque contemporain, la piste et la scène, Paris, Théâtre Aujourd'hui, n° 7, Centre National de Documentation Pédagogique (CNDP), 4e trimestre 1998, p. 92.

[7] Fabrice Champion, « L'angoisse est fondamentale dans le trapèze », Op. cit., p. 93.

Martine Maleval

Transcription

Présentateur
Eux volent, et c’est un sacré spectacle que nous proposent ces voltigeurs de la troupe d’acrobates des Arts Sauts. Ils ont planté leur chapiteau au parc de la Villette à Paris, et c’est une vingtaine de mètres au-dessus de leur public qu’ils volent d’un trapèze à l’autre. Ce sont les dernières images de ce journal, et ça vaut le coup d'oeil. Dominique Poncet, Jean-Pierre Heckmann.
Journaliste
Ils sont plutôt rigolos ces Arts Sauts. Pour rentrer sous leur immense bulle blanche, ils nous obligent d’abord à nous glisser entre des boudins gonflés d’air. Ensuite, il nous font nous installer sur des transats munis d’une couverture. Ça, c’est très malin, parce que comme cela, on a tout de suite le nez au ciel. On n’aura donc pas à se dévisser le clou pour assister à leur spectacle. Un spectacle qui nous transporte sur d’étranges mélopées très loin là-haut, comme dans les étoiles.
Stéphane Ricordel
La musique nous porte, nous fait voler, nous fait vibrer, au même titre que nous on fait vibrer ou voler la musique également. C’est vraiment un truc qui se passe entre eux et nous. Ce n’est pas une musique qui a été calquée sur un numéro de trapèze. Ce n’est pas un numéro de trapèze qui a été fait pour une musique. C’est vraiment une symbiose des eux, c’est un travail commun.
(Musique)
Fabrice
On va essayer de faire un spectacle où l’exploit passait un peu comme base, mais qu’on puisse apporter aussi d’autres dimensions.
Laurence (de) Magalhaes
On fait partie de ce lot de spectacles un peu original qui sont à la fois, on y retrouve de la technique mais aussi de l’humour ; on trouve de la poésie, de la magie, on trouve un peu de tout. Cette bulle, c’est quand même particulier. On rentre dans un univers étrange. Une assise publique qui est vraie, qui est intéressante pour les gens. Là, les gens sont vraiment ancrés dans le sol et voient un spectacle en l’air et rêve, on l’espère.
(Musique)
Inconnue
C’était génial.
Inconnu 1
C’était très beau.
Journaliste
Ça t’a impressionné ?
Inconnu 1
Oui, assez.
Inconnu 2
C’est un spectacle extrêmement original. Je conseille vraiment tout le monde de venir voir et écouter.
Journaliste
Ils sont 12 à nous offrir cet étrange et fascinant ballet de l’espace. Une chanteuse, un violoncelliste, et 10 acrobates qui volent comme des oiseaux.
(Bruit)