Ilka Schönbein, Métamorphoses
Notice
Invitée sur le plateau de Frédéric Mitterrand, fin 1997, Ilka Schönbein, marionnettiste allemande jouant depuis des années seule dans la rue, interprète un extrait du spectacle Métamorphoses qui vient de la faire découvrir en France et la propulsera sur le devant de la scène contemporaine. Accompagné d'un chant lyrique yiddish au piano, un personnage féminin, naïf et sans âge, découvre l'enfantement et l'amour maternel.
Éclairage
Ilka Schönbein s'initie à la gestuelle eurythmique, fondée sur l'alliance entre l'esprit et le corps, dans une des écoles du spiritualiste Rudolf Steiner à Hambourg. Parallèlement, elle apprend pendant deux ans la manipulation et la construction de marionnettes à fils avec le célèbre Albrecht Roser. Après avoir participé une dizaine d'années à diverses petites compagnies allemandes, elle choisit de sillonner les routes d'Europe dans un minibus aménagé et de toucher tous les publics, dans la rue. Elle crée alors, et affine pendant des années, la tragédie burlesque Métamorphoses, dans laquelle son personnage apparaît comme une fragile mendiante dont les partenaires émergent d'un vieux landau, d'une carcasse de parapluie ou de son propre corps. Chaque figure est intimement liée à ses mouvements et engendrée par la virtuosité d'une manipulatrice tantôt sujet tantôt objet. En 1994, le jury du festival Mimos, de Périgueux, rejoint l'enthousiasme des spectateurs en lui décernant le grand prix de la critique alors qu'elle ne fait pas partie de la sélection et joue dans le off. A partir de là, Ilka Schönbein travaille beaucoup en France. Profondément marquée par le souvenir de l'holocauste, elle a donné en 1992 à sa compagnie le nom yiddish de théâtre Meschugge, c'est à dire fou. Par la suite, le spectacle Métamorphoses sera parfois montré en salle, ou inclura momentanément un autre interprète, masculin ou féminin.
L'artiste est inclassable par sa technique – elle manipule avec ses mains, ses pieds, sa tête ou ses fesses - et par ses fonctions – elle est actrice, mime, danseuse, marionnettiste, auteur, créatrice de masques et de costumes. En 1998, elle se tourne vers les enfants et monte Le Roi grenouille, d'après La Princesse et le crapaud des frères Grimm. Malgré son succès, Ilka Schönbein ne considère jamais un spectacle comme achevé. Métamorphoses, devenu Métamorphoses des Métamorphoses, a ainsi connu cinq versions. Elle présente, en 2005, la troisième version du Roi grenouille et refaçonne Le Voyage d'hiver, créé en 2003. Sur un livret de Wilhem Müller, les vingt-quatre étapes de ce Voyage, composé par Franz Schubert, peignent le trouble amoureux dans toute son intensité, de l'extase au désespoir, à travers les compositions prodigieuses d'une marionnettiste qui, au-delà de toute pudeur et à travers de multiples masques, donne rendez-vous avec la violence de l'existence humaine.
En 2006, Chair de ma Chair s'inspire du roman Pourquoi l'enfant cuisait dans la Polenta d'Aglaja Veteranyi. C'est le récit désespéré et poétique d'une enfant de cirque, qui convoque à la fois les rapports mère - enfant, la douleur de la perte, la solitude, l'adversité, le nomadisme, et le déracinement.
Pour La Vieille et la bête, en 2010, Ilka Schönbein crée un univers toujours confondant où l'humain et l'animalité s'entremêlent dans quatre contes populaires où rôdent la vieillesse et la mort mais, pour rendre cet hommage à son père qui vient de disparaître, l'artiste s'adjoint en contrepoint la malicieuse multi-instrumentiste Alexandra Lupidi tel un Monsieur Loyal tout de fantaisie.