Jeanne Mordoj, L'éloge du poil

2007
03m 51s
Réf. 00520

Notice

Résumé :

Deux extraits du spectacle L'éloge du poil : le dialogue que Jeanne Mordoj fait tenir à un crâne de blaireau et à celui d'un bélier ; l'instant jonglé avec des jaunes d'œuf où elle prononce la phrase emblématique : « Offrir à l'être qui ne naîtra pas un aperçu du monde auquel il a échappé ».

Type de média :
Date de diffusion :
2007
Source :
Avec l'aimable autorisation de :
Compagnie :
Lieux :

Éclairage

L'éloge du poil (2007) [1] constitue le troisième solo de Jeanne Mordoj, mis en scène par Pierre Meunier, après 3 p'tits sous (2000, mis en scène par Vincent Lorimy et Jérôme Thomas) et Chez moi (2001, mis en scène par Vincent Lorimy et Gulko). Ces trois pièces sont pour Jeanne Mordoj l'occasion d'affirmer son positionnement sur la féminité et son rapport au monde au travers de celui qu'elle entretient avec les objets.

Jeanne Mordoj, née en 1970, de parents sculpteurs devenus agriculteurs, s'initie au cirque, dès l'adolescence. Renvoyée du CNAC, alors que celui-ci en était à ses premières années d'existence, elle poursuit sa formation à l'occasion de rencontres, de stages et d'expériences professionnelles. Ainsi, entre autres, Lan N'Guyen [2], formateur au Cirque Plume, lui enseigne la contorsion ; Guy Alloucherie la dirige lors d'un stage de théâtre. Pendant deux ans, elle suit les roulottes du Cirque Bidon, en Italie. Elle travaille pendant huit ans avec la Compagnie La Salamandre [3], spectacle de rue et d'ailleurs (1990-1998) ; constitue avec Vincent Filliozat et Bertrand Boss le Trio Maracassé qui réalise Bal (1993) ; rejoint le GR 12 de Jérôme Thomas (groupe de recherche qui crée Le Banquet, 1998) ; participe à Grimm de Cahin-Caha (2003)...

De ces expériences de créations pluridisciplinaires, elle a acquis non seulement des techniques de jeu, mais les moyens d'affirmer son propre parti pris esthétique, acceptant volontiers la référence au théâtre forain. Dans L'éloge du poil, au travers d'une succession d'instants, elle expose son être au monde. En troquant le voile contre la barbe, cet attribut masculin, elle redonne aux femmes le droit à la parole, au discours philosophique. Elle l'arbore comme un masque, comme un nez rouge qui autorise au discours distancié, à l'engagement politique critique qui dévoile le réel. Cette androgynie partielle pose aussi la question très actuelle du genre, de l'identité sexuelle, de la différence à accepter. Ventriloque, elle entretient des échanges avec des squelettes d'animaux. Jongleuse, elle manipule les objets pour intégrer leur présence active au sens de l'histoire. Il en va ainsi des coquilles d'escargots, des tiges de bambou, d'un pneu de voiture ou de jaunes d'œuf. Minéraux, végétaux, animaux se succèdent entre ses mains ou ses pieds, contre son corps, jouant sur le rapport séduction/répulsion auquel nous sommes nous-mêmes confronté dans la réalité ordinaire. Vie et mort, éros et thanatos, sont traités en tension permanente qui ne néglige pas la dimension humoristique. Elle va, sourire en coin, jusqu'à se glisser sous son plateau de jeu qui jusqu'à la représentation suivante semble devenir son tombeau.

[1] Pour cette création, Jeanne Mordoj a obtenu une aide à la recherche de l'AFAA  - Villa Medicis Hors les Murs 2006 – qui lui a permis de parcourir les pays de l'Est à la quête de la femme à barbe.

[2] Lân Nguyen, aujourd'hui responsable pédagogique d'Arc en Cirque (Chambéry, 73), est cofondateur avec son frère Nhât Ly et Tuan Lé du Nouveau Cirque du Vietnam, avec le spectacle Làng Tôi, mon village (2009).

[3] La Salamandre, créée en 1990, à Besançon, déclare se tisser « une histoire sur l'art de "jouer avec le feu" ».

Martine Maleval

Transcription

(Sans parole)