Boris Charmatz et Aatt... Enen... Tionon
Notice
Boris Charmatz évoque son spectacle Aatt... Enen... Tionon, au micro de Laure Adler, en présente les contraintes esthétiques et débat longuement de la question de la nudité, au cœur de certaines de ses pièces et de la danse contemporaine.
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Éclairage
Boris Charmatz avait 23 ans lorsqu'il mit en scène Aatt... Enen... Tionon (1996), trio grimpé sur un échafaudage à trois niveaux d'une hauteur de 7 mètres. Dansé cul nu et en tee-shirt, ce spectacle imposait son nom. Cette performance, surtout pour les interprètes situés au second et troisième niveau, exigeait une grande maîtrise. Depuis, Boris Charmatz, directeur du Musée de la danse/Centre chorégraphique national de Rennes depuis 2009, a fait de la prise de risque et de la contrainte son pain quotidien.
Boris Charmatz est l'un des chefs de file du courant de la "non danse" ou la "danse conceptuelle", mouvement de critique de la représentation apparu au milieu des années 90. Cette révolution a rassemblé des chorégraphes comme Jérôme Bel, Xavier Le Roy, Emmanuelle Huynh, Christian Rizzo, Alain Buffard, tous anciens interprètes des stars des années 80. En rébellion contre leurs productions, ils se dressent contre la gratuité du mouvement, les énormes décors, les lumières... Ils proposent une autre économie : plateau vide, danseurs immobiles et souvent nus, obscurité, silence... Une bonne base et bientôt de nouveaux codes dont Charmatz, excellent danseur s'il en est, s'est emparé en persistant à bouger, à se jeter des obstacles entre les jambes.
Depuis la création de l'association Edna en 1992, avec son complice le danseur Dimitri Chamblas, Boris Charmatz additionne les coups d'éclats. A bras-le-corps (1993), duo dansé et conçu avec Chamblas, les propulse dans des salves de gestes. Herses (une lente introduction) (1997), imbrique cinq danseurs totalement nus les uns dans les autres. Con Forts fleuves (1999) coupe le théâtre en deux et recouvre la tête des interprètes d'un jean.
La nudité, celle qui "pointe les organes" comme le précise Charmatz au micro de Laure Adler à propos de Aatt... Enen... Tionon, est régulièrement convoquée sur les plateaux du chorégraphe. Elle est au cœur de la réflexion plastique qui anime son travail. Dans Les Disparates (1994), Charmatz dialoguait avec une sculpture jaune de Toni Grand. Délibérément tournée vers l'installation, Héâtre-élévision (pseudo-spectacle) (2002) invite un spectateur à s'allonger sur un piano à queue au-dessus duquel une télévision présente un film de 52 minutes. En 2011, pour le festival d'Avignon, dont il était l'artiste-associé, Boris Charmatz a imaginé "Une école d'art", située dans les murs de l'Ecole d'Art d'Avignon, qui programmait des performances et des installations.