Visite du marais d'Orx

07 juin 2001
05m 47s
Réf. 00097

Notice

Résumé :

Acheté en 1989 par le Conservatoire du littoral avec le soutien du WWF, le marais d'Orx est devenu une réserve naturelle qui accueille nombre d'oiseaux migrateurs. Le site bénéficie d'une protection règlementée et la préservation de son milieu passe par la régulation des eaux grâce à un système hydraulique inventé au XIXe siècle.

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Date de diffusion :
07 juin 2001
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Éclairage

Aux confins du plateau landais, de la barrière dunaire et des coteaux du Seignanx, le marais d'Orx, nommé fréquemment, jusqu'au XVIIIe siècle, le Grand Moura [1] couvre une superficie de 774 hectares. Il emprunte son nom au petit bourg voisin, sur la rive orientale, mentionné dans le cartulaire de Dax (XIe-XIIe s.) sous les formes Oresc, Ors, Os, latinisées en Oresum. Si l'origine de ce toponyme appartenant à la strate aquitanique [2] n'est pas assurée, les traces d'une grande zone humide apparaissent déjà il y a 3 millions d'années ; son histoire, pour être complexe, n'en est pas moins passionnante.

La première mention du "marais" proprement dit date de 1255, quand le roi-duc Édouard d'Angleterre concède l'exploitation d'un moulin sur "notre étang d'Orx, près de Labenne". Il s'agit donc bien d'un plan d'eau dénommé cependant encore aujourd'hui, dans une certaine confusion, "domaine", "marais" ou "étang". Qu'en est-il exactement ?

Vestige d'un des lits de l'Adour ou lagune née de la formation du cordon dunaire, l'étang et ses abords constitue, depuis le Moyen Âge, un réservoir de ressources naturelles, pêche et chasse bien évidemment, mais aussi lieu de vaine pâture, de "vacants". C'est une "terre de questes" à laquelle sont particulièrement attachées les populations locales qui résistent à la domestication de ce lieu menacé, dès l'Ancien Régime, par des projets d'assèchement promus par les physiocrates [3] .

Au pont du Boudigau [4], le 14 avril 1808, Napoléon se rendant à Bayonne fait déjà un détour pour prendre connaissance de ce projet ; un monument éphémère érigé en son honneur porte l'inscription latine "Jubet dux patriae, atque undae mutandur in arva" [5].

La "Raison" l'emporte en effet et, sous l'influence du médecin dacquois Jean Thore, le marais présumé malsain est enfin asséché et transformé en terres agricoles sous l'égide de David Francfort et de Lefèvre-Béziers. Napoléon III devient propriétaire du "domaine" en 1858 - alors qu'il vient d'acquérir les terres de Solférino, au sud de Labouheyre - avant de le céder au comte Walewski [6]. L'époque prône une politique de mise en valeur des lieux humides et, dès 1863, le réseau de drainage est en place, des pompes sont installées et la digue-route est érigée en 1868.

Le "marais d'Orx" devient un domaine modèle entretenu par une vingtaine de métairies...Jusque dans les années 1980 où son destin change à nouveau, c'est un lieu très productif ; le maïs hybride y fait vivre des agriculteurs pionniers qui sont les premiers à utiliser des tracteurs en 1953...

À la suite du choc pétrolier des années 1970, ce fleuron de l'agriculture entre dans une période de déclin et d'incertitudes qui aboutit, en 1989, au rachat de 800 hectares du domaine par le Conservatoire du littoral qui l'intègre à une vaste réserve naturelle.

Les pompes continuent de fonctionner aujourd'hui mais afin de réguler le niveau d'un plan d'eau enchâssé dans l'écrin d'un lieu protégé. Il est surveillé par des professionnels encadrant et conseillant les quelque 30 000 visiteurs annuels qui, "loin des hommes", observent à l'envie un monde aquatique et limicole spécifique dont on redécouvre l'intérêt.

[1] Du gascon morar, "lieu humide, presque marécageux".

[2] BOYRIE-FENIE, Bénédicte, Dictionnaire toponymique des communes des Landes et du Bas-Adour, Pau : éditions Cairn / In'Oc, 2005, 285 pages.

[3] Partisan de la physiocratie (du grec phusis, "nature" et kratos, "pouvoir"). À la suite de Quesnay, auteur d'un Tableau économique publié en 1758, ils considèrent l'agriculture comme seule source de la richesse.

[4] Du gascon bodigau, "ruisseau coulant à travers de halliers".

[5] "Ordonne, maître de la patrie, et les eaux se convertiront en récolte".

[6] Fils naturel de Napoléon Ier et de la comtesse Marie Walewska.

Bénédicte Boyrie-Fénié

Transcription

Journaliste
Assurément l’un des plus beaux sites de la région Aquitaine, le marais d’Orx au sud-ouest du département des Landes. Réserve naturelle, à la faune et la flore exceptionnelle, Aquitaine première vous propose ce soir un immense bol d’air, en pleine nature.
(Musique)
Intervenant
On recherche une aigrette, on vient de voir une aigrette.
Inconnue 1
Elle est partie à gauche, elle a traversé.
Intervenant
Ah, elle a traversé oui. Là il y a un couple de canards qui vient de s’envoler, deux colverts.
Journaliste
Ce groupe de fans de nature fait partie des 30 000 personnes qui passent chaque année par le marais d’Orx.
Inconnue 1
Là aussi vous avez pas mal de milans, aussi, bon là ils tournent...
Intervenant
Là il tournait, il tournait au-dessus de la cabane, au-dessus de la maison d’accueil tout à l’heure. Il y avait un couple.
Christelle Lavigne
On entend bien les grenouilles oui.
Journaliste
Des heures durant, les visiteurs scrutent le paysage et restent à l’écoute de la vie animale.
Christelle Lavigne
Bon, il faut aller plus loin, là vous avez des grèbes huppés aussi. Voilà, en ce moment, ils sont surtout sur les nids donc comme ils font des nids flottants on a du mal à les voir, et on ne les voit que quand ils sortent pour pêcher. Tenez, vous avez le couple qui est sorti. Il faut surtout avoir les oreilles grandes ouvertes parce qu’en fait, on découvre aussi le marais à travers les sons de la nature. Là, tout à l’heure, bon c’est vrai, on a regardé beaucoup d’oiseaux qu’on peut voir à l’œil nu, sans être forcément très averti, qu’on arrive à voir. Mais après si on écoute, on entend aussi les grenouilles. Tout à l’heure en passant, on a pu voir les carpes remonter à la surface pour prendre de l’air, on a vu aussi une cistude en train de nager dans le canal. Bien, ces moments de vie, en fait, il faut juste comme l’a dit le monsieur, il faut juste être patient et puis on arrive à voir beaucoup de choses.
(Bruit)
Intervenant
Moi, ce qui me plaît ici c’est la nature préservée. C’est-à-dire que je sais que les animaux qui sont là peuvent vivre en tranquillité, peuvent se reproduire en toute tranquillité, loin de l’homme. On est loin d’eux en fait et c’est ça qui me plaît.
Journaliste
On retrouve des traces de la formation de ce marais il y a environ trois millions d’années. Après moult péripéties, c’est le Conservatoire du littoral avec le soutien financier du fonds mondial pour la nature qui en a fait l’acquisition en 1989. Depuis le marais d’Orx est classé réserve naturelle et bénéficie d’une protection réglementée.
Johann Montane
C’est la protection la plus adaptée, la plus forte en France. Et d’un point de vue scientifique effectivement, on met en place des suivis et les données qu’on recueille servent à l’ensemble des gens qui sont intéressés ; donc que ce soit des visiteurs mais aussi les scientifiques qui viennent chercher des données quand ils en ont besoin.
Raphaëlle Debats
Le marais est ceinturé par un réseau de digues qui isole le fond du marais, le fond de la cuvette en fait, des eaux du bassin versant. Les canaux de ceinture permettent de collecter toutes les eaux qui vont arriver par le bassin versant. Et ces eaux sont ensuite collectées donc autour du marais, et l’exutoire terminal c’est le Boudigau, c’est à Capbreton.
Journaliste
Un marais d’Orx tout près de l’océan, en plein dans les couloirs de migration de nombreuses espèces d’oiseaux qui trouvent dans cette réserve un cadre adapté pour un repos bien mérité. Depuis plus de quatre siècles, l’homme s’est penché sur la gestion des eaux dans ce marais d’Orx, le système hydraulique mis à mal cet hiver est pourtant un modèle du genre. Dès l’époque d’Henri IV, on a voulu assainir le marais, source de maladie, sans grand succès durable. Les eaux reprenant inlassablement le dessus. Au milieu du 19e siècle enfin, les pompes napoléoniennes réussirent l’exploit et le marais devint, ensuite, un immense champ de maïs. Aujourd’hui les pompes qui débitent trois mètres cube à la seconde servent à la préservation du milieu.
Johann Montane
Quotidiennement, on fait un relevé des niveaux, donc... et de la pluviométrie pour avoir un rapport entre pluviométrie et élévation des niveaux. Et on décide de mettre en route le pompage. Il faut garder de l’eau pour l’été, parce qu’on risque des épidémies comme le botulisme, et aussi garder suffisamment d’eau pour éviter une perpétuelle... l’invasion de la jussie, qui progresse sur le marais barrage, donc on jongle entre trop d’eau et pas assez.
Raphaëlle Debats
Le fond du marais est plus bas que le fond des canaux de ceinture. Donc le challenge hydraulique c’est... ce sont des pompes de relevage en fait; on va devoir rehausser le... faire partir l’eau d’un niveau plus bas à un niveau plus haut, donc c’est là la nécessité des pompes.
Journaliste
Grâce à son système hydraulique et ses pompes quasi centenaires, le marais d’Orx est redevenu l’exceptionnel territoire sauvage de jadis où la nature règne en maître absolu.
(Musique)
Journaliste
En ce mois de juin, on ne peut que vous conseiller de profiter au maximum de la nature dans toute sa splendeur, ici au marais d’Orx. Dans un instant, retour en studio avec le journal régional d’Aquitaine, bonne soirée à tous sur France 3.