Ecole d'arts culinaires chez GUERARD
Notice
Michel Guérard, chef cuisinier et ambassadeur de la cuisine française aux États Unis, ouvrira une école d'arts culinaires à Aire sur l'Adour Eugénie les bains, dans laquelle l'élite des cuisiniers sera formée. Guérard souhaite mettre en avant la cuisine régionale, les cuisiniers créateurs mais aussi porter un intérêt pour la cuisine de santé. Reportage au sein du restaurant, dans les cuisines et terrasse, et interview de Michel Guérard.
Éclairage
Eugénie-les-Bains : déjà en 1985 ce nom figure dans la liste des étapes gourmandes incontournables pour ceux qui élèvent la gastronomie au rang d'un art. Comment un tel miracle a-t-il pu s'opérer ?
Rien ne prédestinait, en effet, ce petit hameau de la commune de Saint-Loubouer, en Tursan, que l'on appelait simplement, en gascon, Las Aigas, "Les Eaux", à une telle célébrité. Rien ou presque...Car, depuis la nuit des temps, les eaux sulfurées sodiques qui y sourdent à une température variant de 22° à 41° y soignent les populations locales bien avant que ne soient reconnues les propriétés thérapeutiques des sources qui y sont captées sous le règne d'Henri IV, dans le cadre des missions confiées à la Surintendance des Eaux créée en 1605.
Ce n'est donc pas un hasard si le petit bourg devenu, depuis la création d'un premier établissement d'accueil des touristes en 1750, station thermale, accueille en 1860 Eugénie de Montijo en route pour sa résidence de Biarritz. Elle donne le ton et prête son nom, l'année suivante, à la nouvelle commune qui trouve son identité propre.
Mais si la mode des eaux a connu son apogée à la fin du XIXe siècle, les deux grands conflits mondiaux du XXe relèguent Eugénie aux oubliettes. Seules résistent les grandes stations comme Vichy qui continue à accueillir les curistes du monde entier.
Dans les Landes, et plus particulièrement en Tursan, le renouveau survient cependant exactement un siècle après la création de la commune qui possède un patrimoine bâti cossu et élégant, hérité du Second Empire. Adrien Barthélémy, un visionnaire, qui a fondé au sortir de la guerre, en 1946, la Chaîne thermale du soleil (1), rachète les belles bâtisses et commence à rénover ; ce n'est que le début d'une longue histoire à laquelle s'intègre, en 1972, un jeune chef cuisinier normand, Michel Guérard, qui épouse la fille d'Adrien. Un visionnaire lui aussi qui, à ses talents de chef étoilé, adjoint un sens aigu des affaires.
C'est la fin des "Trente Glorieuses" mais on ne le sait pas encore. La France est prospère, le tourisme se développe rapidement sous l'égide de la MIACA. Et si la côte est la première bénéficiaire de ces mesures, l'intérieur du pays landais en recueille aussi les bénéfices. Mais le Sud-Ouest vit sur ses acquis de terroir gastronomique ; il faut innover. Et Michel Guérard d'inventer la "nouvelle cuisine", celle qui redonne la première place au produit d'excellence cuisiné, travaillé, présenté avec le plus grand soin dans un souci de privilégier, avant tout, le goût et l'esthétique.
Mais le génie du "maître à penser" ne s'arrête pas là ; se souvenant que les eaux de Saint-Loubouer sont connues pour leurs vertus amincissantes (2), il invente la cuisine minceur alliant gastronomie et diététique avant de songer à transmettre, à l'instar de Paul Bocuse, à Lyon, sa philosophie dans une école qui s'ouvrirait aux femmes ; certainement en hommage à toutes ces mères et grand-mères inspiratrices, sûrement avec une pensée pour Marthe-Alice Pouypoudat et sa fameuse roulade aux cailles et au jambon de Chalosse qui, par l'intermédiaire de l'impératrice, est devenue célèbre sur les grandes tables parisiennes dès 1862 (3). Une structure qu'il souhaite fonder dans l'antique cité d'Aire-sur-l'Adour mais qui ne verra jamais le jour alors que ne tarde pas à s'installer, à quelques kilomètres de là, dans la petite bastide de Grenade, l'un de ses élèves surdoués, Didier Oudill.
(1) La Chaîne thermale du Soleil est la première chaîne française d'établissements thermaux. Fondée en 1946 par Adrien Barthélémy, elle accueille chaque année 145 000 patients dans ses 20 établissements. En 2013, Michel Guérard en est le directeur.
(2) Elles permettent de traiter des maladies métaboliques et de la nutrition (excès de poids), des rhumatismes, et des affections chroniques des voies digestives et des voies urinaires.
(3) http://www.sudouest.fr/2011/05/08/marthe-alice-une-grande-inspiratrice-392233-4720.php