Développement du village de Jarzy par l'artisanat
Notice
A Jarsy (200 habitants) dans les Bauges, le maire a choisi de développer son village par l'artisanat. La commune apporte son soutien à différents artisans : une poterie, une pépinière de plantes alpestres, une chocolaterie, etc. Le village possède aussi un gîte tenu par sa femme et sa fille.
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Éclairage
Octobre 1991 : la Savoie s'apprête à célébrer les XVIe Jeux olympiques d'hiver. Ils doivent initier un nouvel essor dans un territoire savoyard qui subit une double crise économique et touristique en raison de la raréfaction récente de « l'or blanc ». Ce n'est pourtant pas sur la Savoie olympique que ce reportage choisit de s'attarder. Il entend au contraire jeter un coup de projecteur sur « une autre Savoie oubliée, peu aidée par les pouvoirs publics ». Ces quelques mots rappellent opportunément les polémiques autour du coût des Jeux pour l'État et les collectivités locales savoyardes. Ils sonnent aussi comme un reproche à l'adresse des pouvoirs publics : ils favoriseraient une Savoie, celle des « grandes » stations de Tarentaise, au détriment d'une autre. Il s'agit pour le journaliste de Lans-en-Vercors, Patrice Morel, de montrer que les « petits » sont sans doute plus dynamiques que les grands. Il installe ses caméras à Jarsy, un petit village des Bauges, qu'il situe judicieusement entre deux capitales régionales, « Chambéry et Annecy ». Les premiers plans du reportage privilégient à dessein une vision traditionnelle du village « de montagne » : à la vue des toits très pentus du village, succède celle de l'imposante et austère Dent de Pleuven et s'achève sur le plan fixe d'un champ puis d'une ferme pour suggérer l'empreinte encore fortement agricole du territoire. Il fut effectivement au XIXe siècle très peuplé, en raison d'une importante activité agricole, de l'artisanat du clou et du bois et d'une forte émigration temporaire (1). Si le journaliste déplore sans surprise que l'agriculture soit « en perte de vitesse » – discours qui n'est pas très nouveau –, le salut de la petite commune des Bauges pour une fois, ne passe pas uniquement par le tourisme. Il passe par l'individu – aiguillonné par les élus locaux – et la petite entreprise. À l'heure du « small is beautiful ! » (2), dans une décennie 1990 libérale, le petit patron, si longtemps méprisé, devient le symbole de l'innovation et du dynamisme pour peu qu'il opte pour un « créneau » de marché rémunérateur et pour la « qualité » pour affronter la concurrence mondiale. Cet éloge du petit entrepreneur savoyard qui retrouve d'une certaine façon le dynamisme de ses ancêtres est l'objet de la seconde partie du reportage. Elle célèbre au long d'images qui nous montrent essentiellement ces petits patrons en pleine action, cet esprit d'initiative de gens désireux de « revenir à la nature » – retour présenté comme une nouveauté alors même que les années 1970 étaient déjà la décennie du néo-ruralisme – voire même de « rentrer au pays » comme ces Savoyards, qui lassés du trafic parisien sont revenus à Jarsy. Et l'objectif est un objectif de long terme – contrairement, laisse supposer le reportage, à celui des Jeux olympiques. Il s'agit de repeupler un village qui comme d'autres communes de Savoie s'est trop longtemps désertifié depuis les années 1960. Les résultats seraient ainsi tangibles : « la population s'accroît, des jeunes ménages s'installent, la natalité remonte ». Le reportage se clôt sur une référence à la Savoie catholique – « aide-toi, le ciel t'aidera », occasion encore de célébrer les spécificités du territoire. Il semble bien aujourd'hui que la population se soit stabilisée : Jarsy compte 281 habitants en 2012.
(1) Jean-Paul Guérin, « Emploi et tourisme dans le Massif des Bauges », Revue de géographie alpine, 1973, Tome 61, n°4. pp. 561-564.
(2) Claire Zalc, « Les petits patrons en France au 20e siècle ou les atouts du flou », Vingtième Siècle, 2012/2, n°114, p.53-66