La filière bois en Picardie
Notice
Magazine consacré à l'atout économique que représente le bois en Picardie. Bernard Helluin, exploitant, Michel Hugues (Institut de développement forestier) et Denis Harlé d'Ophove, (président du Syndicat des forestiers et des sylviculteurs de l'Oise), présentent les caractéristiques de la forêt picarde partagée entre secteur public et secteur privé et le futur plan de gestion autour des trois principales fonctions de la forêt : économique, sociale et touristique. Une courte séquence est consacrée à la menuiserie industrielle avec une petite usine à Conty.
Éclairage
En Picardie, la forêt s'étend sur 322.000 ha, soit 16,5 % du territoire. Ces chiffres peuvent paraître faibles par rapport à la moyenne nationale (29 %). Ils cachent cependant de grandes disparités, le département de la Somme restant très faiblement boisé (9 % de sa superficie) à côté de l'Aisne (16,6 %) et de l'Oise (20,7 %) (1).
Les massifs les plus connus sont de grandes forêts domaniales, comme celles de Compiègne (14.484 ha), Retz (ou Villers-Cotterêts) (13.023 ha), Saint-Gobain – Coucy (8.500 ha), Crécy-en-Ponthieu (4.366 ha), Saint-Michel en Thiérache (3063 ha), Hez-Froidmont (2.787 ha) ou Vauclair (1059 ha). Mais ces grands massifs occultent la part prédominante que représente la forêt privée (74 %), les surfaces communales restant quant à elles très limitées.
Ces forêts animent une économie localement importante, mais qui reste depuis longtemps fragile. Comme sur une grande partie du territoire national, la forêt privée demeure très morcelée. En dépit de réels efforts menés par les syndicats de propriétaires forestiers pour regrouper les parcelles ou réaliser des ventes groupées, les surfaces exploitables restent encore petites et fractionnées. Depuis plusieurs décennies, l'activité sylvicole a aussi mise à mal par la récurrence des tempêtes, la recrudescence des dégâts de gibier, ou les fluctuations erratiques des cours des bois.
En dépit de ces handicaps, la production picarde reste d'une grande qualité. Les classements avancés en 1979 ont peu évolué. Avec plus d'un million de m3 de bois abattus chaque année, la Picardie est actuellement la 12e région française en terme de production. Mais elle est la première région productrice de grumes de peupliers et la 3e région productrice de grumes de feuillus. La productivité des forêts picardes s'explique à la fois par les sols et le climat, les conditions favorables d'exploitation et l'excellence de leur culture. La spécificité de la région est surtout la production de bois de qualité de chêne, de hêtre, et de châtaignier, ainsi que de feuillus précieux comme le merisier, le frêne et l'érable.
Avec une telle production, les débouchés sont d'abord le bois d'œuvre (50 % de la récolte est destinée à la construction, aux meubles, et à la caisserie), avant le bois de trituration (33 % de la récolte part en pâte à papier et panneaux de particules) et le bois énergie (16 % de la récolte en bois bûche et bois déchiqueté). La sylviculture est génératrice d'emplois. Elle entraîne toute une filière, de première transformation du bois (exploitation forestière, scieries artisanales et industrielles) et de seconde transformation (ameublement, emballage, construction...), même si la région n'accueille qu'une seule usine de pâte à papier. Issue de la Société des pailles de l'Aisne, créée en 1924, puis rachetée en 1942 par la cartonnerie de la Rochette en 1942, cette usine implantée dans la vallée de l'Aisne, à Vénizel, est aujourd'hui aux mains d'un groupe espagnol. Mais la filière a été fortement malmenée par les crises. Depuis les années 1970, des dizaines d'entreprises d'exploitation forestière et de sciage ont fermé leurs portes dans la région, conduisant à une plus forte concentration. Aujourd'hui, il ne reste plus que 147 entreprises en activité.
Une grande partie de la production forestière alimente aussi des flux extra-régionaux et internationaux. A la fin des années 1970, les acteurs de la filière bois dénonçaient déjà les exportations vers l'étranger. Aujourd'hui, la Picardie est la 4e région exportatrice de bois en France. Près de 23,5 % de sa récolte, et plus de 27 % de ses bois d'œuvre partent hors des frontières. Les flux les plus anciens s'étendaient aux proches pays de l'UE, comme la Belgique, la Grande-Bretagne, l'Allemagne puis l'Italie. Désormais, de nouveaux acheteurs sont venus s'ajouter, comme les pays d'Afrique du Nord et surtout la Chine. Comme à la fin des années 1970, la Picardie exporte toujours des bois bruts vers l'étranger, qui peuvent ensuite revenir en France sous forme de produits finis.
(1) - http://inventaire-forestier.ign.fr (consulté le 26 juin 2013).