Reconstitution de maisons néolithiques sur le site de Samara

14 octobre 1986
03m 31s
Réf. 00608

Notice

Résumé :

Le parc archéologique de Samara installé sur le site archéologique de la Chaussée-Tirancourt, sort de terre. On reconstitue des maisons de l'age du fer à partir des techniques de fabrication de l'époque. L'archéologue Gérard Fercoq détaille les caractéristiques de ces maisons. On n'a que des indications rudimentaires dans les fouilles, d'où l'intérêt de la reconstitution qui permet de conforter des hypothèses.

Date de diffusion :
14 octobre 1986
Source :
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Éclairage

Le domaine de Samara, situé à 10 kilomètres à l'ouest d'Amiens, s'étage sur le flanc nord de la vallée de la Somme, au pied de l'oppidum de La Chaussé-Tirancourt. Il est né de la volonté commune du Crédit agricole et du département de la Somme. Sa réalisation a été confiée en 1982 au sculpteur Bruno Lebel, alors maître de conférence à l'Ecole Polytechnique et professeur à l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris. Le parc a été ouvert au public en 1988. C'est à la fois un archéosite parc de loisirs, et un parc paysager et botanique.

Pour sa partie archéologique, le site comporte un pavillon, au pied de l'oppidum, constituant l'élément central de l'équipement abritant des expositions conçues comme un voyage dans le temps et dans l'espace ; un circuit des reconstitutions d'habitats associés à des ateliers qui essaient, à partir des matériaux et des outils passés, de retrouver les techniques utilisées ; le circuit de l'oppidum avec son système de fortifications et la vue spectaculaire sur la vallée.

Les reconstitutions en plein air réalisées à Samara illustrent nos connaissances sur l'évolution de la construction entre le quinzième millénaire et le Ier siècle av. n.è. Ces reconstitutions reposent sur l'étude critique des données de fouilles, étayées par des paramètres techniques et ethnologiques.

La tente reconstituée du Paléolithique Supérieur (environ 15 000 avant n.è.) a été réalisée à partir des fouilles d'Etiolles et de Pincevent, au sud de Paris. La disposition des pierres qui maintenaient la base de la structure et des traces des piquets enfoncés dans le sol a inspiré la taille et la forme de cette première forme d'habitat. De forme circulaire, la tente était probablement recouverte de peaux de rennes ou de chevaux. L'armature de l'habitation est composée de petites branches de moins de 2 m, les seules disponibles dans l'environnement glaciaire de cette époque.

La maison danubienne (5 000 avant n.è.) a été reconstituée à partir des découvertes de Cuiry-les-Chaudardes, dans l'Aisne. Cette reconstitution étonne par ses dimensions. Longue de 25 mètres elle n'est pourtant pas la plus longue à avoir laissé des traces. La charpente est portée par des rangées de 5 poteaux calés dans des trous très profonds. Les murs en bois sont recouverts de torchis et le toit est en chaume. A l'intérieur, elle semble avoir été séparée par les nombreux piliers qui soutiennent le toit. On suppose que plusieurs familles, ou plusieurs générations d'une même famille devaient se partager les lieux. Les archéologues ont reconstitué plusieurs éléments du mobilier qui devait garnir cet intérieur : un four, un métier à tisser. Le foyer permettait certainement d'enfumer la toiture et éviter ainsi que s'y installent des animaux.

La maison de l'âge du Bronze (700 avant n.è.) a été reconstituée d'après les fouilles de Choisy-au-Bac, au confluent de l'Oise et de l'Aisne. Les poteaux ne sont pas plantés dans le sol, la charpente est portée par une ossature de bois, posée sur une semelle de fondation. Elle est caractérisée par son toit à quatre pans et les pièces de bois sont reliées par des assemblages complexes réalisés à l'aide d'un outillage métallique.

La maison gauloise a été reconstituée d'après les fouilles du site de Villeneuve-Saint-Germain, près de Soissons, dans l'Aisne. Elle faisait partie d'un village, dans un vaste site implanté dans une boucle de l'Aisne, protégé par une fortification. On a pu observer des îlots d'habitations séparés par un système de rues perpendiculaires. A l'écart de la zone d'habitat fonctionnait un secteur d'activité artisanale. La découverte d'un atelier où était fabriqué des monnaies prouve qu'une autorité politique siégeait à cet endroit. Cette habitation est une des rares à posséder un grenier pour le stockage des grains. Ce grenier est posé sur une série de 9 poteaux, des disques de pierre interdisent l'accès aux rongeurs. L'ensemble se complète par une cave profonde de 2 m, servant à conserver des aliments, et par un puits permettant de canaliser l'eau.

Ces habitats sont reconstitués avec des matériaux naturels et sans utiliser notre technologie actuelle. Ils ont, au départ, servi de test "grandeur nature" par les archéologues pour connaître les méthodes de construction et vérifier leurs hypothèses. Ces maisons ne sont pas vides, elles ont été aménagées en fonction de nos connaissances sur le mode de vie des époques concernées et sont équipées de copies des objets découverts sur les sites originaux.

Tahar Ben Redjeb

Transcription

Christian Galli
… Je vous remercie. Le projet Samara sort de terre. Les travaux de réalisation du parc archéologique de Samara ont débuté au mois de juin sur le site de la Chaussée-Tirancourt, à une quinzaine de kilomètres d’Amiens. Lancée par le Conseil Général de la Somme, cette opération à vocation touristique faisant aussi un grand intérêt scientifique notamment à travers la reconstitution de plusieurs maisons préhistoriques.
Thierry Bonté
Sorti tout droit du flou de la préhistoire, voici une maison de l’âge du Fer. L’un des 4 bâtiments en cours de reconstitution sur l’oppidum de la Chaussée-Tirancourt. Correspondant à la première phase de réalisation des travaux du parc archéologique, la construction de ces maisons présente un intérêt scientifique considérable. Cette expérience vise, en effet, à partir des indications relevées lors des chantiers de fouille, à connaître les techniques de fabrication et les caractéristiques architecturales de ces bâtiments.
(Silence)
Gérard Fercoq du Leslay
Les maisons les plus anciennes que nous connaissons, les maisons du Néolithique, donc, dans les années 4000 avant Jésus Christ pour nos régions, ce sont des maisons qui ne sont jamais très très larges. La largeur varie entre 5 et 7 mètres maximum. Par contre, elles peuvent être très très longues. La longueur varie d’une dizaine de mètres jusqu'à 35-40 mètres de long. Par contre, pour des périodes plus récentes, on a tendance à voir des plans rectangulaires beaucoup plus proches de nos maisons actuelles. Par exemple, une dizaine de mètres sur 7-8 mètres. C’est relativement classique. Mais tout dépend de la manière dont elle est construite.
(Bruit)
Thierry Bonté
Les éléments d’information provenant des sites fouillés sont souvent très minces. Des maisons construites il y a plusieurs milliers d’années en bois et en torchis, on ne retrouve, bien évidemment, que quelques fondations rudimentaires. D’où l’intérêt d’une reconstitution grandeur nature avec des matériaux utilisés, semble-t-il, à l’époque. L’utilisation du chaume pour les couvertures dans une région très pluvieuse permet, par exemple, d’affirmer que les toitures devaient être très pentues.
(Bruit)
Gérard Fercoq du Leslay
En archéologie, le premier problème, c’est d’arriver à trouver les structures d’habitat. Alors le cas général, ce sont les maisons qui ont été plantées directement dans le sol. C'est-à-dire qu’on a creusé les trous de poteaux et on a planté des poteaux dans ces trous. Mais il existe d’autres maisons qui ont simplement été posées sur le sol sans, pour cela, perturber le sol en profondeur. Pour retrouver celles-là, il faut des conditions de conservation très exceptionnelles. On les retrouve relativement rarement. Et il y a aussi une chose extrêmement délicate à comprendre pour leur interprétation. C’est : comment est-ce qu’elles peuvent tenir debout dans la mesure où on n’a aucun élément archéologique qui nous permette d’affirmer que des pièces obliques, comme par exemple des contreventements, puissent être utilisées comme assemblage à cette époque-là.
(Silence)
Thierry Bonté
Pour comprendre comment ces maisons pouvaient tenir debout sans aucune fondation, les archéologues, grâce à leurs pratiques nouvelles, ont émis l’hypothèse que certains chevrons extérieurs descendaient jusqu'au sol pour soutenir l’ensemble. Une supposition nouvelle que bien d’autres informations devraient venir enrichir grâce à ce chantier de recherche bien singulier.
(Bruit)