Titus Carmel dans son atelier d'Oulchy-le-Château
Notice
Pour ses 10 ans, le FRAC organise une exposition tournante avec le peintre Gérard Titus Carmel. Rencontre avec celui-ci à son atelier d'Oulchy-le-Château, installé dans un carmel. Yves Lecointe, directeur du FRAC Picardie, justifie le choix du peintre et des peintures pour cette exposition.
- Europe > France > Picardie > Aisne > Oulchy-le-Château
Éclairage
Dessinateur, graveur, illustrateur, peintre et poète, Gérard Titus-Carmel est à la tête d'une œuvre prolifique mais cohérente qui s'exprime par le dessin aussi bien que par l'écriture. Né à Paris en 1942, élève de la prestigieuse école Boulle, il travaille aujourd'hui au village d'Oulchy-le-Château dans l'Aisne, près de Fère-en-Tardenois, où il a installé son atelier dans un ancien couvent. Le court document ici réalisé par la télévision régionale en 1993 a pour objectif de présenter ses liens avec le FRAC de Picardie, à l'occasion d'une exposition de son œuvre présentée à Amiens, Laon et Compiègne. Il faut toutefois savoir que la réputation internationale de Titus-Carmel l'a conduit à participer à de nombreuses expositions aux quatre coins du monde (plus de 250 expositions personnelles, près de 500 collectives). D'abord essentiellement graphique, son travail s'est progressivement ouvert à la couleur, sans jamais déroger à sa logique initiale de la suite et des séries. Une exposition de Titus-Carmel est généralement une série de variations sur un même thème. Si l'on s'attarde par exemple sur les Feuillées (2000-2003), les Jungles (2004), l'Herbier du Seul (2005), reproduites sous forme de livre par les éditions "Rencontre" (1), on remarque d'emblée le retour démultiplié d'un seul et même motif, soit un rameau d'herbe ou de branche d'arbre en forme de palme s'épanouissant vers le haut. Les teintes du végétal ainsi observé s'étagent sur un spectre minimal allant du noir au bistre en passant par le marron. Mais cette relative unité de composition (forme et teinte) est simultanément "décomposée" par une série de cadres ou de coupes qui déportent le sujet et le décalent par rapport à lui-même. On pourrait croire au travail méthodique d'un botaniste ou d'un biologiste utilisant le microscope pour étudier le tissu de la plante par grossissement. Or, après observation, l'effet de coupe semble obtenu par collage d'articles de journaux sur lesquels les rameaux ont été reliés au tronc par le pinceau. Ainsi la nature, au lieu d'être donnée comme un tout, intuitivement, est-elle présentée comme abstraction et reconstruction mentale. L'unité n'apparaît plus dans l'instant mais dans la succession, la singularité n'est plus qu'une variation infime du même. Parallèlement à son œuvre picturale Gérard Titus-Carmel a engagé une œuvre de poète publiée aux éditions Obsidiane, Fata Morgana ou Champ Vallon (La rive en effet, 2000, Ici rien n'est présent 2003, Manière de Sombre 2004, Seul tenant 2006, Le huitième pli ou le travail de beauté 2013). Il y est question d'un "renoncement à l'Histoire" au profit du "dévalement accéléré des saisons", d'une préférence "pour les formes rompues" car, nous affirme mystérieusement le poète, "nous sommes vivants à l'extérieur/de nous".
(1) Titus-Carmel Gérard, Peyré Yves, L'herbier du seul, L' Echelle, Centre d'Art et de Litterature, Hotel Beury / Rencontres, 2006.