Mille châteaux pour d'Artagnan
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Résumé
L’historien Jean-Henri Ducos présente l’évolution de l’architecture des châteaux gersois, du Moyen Âge au XVIIe siècle. Ses propos sont illustrés de vues aériennes et intérieures de différents châteaux de la région : les châteaux gascons de Sainte-Mère et du Tauzia, le château du Mas d’Auvignon, les châteaux de la Renaissance d’Esclignac, de Flamarens et de Madirac, le château de Lacassagne.
Date de publication du document :
14 sept. 2021
Date de diffusion :
03 mars 1974
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Contexte historique
ParConservateur délégué des antiquités et objets d’art du Gers
Publication : 14 sept. 2021
Cet extrait, issu d'une émission réalisé à l'occasion du tournage du film "Les quatre Charlots mousquetaires", dévoile bon nombre de châteaux parmi les plus fameux, afin d’exposer à la fois la richesse patrimoniale du Gers et l’évolution de l’architecture et du rôle de ces châteaux au fil du temps. Pour expliquer avec pédagogie ces mutations, Jean-Henri Ducos (1930-2006), historien local réputé, partage ses connaissances.
Professeur d’histoire au lycée de Lannemezan, Ducos consacre la plus grande partie de sa vie à l’étude analytique des châteaux du Gers à travers leur histoire et leur architecture. Dès lors, il devient un « castellologue » reconnu et incontesté dans la région.
Assurément, le Gers était une terre propice aux recherches de cet éminent érudit puisqu’il s’agit de l’un des départements français les plus pourvus en châteaux de toutes sortes et de toutes époques. Rares sont les communes gersoises qui ne possèdent pas un château, un manoir ou même une gentilhommière. Des châteaux gascons et des salles seigneuriales des confins du Moyen Âge, comme au Mas d’Auvignon, à Sainte-Mère, au Tauzia et à Mansencôme, aux châteaux du siècle de Louis XIV, comme Busca-Maniban et Lavardens, en passant par ceux de la Renaissance pareils à Esclignac et Flamarens, le Gers est bel et bien couvert de châteaux.
Plusieurs raisons expliquent cette prolifération : tout d’abord, la situation géographique de la Gascogne, longtemps une zone frontière. Aujourd’hui encore, elle se situe au pied des Pyrénées et donc à la frontière avec l’Espagne. Cependant, il faut rappeler que durant la guerre de Cent Ans, le territoire de l’actuel département du Gers, plutôt acquis au roi de France, se trouve aux portes de la Guyenne anglaise. Les seigneurs gascons, pour se prémunir de l’ennemi anglais, sont poussés à se protéger davantage, en érigeant ou en renforçant leurs châteaux qui deviennent de véritables forteresses aux remparts réputés inexpugnables. Ces châteaux défendent de fait les seigneurs et garantissent la pleine intégrité et l’indépendance des terres et des fiefs alentours. Une autre raison, qui s’accentue au cours du temps, doit être évoquée : la volonté d’afficher ostensiblement la richesse et le pouvoir de certains hobereaux ou des nobles gascons. Effectivement, même vivants au plus loin du roi de France et de sa cour, les seigneurs ne veulent sûrement pas manquer d’impressionner.
Parler des châteaux gascons, c’est aussi évoquer un certain esprit gascon. Un esprit pour le moins téméraire et hâbleur, qui incite certains d’entre eux à épouser la carrière des armes durant les croisades ou les guerres d’Italie. Ces hommes de guerre sont pour la plupart des cadets, seconds de fratries issus de la petite noblesse et écartés de toute succession au profit du droit d’aînesse. Ce privilège, qui prévaut jusqu’à la Révolution, stipule que seuls les fils aînés héritent du titre de noblesse (duc, comte ou vicomte, marquis), des châteaux et des terres constituant ledit fief. Par la carrière des armes, les cadets peuvent donc espérer intégrer la noblesse d’épée, se faire un nom à défaut de conserver un titre. Antoine de Roquelaure, le duc d’Epernon ou Charles de Batz de Castelmore dit d’Artagnan, sont les plus célèbres cadets de Gascogne. La notoriété de ce dernier doit beaucoup au fameux roman de cape et d’épée Les Trois mousquetaires d’Alexandre Dumas qui présente un d’Artagnan réunissant à lui seul toutes les valeurs citées plus haut qui caractérisent les Gascons, sans omettre bien naturellement le panache et le goût de la bonne chère. La visite des cuisines de son château de Castelmore avec André Daguin (1935-2019), représentant contemporain de la gastronomie gasconne, tend certainement à le prouver.
Au cours des siècles, les châteaux gersois furent édifiés, embellis, ou agrandis systématiquement dans la pierre, une pierre de taille claire, qui contribue à élever de fières bâtisses massives sans être trop austères. Ces dernières participent encore de nos jours au charme et à la renommée de la Gascogne aux « mille châteaux ».
Bibliographie
- Arch. dép. du Gers, 88 J, fonds Jean-Henri Ducos.