Astarac et Magnoac, un patrimoine en terre crue exceptionnel et unique
- Qualité: Basse
- Vitesse de lecture: 1 x (normal)
Infos
Résumé
Dans le Gers et plus particulièrement dans les régions naturelles de l'Astarac et du Magnoac, les deux tiers des habitations sont construites en terre crue, faisant de cette architecture une caractéristique du territoire. Messieurs Tharan et Bardet expliquent les différentes techniques et traditions liés à cette architecture (le torchis, le pisé, l’adobe).
Date de diffusion :
24 avr. 1987
Éclairage
Informations et crédits
- Type de média :
- Type du document :
- Collection :
- Réalisateur :
- Source :
- Référence :
- 00084
Catégories
Thèmes
Lieux
Éclairage
Contexte historique
ParDirecteur du CAUE du Gers
La terre crue est un matériau ancestral, utilisé sur le site même de son extraction et ce depuis des millénaires et l’émergence des premières formes d’habitat dans les grandes plaines alluviales de Mésopotamie. On estime qu’environ un tiers de la population mondiale vivrait toujours aujourd’hui dans des habitations utilisant la terre crue comme un des matériaux de construction.
Utilisée en abondance par défaut dans les régions qui ne dispose pas de pierre dans leur sous-sol, la terre crue a toujours été aussi largement utilisée en association avec d’autres matières premières (pierre, bois, fibres végétales) pour ses très nombreuses qualités intrinsèques que l’on a un peu perdu de vue (inertie, qualité acoustique, régulation hydrothermique, recyclage…). C’est un matériau particulièrement sain.
Au fil des millénaires, les hommes ont développé de très nombreuses techniques et système constructifs et utilisé la terre sous des formes très variées, qu’elle serve juste d’enduit protecteur, de simple remplissage ou porte même tout le bâtiment.
La singularité de la petite région de l’Astarac et du Magnoac du Gers où se déroule le reportage est que l’on y retrouve - sur un périmètre assez restreint au Sud du département - l’ensemble des techniques de construction en terre crue qui existent en France. Ce terroir abrite même une technique unique particulièrement singulière dites des murs en damiers où sont associées des briques de terre (motte) et des galets de rivière, dans un appareillage au rendu esthétique surprenant.
Depuis quelques années, un projet de Parc naturel régional (PNR) est engagé sur ce territoire de l’Astarac qui vise notamment à remettre en valeur ce patrimoine de terre crue et en faire un vecteur de développement local. À l’heure de l’épuisement des ressources, de la lutte contre le changement climatique, de la construction bas carbone, on redécouvre les nombreuses vertus de la terre crue abondamment et facilement disponible juste sous nos pieds, et pour lequel il nous faut retrouver et réinventer de nouveaux savoir-faire.
Différentes techniques de constructions en terre crue sont évoquées dans cette vidéo. Le torchis, qui est un mélange de terre et de paille utilisé en remplissage des maisons à ossature bois (maison en colombage). C’est la technique constructive la plus répandue, omniprésente en France. Le Sud-Ouest et le Gers n’y font pas exception. On en retrouve dans toutes les régions.
Pisé et bauge sont des techniques constructives porteuses plus rares avec des murs massifs en terre crue compressée ou compactée.
Adobe pour sa part est le terme générique qui désigne l’ensemble des briques de terre crue moulées et séchées qui sont très largement utilisées dans l’architecture. Il en existe de multiples formats selon les régions, la qualité de la terre, les formes de moules utilisés. Elles relèvent tout un ensemble de savoir-faire locaux dont on a peu de traces… ce qui rend particulièrement précieux le témoignage de Monsieur Bardet. Les adobes dont il parle sont des briques de terre crue assez planes et rectangulaires qui ont épousé le format de la brique foraine toulousaine à laquelle elles étaient associées dans les constructions dans une large partie du midi toulousain. On la retrouve dans le Gers dans le Savès, la partie orientale de la Gascogne gersoise. En Astarac et Magnoac, où se situe le reportage, les briques de terre crue sont d’un format plus large et plutôt désignées par le terme de « motte ».
Plusieurs monuments historiques en terre crue sont toujours conservés dans le Gers. La grange cistercienne de Juilles qui apparaît à la fin du reportage a été depuis protégée au titre des Monuments historiques tout comme le castet de Sainte-Christie d’Armagnac. Ces deux constructions en terre assez monumentales montrent d’une part que ce matériau n’était pas exclusivement réservé aux constructions vernaculaires les plus modestes et d’autre part qu’il traverse les siècles. Il existe aussi plusieurs églises en terre crue dans le secteur du Bas-Armagnac.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
(Musique)(Bruit)
Monsieur Tharan
L'architecture du département de Gers la plus caractéristique, c'est la terre crue qui représente à peu près les deux tiers de la surface du département et elle se situe en particulier sur le Sud et le Sud-est du département, c'est-à-dire l'Astarac et le Magnoac.
(Bruit)
Monsieur Tharan
Dans le Magnoac, autour de Castelnau, ou dans l'Astarac, autour de Mielan, ou dans les vallées de Baïse, on trouve deux techniques de construction à base de terre, qui sont le pisé et l'adobe, ou la brique de terre crue.Souvent ici, dans ces régions, l'adobe est mélangée avec le galet qu'on trouve dans les champs ou au bord des rivières.Donc si on veut expliquer les deux techniques le pisé c'est une maçonnerie de terre damée et coffrée et on montait les murs comme ça progressivement, et l'adobe c'est une brique moulée qu'on mélangeait justement avec des galets surtout contre la protection du mauvais tempsEt on retrouve ça dans les façades ouest et les façades nord où les toits sont très très bas pour s'abriter contre la pluie et le vent qui vient de l'ouest.Mais aussi on y mettait des protections végétales comme par exemple des laurières, ou alors on mettait des palissades contre le mur pour protéger l'érosion.
(Bruit)
Jacques Betillon
Quelles sont les techniques du travail de la terre crue que l'on retrouve dans le Gers ?
Monsieur Tharan
On trouve donc trois techniques de construction à base de terre crue dans le département du Gers.Dans l'Armagnac, c'est la zone torchis, c'est-à-dire maison à colombage avec remplissage torchis à base de terre.Dans le sud et le sud-est du département, dans les zones Astarac, on trouve une zone pisé,Et dans la région justin, la région toulousaine, le pays de la save, c'est le pays de l'adobe, c'est-à-dire la brique terre crue.
Jacques Betillon
Quelles sont les caractéristiques de ce matériau ?
Monsieur Tharan
Les caractéristiques principales de ce matériau par rapport au patrimoine local, c'est d'avoir trouvé le matériau carrément sur place.C'est-à-dire les gens, quand ils faisaient leur maison, ils trouvaient le matériau sur le lieu de la maison.Ensuite, c'est un matériau facile à mettre en œuvre.Les maisons qu'on voit dans la région, ce n'est pas des maisons de techniciens, c'est-à-dire que le maçon venait, le charpentier venait, mais souvent c'était le paysan lui-même qui se faisait les briques, qui se faisait le pisé ou qui se faisait le torchis.Donc il y avait une espèce d'auto-construction.Et ensuite, c'est un matériau qui est très sain.
Jacques Betillon
Vous connaissez une personne dans le Gers qui peut nous parler de la construction de la terre crue au début du siècle ?
Monsieur Tharan
Dans la région de Samatan en particulier, il y a des gens qui ont participé à des constructions et beaucoup disons au niveau de l'adobe, c'est-à-dire la technique de la brique de terre crue moulée.
Monsieur Bardet
On mettait quatre tombereaux, trois tombereaux de terre pour veine et on mettait un tombereau de sable de mine.Et on mélangeait ça, qu'on pétrissait,qu'on pétrissait cette terre, ce mélange de terre pour veine et de sable de mine, avec une vache.On mettait de l'eau et on faisait tourner la vache, donc, sur cette terre, et à fur et à mesure que la terre s'écartait, il y avait un bonhomme, quelqu'un, toujours, qui ramenait avec une pelle la terre vers le milieu, pour que cette terre soit bien pétrie, homogène, vous voyez, qu'elle soit bien toute pareille.Et alors, après, il fallait laisser tremper quand même.Il fallait qu'elle soit bien homogène, bien pétrie.Et puis, il fallait attendre un peu, vous voyez, qu'elle se prenne.Et alors, une fois qu'elle était prise, qu'on la connaissait à la main, quand elle était à point, alors on la moulait dans un moule en bois de 30 sur 40 en grande partie.C'était le grand modèle, 30 sur 40.Et le bois, en partie, était du saule.Parce que le saule il avait l'avantage que la terre ne se collait pas.Quand il démoulait, si on veut bien, ça se faisait plus facilement.
Jacques Betillon
On voit beaucoup de petites fermes disséminées en terre crue sur le département du Gers.Est-ce qu'il existe des bâtisses importantes qui ont utilisé justement cette terre du coin ?
Monsieur Tharan
Il y en a quelques-unes.Disons que c'est pas l'essentiel du patrimoine architectural du pays, mais c'est vrai que c'est surtout la maison paysanne.On trouve des pigeonniers qui sont construits aussi à base de terre.Mais au point de vue église, au point de vue patrimoine vraiment riche, ça n'existe pas tellement dans la région.Ici, nous nous trouvons dans la région de Gimont, à Saint-Caprais, où on a découvert depuis quelque temps cette maison qui me paraît, disons, être le...l'exemple le plus intéressant de l'architecture de terre dans mon département.Les murs sont très très épais, puisque bon le propriétaire nous a montré qu'au pied des murs, on était presque à 2,80 m d'épaisseur.Et sous la partie en encorbellement, on se retrouve en définitive au niveau presque de 2 m à 1,80 m d'épaisseur.Donc cette structure de pisé est très très importante.Et là-dessus, on a posé une structure en colombage et torchis,Disons qu'il serait très intéressant d'étudier ce patrimoine et faire même à la limite une démarche de classement.
(Musique)