Les droits d’une conjointe d’artisan
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Résumé
Michèle Barreau partage les responsabilités de son mari artisan-menuisier. Elle évoque l’apprentissage de son métier, son inscription au registre des métiers, et le régime légal des conjointes d'artisans, qui a évolué depuis une loi de juillet 1982. Elle enjoint les femmes à se renseigner sur leurs droits. Son mari, Laurent Barreau, souligne l’aide précieuse qu'apporte sa femme dans l'entreprise.
Date de publication du document :
14 sept. 2021
Date de diffusion :
30 avr. 1987
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Contexte historique
ParProfesseure de lettres, histoire et géographie en lycée professionnel
Publication : 14 sept. 2021
Longtemps, les conjoints d’artisans, souvent des femmes, sont restées des travailleuses invisibles. Les femmes d’artisans étaient considérées comme des aides familiales, sans profession déclarée. Comme cette relation professionnelle s’effectuait en dehors de tout cadre juridique, les conjointes d’artisans ne pouvaient prétendre à une quelconque rémunération ou à une protection sociale. Cette situation de dépendance économique pouvait conduire à des situations dramatiques en cas de veuvage ou de divorce et maintenait les femmes mariées sous la tutelle de leur mari.
Une première étape législative est franchie avec la loi du 10 juillet 1982 qui clarifie la situation des conjoints d’artisans et de commerçants. Le conjoint qui le souhaite peut alors choisir entre trois statuts : conjoint collaborateur, conjoint salarié ou conjoint associé. Mais le caractère facultatif de ce choix et la lente prise de conscience chez les artisans eux-mêmes rendent la loi peu efficace. En 2004, on estime que 20 % seulement des conjoints d’artisans ont choisi un statut juridique, alors que 80 % des conjoints travaillent dans l’entreprise.
La loi du 2 août 2005 (loi dite en faveur des PME) vient corriger cette faiblesse en contraignant les conjoints d’artisans à choisir obligatoirement l’un des trois statuts.
La reconnaissance du travail des femmes d’exploitants agricoles a suivi la même trajectoire, renforcée par les transformations de l’agriculture et les mouvements féministes. Il faut pourtant attendre 1980 pour que soit créé le statut de « co-exploitante agricole », puis 1985 pour l’exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL). Mais c’est la loi d’orientation agricole en 1999 qui institue juridiquement le statut de conjoint-collaborateur qui marque le véritable tournant dans la reconnaissance des femmes dans l’agriculture.
Éclairage média
ParProfesseure de lettres, histoire et géographie en lycée professionnel
Le reportage est diffusé en 1987 au journal régional de France 3, soit cinq ans après la mise en œuvre de la loi du 10 juillet 1982 qui laisse la possibilité aux conjoints d’artisans de choisir un statut.
Les journalistes consacrent le reportage à Michèle Barreau, femme d’un artisan-menuisier installé à Mauvezin. Comme de nombreuses épouses d’artisans, Michèle Barreau a longtemps travaillé aux côtés de son mari, en plus d’élever leurs deux filles, sans reconnaissance particulière. Après le vote de la loi de 1982, elle fait le choix d’adopter le statut de collaboratrice : elle ne perçoit pas de salaire mais ce statut lui procure un droit de gestion dans l’entreprise ainsi que des droits sociaux (cotisations retraite, maladie, allocations en cas de maternité…).
L’interview de Michèle Barreau renvoie l’image d’une femme forte, indépendante et cultivée. Quand elle évoque les avancées de la loi de 1982, elle regrette que les conjointes d’artisans ne s’en soient pas saisies comme elle. C’est une femme active et moderne, qui a conscience des drames qui peuvent se produire pour les travailleuses invisibles en cas de veuvage ou de divorce.
Quand la journaliste interviewe son mari, il reconnaît qu’il doit le développement professionnel de son entreprise à la collaboration avec son épouse. En plus d’avoir appris les gestes du métier, elle prend en charge une partie non négligeable de la gestion de l’entreprise.
De nombreux plans sont ainsi consacrés à montrer Michèle Barreau travaillant, sur une machine à écrire ou un minitel. Elle occupe aussi une place centrale dans la gestion du personnel, mais comme le dit son époux, elle a assez de personnalité pour ne pas se laisser écraser
dans cette entreprise où ne travaillent que des hommes.
Le reportage s’achève avec la voix-off de la journaliste qui rappelle l’importance, pour les femmes conjointes d’artisans, de s’informer sur leurs droits, de les faire reconnaître pour se protéger. Michèle Barreau a donc valeur d’exemple à suivre.
La journaliste conclut le reportage avec une prise de position féministe : Quoi de plus naturel quand on fait la moitié du travail ?
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Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Jean-Marc Morandini
Comment seconder son mari, partager ses responsabilités, faire son secrétariat et beaucoup d’autres choses sans être reconnu par l'État.Eh bien tout simplement en étant femme d’artisan.En effet, jusqu’en 1982, celles-ci vivaient dans l’ombre de leurs conjoints.Il a fallu beaucoup de pression de leur part pour que le gouvernement s’intéresse à leur cause et les autorise à se faire déclarer.C’est le cas de Michèle Barreau qu’ont rencontré Hélène Erlingsen et Jean [Torchio].
(Bruit)
Hélène Erlingsen
Avant juillet 82, être femme d’artisan n’était pas une profession.Dans l’ombre de leurs époux, des milliers de femmes cumulaient deux fonctions :celles de collaborateur dans la société, et de maîtresse de maison.Des journées très longues que Michèle vit depuis 25 ans, partageant les responsabilités de son mari, Laurent, artisan menuisier, tout en élevant leurs deux filles.
Michèle Barreau
Il a fallu que je me batte à ce nouveau travail, c’est-à-dire aller travailler avec lui, voir comment il s’y prenait, comment il travaillait avec les machines ;l’aider même à tenir les morceaux de bois, lui faire passer des outils pour comprendre techniquement le terme même lorsqu’il faisait par exemple des fenêtres,savoir ce que c’était comme montant, une traverse, des petits bois.Mon mari a souhaité que je me fasse inscrire sur le registre des métiers avec lui.La loi n’est passée qu’en 82, mais déjà en 80 les conjoints pouvaient se faire inscrire dans la chambre de métier, dans la chambre de commerce, je crois.
Hélène Erlingsen
Depuis 82, pour faire reconnaître leur statut, les femmes d’artisan ont trois possibilités, salariée, associée, ou collaboratrice, ce qu’a préféré Michèle qui ne veut pas percevoir de salaire de la société.
Michèle Barreau
Maintenant, je dis que déjà depuis la loi de 82 il y a bien des choses qui se sont mises en place mais le drame c’est que les femmes elles-mêmes n’en ont pas pris conscience.
Hélène Erlingsen
Alors, quels sont leur risques ?
Michèle Barreau
Alors leurs risques, eh bien, c’est de voir des femmes se trouver dans des situations difficiles.Admettons qu’elles arrivent à la fin de leur vie et je ne leur souhaite pas, mais qu’il y ait un divorce, qu’il y ait un veuvage, et bien ces femmes se trouvent absolument bloquées.
Hélène Erlingsen
Les avantages de ces statuts, une protection sociale en cas de changement familial.Un droit à la retraite par des cotisations et enfin une participation directe est reconnue dans l’entreprise.Désormais Michèle peut représenter son mari dans tous les organismes professionnels.Quant à Laurent, il reconnaît que sans l’aide de sa femme, il n’aurait pas envisagé l’agrandissement de la société.
Laurent Barreau
Il est certain qu’elle aide beaucoup dans l’entreprise pour le développement, du point de vue de prendre des salariés et tout, parce que ça coûte beaucoup de temps.
Hélène Erlingsen
Vous voulez dire que si vous n’aviez pas travaillé avec votre femme vous n’auriez pas embauché cinq personnes ?
Laurent Barreau
Non, c’est certain.Chacun travaille dans le même but.Alors je ne vois pas que, il y ait un gendarme, qu’il y ait un exécutant.Je pense qu’il devrait normalement, chacun devrait prendre le travail d’une façon librement consenti.Bon, ce n’est pas toujours l’idéal des fois, il y en a un qui n’a pas envie de prendre tout à fait la même orientation que l’autre, on s’explique.Mais enfin elle a cette personnalité pour ne pas se laisser écraser.
Hélène Erlingsen
Preuve est faite que pour bien gérer une entreprise avec son conjoint, il faut faire reconnaître ses droits.Michèle n’a pas hésité à s’informer.À la direction de l’artisanat, à la chambre des métiers et aux délégations régionales des droits de la femme.Désormais, tout geste qu’elle fait, toute initiative qu’elle prend, sont protégés par la loi.Quoi de plus naturel quand on fait la moitié du travail.
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