Portrait de Monseigneur Matagrin
Notice
Monseigneur Gabriel Matagrin, évêque de Grenoble, est un personnage important du paysage français. Il s'intéresse depuis toujours aux problèmes sociaux et aux soulèvements qui ponctuent l'actualité.
- Rhône-Alpes > Isère > Grenoble
Éclairage
La diffusion au cours du Journal télévisé régional de ce reportage consacré à Mgr Gabriel Matagrin (1919-2004), évêque de Grenoble de 1969 à 1989, est une manière de reconnaître l'importance prise alors par cet évêque atypique soucieux de promouvoir une Église catholique engagée dans la société et décidée à promouvoir les valeurs évangéliques. Telle est la substance du message que l'intéressé délivre au cours d'une interview dans laquelle il insiste cependant sur le caractère spirituel de la révolution pacifique qu'il souhaite. Il la décrit comme une transformation des comportements en vue de faire triompher la justice au niveau national et international. Mais c'est aussi, pour lui, l'occasion de répondre à ses détracteurs qui l'accusent d'être un évêque progressiste et politique qui contribue à engager une partie des catholiques du côté d'une gauche en pleine recomposition après 1968. L'ouverture de la séquence par de la musique religieuse, le passage par le monastère des sœurs dominicaines cloîtrées de Chalais au-dessus de Voreppe (Isère) viennent renforcer un discours qui se veut un témoignage commandé avant tout par ses convictions de croyant et ses responsabilités d'évêque.
Né dans les Monts du Lyonnais, en terre de chrétienté, scolarisé chez les jésuites à Lyon, Gabriel Matagrin est marqué par son adhésion à la Jeunesse Etudiante Chrétienne (JEC) et la lecture de la revue Esprit. Il entre au Séminaire diocésain Saint-Irénée de Lyon en 1940. Bien qu'attiré par un ministère pastoral et l'action de terrain, ses dispositions intellectuelles poussent ses supérieurs à lui faire préparer une licence de philosophie. Devenu prêtre de paroisse à la Croix Rousse et aumônier de la JEC en milieu scolaire, il s'impose dans le clergé lyonnais comme le spécialiste des questions sociales. Aumônier de la Chronique sociale, que le commentaire qualifie de « laboratoire de réflexion chrétienne », il fréquente et se lie à de nombreux dirigeants du monde politique, économique (Antoine Riboud fondateur du groupe Danone), associatif et universitaire. Enseignant à la faculté catholique de Lyon (la Catho) et vicaire général du diocèse, il joue un rôle important dans les nouvelles orientations prises par le diocèse au début des années 1960. Fervent partisan de l'aggiornamento voulu par Jean XXIII avec le concile Vatican II, il y participe en qualité d'expert (1963) puis d'évêque auxiliaire de Lyon (1965).
Par la suite, il ne cesse de défendre ardemment des réformes qu'il juge indispensables pour mettre le catholicisme en phase avec les mutations culturelles dont il a mesuré l'ampleur comme accompagnateur de la JEC et de la Mission étudiante. Il accueille mai 1968 avec sérénité et rédige pour ses confrères de l'épiscopat un rapport incitant à prendre au sérieux les aspirations exprimées par la jeunesse. Nommé évêque de Grenoble le 19 septembre 1969, il s'efforce de mettre en œuvre ses idées tant dans son diocèse, où il procède à une vaste consultation, qu'à Rome où il prône sans succès une évolution du statut des prêtres lors du synode des évêques de 1971. Porté à la tête de la Commission sociale de l'épiscopat français, il tente de redéfinir les relations traditionnelles du catholicisme et de la politique. Un an après cet interview, il sera le principal rédacteur du rapport Politique, Église et foi qui reconnaît la légitimité du pluralisme des choix politiques pour les catholiques, dès lors qu'ils ne sont pas contradictoires avec les valeurs chrétiennes.
Affaibli par la maladie, attaqué par les catholiques traditionalistes et intégristes, et mal à l'aise devant certaines orientations du pontificat de Jean-Paul II, il prend sa retraite en 1989 et se retire près de Lyon.
Bibliographie :
- Gabriel Matagrin, Le chêne et la futaie. Une Église avec les hommes de ce temps (entretiens avec Charles Ehlinger), Paris, Bayard, 2002.