Le Centre national d'Art contemporain de Grenoble

25 avril 1986
03m 37s
Réf. 00035

Notice

Résumé :

Reportage sur l'ouverture prochaine du Centre National d'Art Contemporain de Grenoble. Ce nouveau lieu d'exposition ne portera pas préjudice au musée de Grenoble car à l'inverse de ce dernier, riche d'une importante collection permanente, le CNAC ne proposera que des expositions temporaires.

Date de diffusion :
25 avril 1986

Éclairage

Les centres d'art sont apparus à la fin des années 1970 et sont dédiés à la création actuelle. Ouvert en 1989, celui de Grenoble est un des premiers. Il est né par décision de l'État et de la Ville de Grenoble. Il s'agit d'une association loi 1901 subventionnée par le ministère de la Culture et de la Communication via la Direction régionale des affaires culturelles Rhône-Alpes, le Département de l'Isère et la Ville de Grenoble. Comme le Centre national d'art contemporain de la Villa Arson à Nice créé en 1986, il a pour vocation d'organiser des expositions temporaires. Ses objectifs ne recouvrent pas ceux du Musée de Grenoble qui constitue des collections. L'école du Magasin, fondée en 1987, dispense une formation professionnelle internationale aux pratiques curatoriales. La politique d'exposition est déterminée par le directeur du centre et son équipe. Des artistes jouissant d'une grande notoriété - comme Daniel Buren - ont exposé au Magasin, mais la programmation ambitionne aussi de faire découvrir des artistes jeunes ou confirmés dont l'œuvre a une audience internationale encore restreinte aux spécialistes de l'art contemporain.

Le Magasin est implanté dans un ancien quartier industriel à l'ouest du centre historique. Il dispose d'un très vaste espace puisqu'il est installé dans un ancien atelier de chaudronnerie d'une surface de 3 000 m². Cette halle avait été construite par les ateliers Gustave Eiffel pour l'exposition universelle de 1900 à Paris. Hippolyte Bouchayer, cofondateur d'une entreprise de conduites forcées, l'avait rachetée, afin de la démonter et de la transporter à Grenoble. Grande halle des machines de l'usine, elle servait dans les derniers temps de son existence industrielle de magasin, un nom qui a été conservé. Cette dénomination fait aussi référence à l'exposition Magasin organisée par Vladimir Tatline du 19 mars au 20 avril 1916 dans un commerce vacant du centre-ville de Moscou. Il s'agissait de tenter de sortir l'art de ses chapelles élitistes, de le confronter à la réalité dans un lieu inhabituel et de le présenter directement au public.

Patrick Bouchain (né en 1945) a été chargé de la reconversion de l'édifice. Il a transformé de nombreux locaux industriels en lieux culturels dédiés aux arts plastiques et au spectacle vivant. Le très grand volume de la halle (900 m², 70 mètres de long et 20 mètres de hauteur) a été préservé en laissant la charpente métallique apparente. Celle-ci a d'ailleurs fait l'objet d'une restauration en 2005. Dénommée la Rue, elle permet d'accueillir des pièces ou des interventions in situ de très grandes dimensions. Un autre espace a été pris sur la nef latérale orientale de la halle. Ces « galeries », d'une surface de 860 m², sont modulables et constituent des espaces d'exposition plus traditionnels et plus confortables. Le caractère industriel du lieu est toujours très présent créant une analogie implicite entre le processus de fabrication industrielle et celui de la création artistique. Patrick Bouchain considère d'ailleurs que les chantiers qu'il conduit sont en eux-mêmes des projets culturels. Il en résulte une architecture très ouverte et peu institutionnelle. Par cette absence de finitude et de détermination, elle contribue à la créativité des acteurs comme à l'ouverture d'esprit des visiteurs.

Laurent Baridon

Transcription

Journaliste
Moins de 24 heures avant l’ouverture officielle du centre, le dernier sprint pour tout le monde. Le chrono a démarré il y a six mois, 180 jours pour transformer une usine désaffectée en rond point de l’art contemporain. Un lieu d’échange et de création pour des artistes venus du monde entier.
Intervenant 1
Une exposition temporaire, c’est très différent d'un musée. Je crois que ce lieu se propose de faire six expositions annuelles mais certainement pas de collection. Dans cette ville il y a un merveilleux musée avec de très belles collections; ce serait assez étrange qu’on ait l’idée de faire deux collections parallèles.
Journaliste
A aucun moment, le CNAC ne peut faire ombrage au musée ?
Intervenante
Je ne pense pas, d’ailleurs il y a eu d’autres équipements culturels dans le passé, je pense en particulier à la Maison de la Culture, qui ont organisé des expositions et cette complémentarité s’est toujours très bien déroulée.
Journaliste
Le musée grenoblois, envié par toutes les villes de France, camouflé dans le carré de la Place de Verdun. Une institution culturelle née en 1920 avec une coexistence amicale entre moderne et classique, toutes les époques de l’art sont présentes. Avec dans ses fondations pourtant déjà des relents d’audace. C’est le premier musée d’art moderne créé en France, au fil des années, la politique d’acquisition des œuvres est exemplaire. Les grands noms du 20e siècle s’alignent, Picasso, Matisse, Modigliani, Paul Klee, Calder et beaucoup d’autres. La venue du CNAC ne remettra pas en question cette politique de gestion des œuvres, bien au contraire. En 90, le musée grandira, devenu le MIN, un musée national d’envergure. C’est pourtant au niveau des expositions temporaires que l’édifice peut trembler, même si l’on souhaite une complémentarité entre le centre et le musée. Ici par exemple, l’exposition Penone, l’artiste italien attire un public de connaisseurs qui en général connaît parfaitement les autres œuvres.
Intervenante
Je crois que le public vient volontiers pour l’art contemporain, puisque le musée de Grenoble est très connu pour sa collection d’art contemporain. Ceci dit, la collection d’art ancienne est une très belle collection et je crois qu’en fait, le public apprécie les deux.
Inconnue 1
Alors l’ancien évidemment, c’est plus facile à percevoir mais on est justement en train de découvrir le moderne. Et on nous l’explique afin de le comprendre parce que c’est un peu plus ardu.
Inconnue 2
Je pense que c’est un musée qui évolue beaucoup probablement. Je l’ai visité il y a 15 ans. Intéressant sûrement.
Journaliste
Est-ce que vous avez entendu parler du CNAC ?
Inconnue 2
Oui. Oui, oui. Oui, oui. Euh oui. Effectivement.
Journaliste
Qu’est-ce que c’est que le CNAC ?
Inconnue 2
Ah, la question piège. CNAC, le CNAC. Art contemporain, Quelque chose d’art contemporain.
Journaliste
On peut parler un petit peu du nom, le CNAC, c’est pas un très joli nom. Vous appelez ça aussi le magasin ?
Intervenant 1
Vous l’appelez le CNAC vous, nous on l’appelle Centre National d’Art Contemporain de Grenoble. Puisqu’il est à Grenoble et tant mieux. Et nous l'appelons Magasin pour éviter effectivement que le CNAC comme ça soit confondu avec tous les autres CNAC, il y en a d’autres. Il y en a deux autres très importants. Et donc Beaubourg, bien évidemment, la Villa Arson à Nice, et il y en a aussi d’autres, très prestigieux, le Centre National d’Arts Primaires à Lyon et à Paris, donc d’autres CNAC. Alors c’est un CNAC certes, mais nous l’appelons le Magasin ou le Centre National d’ArtsContemporain.
Journaliste
Les images que vous voyez actuellement du Centre National sont une infime partie de cette immense halle, il nous a été impossible de vous montrer avant tout le monde l’intérieur du bâtiment, tout simplement parce que Daniel Buren y a créé une œuvre magistrale qui ne sera dévoilée que demain. Une œuvre qui remplit l’espace entier, aménagé depuis 6 mois par l’architecte Patrick Bouchain.