Le vin de Condrieu
Notice
Le vin de Condrieu s'élabore sur des coteaux escarpées au sud de Lyon dans la vallée du Rhône. Marcel Guigal, un viticulteur, nous parle du raisin, du terroir, et des vendanges.
- Rhône-Alpes > Rhône > Condrieu
Éclairage
Depuis l'époque romaine, le vignoble suburbain de Vienne occupe les côteaux abrupts qui se déploient sur la rive gauche du Rhône depuis Saint-Cyr au nord à Saint-Pierre de Bœuf et Limony au sud. Les communes ayant les plus grandes surfaces encépagées, Ampuis et Condrieu, sont exposées au sud-est. Ce sont les territoires des appellations d'origine contrôlées (AOC) Côte Rôtie et Condrieu.
Le reportage présente les vendanges chez des viticulteurs de l'appellation Condrieu, la famille Guigal, par ailleurs producteurs sur d'autres terroirs AOC, Côtes du Rhône, Côte Rôtie, Saint-Joseph et Hermitage, et plus au sud, Châteauneuf du Pape, dans le Vaucluse et Tavel dans le Gard.
Le vin de Condrieu est directement lié à un cépage qui est inséparable de la réputation de ce vin, le viognier. Ce cépage blanc, sans doute originaire du nord de la vallée du Rhône, assez répandu jusqu'à la crise viticole due aux attaques du phylloxera pendant toute la fin du XIXe siècle, a failli disparaître au XXe siècle. Il restait à Condrieu moins de 10 hectares complantés en viognier à la fin des années 1960. Depuis le cépage s'est répandu très au delà de cet espace et l'on trouve aujourd'hui des vins issus de ce cépage dans le sud de l'Ardèche, en Languedoc ou dans le sud-ouest. Surtout, il a franchi les frontières de l'hexagone et même celles de l'Europe puisque l'on produit aujourd'hui du viognier en Californie ou en Afrique du Sud.
Sur le territoire de Condrieu, le viognier est cultivé sur des pentes très raides dont la fertilité est limitée et qui nécessitent l'entretien de nombreux murets, les chaillées ; cela entraîne des rendements faibles et des coûts de revient élevés.
Ce reportage de 2005 donne quelques indices d'une évolution favorable qui contraste avec les conclusions assez pessimistes que l'on pouvait tirer à la fin des années 1970. Les conditions de commercialisation, qui avaient un temps pénalisé une production assez confidentielle – dans les années 1960, l'un des rares très grands restaurants à servir du Condrieu n'était autre que la Pyramide à Vienne... – du fait de la difficulté d'accès au marché parisien, ont évolué favorablement.
La société vigneronne, numériquement faible, a su intégrer la modernité pour préserver la tradition (dans des domaines que recommandait l'article de 1978, cité en référence). Au début du reportage, on distingue les murets qui séparent les terrasses et l'un des vendangeurs, un porteur, marche sur l'un d'entre eux. Le sommet est manifestement consolidé par un enduit. L'entretien s'en trouve donc réduit et cela a permis d'améliorer, comme la restructuration des parcelles, les conditions d'accès au vignoble. Ces images du vignoble montrent bien les façons culturales exigeantes et définies par les décrets définissant l'AOC qui précisent la manière de tailler la vigne (que le reportage ne peut montrer) ou la hauteur des échalas qui la soutiennent (très visible dans le reportage).
Enfin, et c'est sans doute l'essentiel, les rendements ont été améliorés. Le sol d'arène granitique, particulièrement pauvre, contribuait à la modicité des rendements d'un cépage déjà peu productif. Par ailleurs le vignoble était constitué de ceps atteints par des virus qui entraînaient une forte coulure de la vigne : cela signifie que les fleurs perdaient leur pollen, ne pouvaient donc pas être fécondées et produire des grains. On recommandait à la fin des années 1970, l'assainissement de l'encépagement en remplaçant ce type de plants par des clones fournis par un centre de recherche. Dans son article de 1978, Rolande Gadille indiquait que le rendement moyen du viognier à Condrieu était de 15 hl à l'hectare alors que le décret définissant l'AOC autorisait 25 hl à l'hectare. À titre de comparaison, l'appellation Beaujolais-Village, avec le cépage gamay, peut atteindre 60 hl à l'hectare.
Dans le reportage, sont évoquées les parcelles réunies sous le nom de Doriane. Le producteur annonce, pour le millésime 2005, que l'âge moyen des vignes est de 25 ans et que le rendement est de 35 hl, supérieur donc au maximum autorisé pendant les années 1970. Ce maximum a été porté à 41 hl et sur la Doriane, il varie selon les millésimes de 25 (rarement) à 35 ou 37 (fréquemment).
Ainsi, ce vignoble de prestige a su maintenir une production de grande qualité en bannissant certains procédés, qui seraient d'ailleurs difficiles à utiliser, comme la machine à vendanger. La réglementation impose aussi de respecter le « paysage caractéristique du vignoble », mais les producteurs ont su aussi s'adapter au marché et les atouts de la recherche agronomique leur ont permis de retrouver une viabilité économique.
Bibliographie :
- Maud Hirczak, Le co-construction de la qualité agroalimentaire et environnementale dans les stratégies du développement territorial, une analyse à partir des produits de la région Rhône-Alpes, thèse de géographie, Université Joseph Fourier, Grenoble, 2007
- Rolande Gadille, « L'héritage d'une viticulture antique, vignes et vins de Côte Rôtie et Condrieu », Revue de géographie de Lyon, 1978, Vol. 53 n°1, pp. 7-22.
Pour plus d'information, voir le site concernant le domaine Guigal et le décret n° 2009-1320 du 28 octobre 2009 relatif aux appellations d'origine contrôlées « Château-Grillet », « Condrieu », etc.