Portrait d'Antoine Pinay
Notice
Portrait d'Antoine Pinay, industriel de Saint-Chamond, qui entra en politique comme maire de cette ville, devint député, ministre puis président du Conseil. En 1958, alors ministre des Finances il se voit confier la tâche du passage au nouveau franc.
Éclairage
Au JT de 13H du 13 décembre 1994, le journaliste Daniel Bilalian présente à l'occasion de la mort d'Antoine Pinay, une rétrospective sur le parcours de « l'homme au chapeau », symbole du français moyen, industriel et maire de Saint-Chamond dans la Loire pendant plusieurs décennies.
Né à Saint-Symphorien-sur-Coise dans le Rhône dans une famille de chapeliers, Antoine Pinay fait ses études chez les religieux, au collège mariste de Saint-Chamond. Après la Grande Guerre, au cours de laquelle il est blessé, il dirige la tannerie de son beau-père. Il est élu maire de Saint-Chamond en 1929 - mandat qu'il conserve jusqu'en 1977, conseiller général en 1934, député de la Loire en 1936, sénateur de 1938 à 1940. Le 10 juillet 1940, il vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, et appartient au Conseil national en 1941. C'est pour cette raison qu'à la Libération il est écarté de ses fonctions municipales entre 1944 et 1947. Il retrouve son siège de député de 1946 à 1958 et préside le Centre national des indépendants et paysans. Après avoir occupé plusieurs ministères (Affaires économiques, des Travaux publics, Transports et Tourisme), il est président du Conseil (1953-1953) : en 1952, il lance un premier emprunt (1952-1958), garanti sur le cours de l'or et dispensé des droits de succession et de donation, qui est un succès. Faisant partie de la cohorte des ministres « non gaullistes », il devient ministre des Finances du général de Gaulle (de juin 1958 à janvier 1960). Antoine Pinay, s'était rendu à Colombey-les-Deux-Églises en mai 1958. Il voyait en de Gaulle un arbitre, seul capable d'éviter une guerre civile et s'est rallié alors à son investiture comme président du Conseil. Devenu président de la République, de Gaulle compte sur la popularité de l'homme au chapeau rond auprès des petits épargnants pour faire passer des mesures impopulaires prises dans le cadre du redressement économique. Nommé pour rétablir la confiance, Antoine Pinay, lance en 1959 un deuxième emprunt, exonéré des droits de mutation et indexé sur l'or qui rencontre un succès encore plus grand que celui de 1952. L'objectif du général de Gaulle, était, au-delà de la restauration nécessaire des finances publiques, de conforter l'influence de la France et de lui redonner, pour cela, une économie saine et forte : il place auprès de Pinay un comité d'experts animé par le libéral Jacques Rueff. L'assainissement des finances publiques exige une dévaluation réussie qui permette d'aborder dans les meilleures conditions l'ouverture des frontières prévue par le Marché commun. Le franc est dévalué de 17,55 %. De Gaulle, qui sait que la monnaie relève aussi de la psychologie, entend couronner l'opération de redressement du pays par la création « d'une nouvelle unité monétaire », le « nouveau franc» ou « franc lourd », qui vaudra exactement 100 anciens francs. Les résultats, rapides, sont attribués en grande partie à Antoine Pinay. La balance commerciale devient excédentaire, la France rembourse l'intégralité de sa dette. La démission d'Antoine Pinay, en janvier 1960 s'explique par ses différends avec le Premier ministre Michel Debré. Convoqué par de Gaulle le 11 janvier 1960 après des interventions jugées inopportunes sur la politique étrangère, Pinay démissionne le jour-même.
L'émission n'évoque pas les raisons pour lesquelles Antoine Pinay ne s'est pas présenté aux élections présidentielles de 1965 et de 1969 comme certains représentants de la droite le lui demandaient : sa biographe, Sylvie Guillaume qui a publié en 1984 Antoine Pinay ou la confiance en politique, a recueilli les confidences de l'un des collaborateurs d'Antoine Pinay : « Il m'a expliqué que les gaullistes avaient menacé de sortir des dossiers impliquant Pinay dans des ballets roses. » L'ancien président du Conseil était effectivement réputé pour aimer les très jeunes femmes. L'émission n'évoque pas non plus l'action du président du Conseil général de la Loire, à la tête du conseil d'administration de la Maison maternelle de Saint-Étienne, institution qui recueillait les « filles-mères » (mères célibataires) et les femmes désirant accoucher dans des conditions de discrétion.
Jusqu'à sa mort, celui que l'on surnomme le « sage de Saint-Chamond » sera régulièrement consulté par de nombreux hommes politiques qui font appel à son bon sens et à son expérience. Il joue le rôle de conseiller, celui d'un « notable de province conservateur ».