Le port de Roanne

17 novembre 1970
04m 33s
Réf. 00243

Notice

Résumé :

Le port de Roanne voit son trafic diminuer, s'il a connu son heure de gloire avec le charbon, aujourd'hui il périclite. Actuellement le déplacement du port, afin de se situer au plus près des entreprises, est à l'étude.

Date de diffusion :
17 novembre 1970
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Éclairage

L'activité commerciale de Roanne a longtemps été liée au dynamisme de son port fluvial. Ainsi, de nombreux témoignages attestent d'une navigation sur la Loire dès l'Antiquité puis au Moyen Âge. Il est également question de l'important trafic que connaissait la cité aux XVIIe et XVIIIe siècle, notamment du fait de la construction du canal de Briare (1642) permettant de relier le bassin de la Seine à celui de la Loire.

Mais c'est aux XIXe et XXe siècles que le port roannais a connu son apogée. En 1838, le canal de Roanne à Digoin est ouvert. Long de 55 kilomètres, parallèle à la Loire mais mieux adapté au trafic d'alors, il permet à la ville d'être connectée au « canal du centre » (joignant Digoin à la Saône et au-delà au réseau fluvial de l'Est) et au Bassin parisien (par le canal latéral et le canal de Briare). Le port roannais est par la suite raccordé à la voie ferrée (1863). Puis le canal est élargi et approfondi entre 1889 et 1904 afin de recevoir des péniches de 250 à 300 tonnes et de 38,50 mètres de long. Le port connaît alors un important développement : le trafic du canal, qui était de 8 905 tonnes en 1865, atteint 150 000 tonnes en 1875, 405 000 en 1903 et près de 500 000 tonnes en 1918. Quant au quartier du Bassin, il devient un quartier d'intenses activités : de nombreuses structures de déchargement et des entrepôts s'y installent. On y traite les pondéreux, les charbons de Saint Etienne et du Creusot, les produits pétroliers, les céréales, le papier, les cotons bruts et filés, les vins, les eaux minérales, les pyrites. Bref les matières liées au dynamisme d'une cité dotée d'un arrière pays agricole et dans laquelle les activités industrielles sont alors nombreuses : production textile (tissage et bonnèterie), industrie papetière (papèterie Navarre), métallurgie (présence de l'Arsenal à partir de 1916) raffinerie pétrolière du Midi. En 1917, en pleine expansion, le port est doté d'un second bassin à 1200 mètres du port : le Bassin d'Oudan. En 1936, le port connaît son maximum de tonnage avec 545 000 tonnes de marchandises débarquées ou embarquées.

L'immédiat après Seconde Guerre mondiale voit une certaine reprise de l'activité portuaire. Cependant, le trafic connaît, dans les années 1960, une nette régression. Celle-ci est révélatrice de la crise économique multiforme que connaît la région roannaise à partir de cette époque. En effet, au milieu des années 1960, l'industrie textile entre dans un profond marasme et voit les suppressions d'emplois se multiplier. En 1971 les papèteries Navarre ferment. Puis l'Arsenal est à son tour touché par la redéfinition de la politique d'armement française. Les 300 000 tonnes de trafic portuaire de 1958 deviennent alors 92 000 tonnes en 1970 puis 15 000 tonnes en 1989. Ce reportage est un bon témoignage du désarroi qui touche les décideurs roannais au début des années 1970. Comme pour d'autres structures portuaires de la région, l'espoir dans l'ouverture du canal Rhin-Rhône est ici mis en avant (on sait que ce projet a été abandonné en 1997), tout comme celle d'une connexion « Seine-Rhône ».

Face aux coûts d'exploitation trop élevés d'une structure devenue non rentable, la Chambre de Commerce et d'Industrie de Roanne a décidé de fermer le port commercial en 1992. Le quartier, devenu friche industrielle, a alors été requalifié. Il a été transformé aujourd'hui en une aire de promenades et de loisirs avec espaces de jeux, terrains de sport et zone d'amarrage de navires de plaisance.

Nicolas Rocher

Transcription

(Musique)
Journaliste
Le port de Roanne, vous connaissez. Des quais déserts malgré de belles installations et un trafic qui baisse chaque jour pour laisser la place aux enfants et aux pêcheurs à la ligne. Et pourtant, nos arrières grands pères avaient vu grand. 800 mètres de quai, un bassin large de 80 mètres relié au fer et à la route. Un canal au gabarit de 30 mètres 50, en assez bon état aujourd’hui encore. Roanne a connu son heure de gloire avec le charbon. En 1936, le trafic dépasse les 500000 tonnes. Cette année, il n’atteindra sans doute pas les 100000. Vint la guerre et le début de la chute des arrivages et des expéditions. Disparu le charbon, terminé le tonnage.
(Musique)
Journaliste
Un responsable, sans grand moyen financier, Monsieur Cohen, l’ingénieur des Ponts et Chaussées. Il connaît bien lui les causes de la baisse du trafic.
Intervenant 1
Les deux causes principales de la suppression, de la diminution du trafic, c’est d’une part la suppression des transports de charbon à destination des industries de Roanne à partir de la région du Creusot, et d’autre part, la politique des stocks des entreprises qui ont intérêt maintenant à avoir les stocks minimum. C’est-à dire que le délai actuel de la [Inaudible] ne permet pas d’avoir suffisamment de retard.
(Musique)
Journaliste
Et il faut forcément maintenir le port en service parce qu’il alimente la voie d’eau jusqu’à Nevers. Un avis autorisé, celui d’un utilisateur, Monsieur Lamarque, Directeur d’une compagnie de navigation à la recherche lui aussi de nouveaux trafics.
Intervenant 2
Actuellement il reste en premier lieu le trafic des verres cassés, ce sont des marchandises qui viennent en majeure partie de la région parisienne par péniche et qui sont transbordées sur camion à destination des verreries du sud du département, Saint-Romain-le-Puy, Veauche en particulier. Il y a également un nouveau trafic d’aliments de bétail sous forme de tourteaux qui viennent en majeure partie des USA via Anvers ou Rotterdam, et qui sont destinés à une importante usine de l’arrondissement de Roanne, à Saint Martin d’Estreaux. C’est un trafic fort intéressant et qui semble devoir se développer parce que il est question que d’autres usines s’implantent dans le département. Des usines similaires s’implantent dans le département de la Loire.
Journaliste
Pour sauver le port, un projet. L’implanter sur la future zone industrielle. Mais est-il bien raisonnable de faire un tel investissement sans être sûr de voir s’y installer des industries ? Alors quelles sont les raisons de ce projet ?
Intervenant 1
C’est surtout pour des raisons d’urbanisme car la ville de Roanne descendant depuis les anciens emplacements, arrive aujourd’hui pratiquement au contact du port, rendant absolument impossible le, toute possibilité d’aménagement de terre-plein dans le futur.
Journaliste
Un responsable professionnel averti Louis [Dubruel] cite souvent l’exemple de la Belgique, de l’Allemagne, de la Hollande, qui modernisent sans cesse leur réseau fluvial, l’un des premiers du monde aujourd’hui en trafic et rentabilité. Alors pourquoi ne pas réaliser, mais très vite, Rhin-Rhône à gabarit international, Seine-Rhône à gabarit européen et ainsi, faire revenir les industriels à Roanne.
(Musique)
Intervenant 1
C’est la raison pour laquelle on a fait une recherche d’un nouvel emplacement dont les frais d’établissement soient réduits au strict minimum de façon à faire face dans une première phase au trafic actuel et avec la possibilité au fur et à mesure de l’augmentation du trafic, de faire face, d’élargir et d’augmenter les dimensions du port.
Journaliste
Donc vous pensez que le port de Roanne n’est pas encore mort ?
Intervenant 2
Je ne, je ne pense pas. Il nous reste tout de même quelques raisons d’espérer, notamment si, ce n’est pas pour l’immédiat mais enfin dans l’avenir, le canal de Roanne devient une antenne de la grande liaison fluviale Seine-Rhône, qui elle-même sera reliée aux grands axes métropolitains et européens.
(Musique)
Journaliste
César, avant d’édifier les villes, construisait des voies qui sont encore romaines. Aujourd’hui, peut-on espérer que les liaisons à grand gabarit permettront au port de Roanne de connaître un nouvel essor ? C’est un pari auquel il est difficile de répondre mais devant la grande misère du réseau fluvial français, il est hélas facile d’en douter.