Géologie du littoral
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Résumé
Le professeur Mattauer, spécialiste de l’étude de l’écorce terrestre, invite le spectateur à une « promenade géologique » sur les plages de Maguelone et des Aresquiers. En examinant les différentes variétés de galets, il en explique l’origine.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
27 avr. 1987
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Contexte historique
Parchargé de Recherche au CNRS, Laboratoire Géosciences Montpellier, Université de Montpellier-CNRS
Contrairement aux autres plages du littoral montpelliérain, essentiellement sableuses, les plages de Maguelone et des Aresquiers sont riches en galets. Ceux-ci sont de deux types : des galets « roulés », les plus nombreux, et des galets de « grès de plage » . Les galets roulés, de forme arrondie et à surface lisse, sont de natures très diverses. On trouve surtout des roches métamorphiques et volcaniques, la plus fréquente étant le quartzite, une roche métamorphique très compacte constituée de petits grains de quartz. L’origine lointaine de ces galets est attestée par leur nature : absentes dans la région proche, les roches de ce type sont par contre présentes dans les Cévennes et dans les Alpes. Formées à différentes périodes de la longue histoire géologique de ces régions, elles ont été portées en altitude lors de la surrection [1] des reliefs qui a débuté il y a environ 30 millions d’années. Arrachés à ces reliefs par l’érosion, les débris rocheux ont été transportés vers la mer par les rivières.
Les fleuves côtiers locaux ne transportant pas de galets jusqu’à la mer, c’est le Rhône qui les a amenés au large de la Camargue, de même que les petits grains de quartz constituant le sable des plages, le transport des galets se faisant principalement pendant les périodes de crue. Ces sédiments ont ensuite été transportés vers l’ouest par les forts courants se déplaçant parallèlement à la côte (dérive littorale), en particulier pendant les tempêtes, en ce qui concerne les galets, jusqu’à s’accumuler sur le rivage montpelliérain. Les formes arrondies et les surfaces lisses des galets résultent de leur usure par abrasion lors de ce long déplacement depuis les reliefs d’origine. Seuls les galets constitués par des roches très résistantes ont survécu au transport, ce qui explique l’abondance des quartzites alors que les roches moins résistantes (calcaires, grès) sont absentes ou rares.
L’identification de la nature des galets peut permettre de déterminer leur zone d’origine, parfois de façon très précise. Ainsi, on trouve sur les plages montpelliéraines quelques (rares) galets de variolite, une lave produite par des éruptions sous-marines au Jurassique, dans un océan aujourd’hui disparu, et présente actuellement dans la région de Montgenèvre, ce qui indique un transit par la Durance avant de rejoindre le Rhône.
Les galets de grès de plage sont de formes irrégulières et sont constitués de grès gris et de débris de coquilles. Contrairement aux galets roulés, ces grès de plage sont d’origine locale. Ils ont été formés par cimentation naturelle du sable par de la calcite (carbonate de calcium) à proximité du rivage, probablement il y a quelques milliers d’années à une époque où le niveau marin était plus bas de quelques mètres que de nos jours. Actuellement, ce grès constitue de petits reliefs sous-marins affleurant à quelques centaines de mètres au large et à une dizaine de mètres de profondeur, bien connus des plongeurs. Les galets sont des fragments arrachés à ces affleurements et ramenés sur les plages par les tempêtes. On notera qu’une autre catégorie de galets, mineure mais en quantité croissante, existe aussi, celle-là d’origine anthropique : débris de calcaires issus de digues, de béton…
Aux Aresquiers, les galets sont pratiquement le seul constituant de la plage (du moins ils l’étaient avant les récentes recharges artificielles en sable) car ce site correspond à un petit relief côtier dont la présence concentre l’énergie des courants et des vagues, en particulier lors des tempêtes. Cette haute énergie facilite le transport des galets mais empêche aussi le dépôt du sable qui est entraîné vers les plages voisines où l’énergie est moins forte, d’où la forte concentration des galets sur ce site particulier. À Maguelone, où l’énergie est moins forte, la plage est mixte, avec galets et sable.
Le professeur Maurice Mattauer (1928-2009) a effectué la plus grande partie de sa carrière à l’Université de Montpellier. Il était un géologue spécialisé en tectonique, c’est-à-dire l’étude de la structure de l’écorce terrestre et de ses déformations sous l’effet des forces internes qui l’animent. Promoteur de l’étude des structures géologiques à toutes les échelles, du microscope à la chaîne de montagnes, il a développé des approches originales pour l’interprétation des déformations du sous-sol terrestre. Spécialisé dans l’étude des chaînes de montagnes qu’il a parcourues aux quatre coins du monde, il a joué un rôle important pour faire le lien entre l’interprétation des structures géologiques et le cadre de dynamique globale fourni par la théorie de la tectonique des plaques à partir des années 1960.
[1] Soulèvement progressif d'une portion de l'écorce terrestre.
Transcription
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(Musique)
Yves Barbara
Professeur Mattauer, pourquoi sommes-nous venus en bord de mer commencer cette promenade ?
Maurice Mattauer
Parce que la Méditerranée va bientôt disparaître, bientôt à l’échelle géologique, dans quelques dizaines de millions d’années il y aura une chaîne de montagne à la place de la Méditerranée.
Yves Barbara
C'est une terrible nouvelle que vous nous annoncez là, pourquoi ça ?
Maurice Mattauer
C’est tout à fait habituel en géologie, l’Afrique se rapproche de l’Europe, comprime le territoire intermédiaire et va provoquer la formation d’une chaîne de montagnes.
Yves Barbara
Autrement dit, en géologie, la configuration du terrain - et en particulier la configuration des rivages - change constamment ?
Maurice Mattauer
Bien sûr, la mer va reculer, mais à certaines autres époques elle a avancé.Et une grande partie de la France a été couverte par la mer à différentes époques, 20 millions d’années, 100 millions d’années, 200, 300, 500 millions d’années.
Yves Barbara
Nous sommes environnés de cailloux, chacun de ces cailloux raconte une histoire.Ecoutez, j’en ramasse un, vous allez me dire de quoi il s’agit.
Maurice Mattauer
Il faut la regarder à la loupe, la lécher pour mieux faire l’observation.C’est une quartzite qui vient des Cévennes.Et c’est une roche marine, qui s’est déposée il y a quelque 400 millions d’années et qui a ensuite été prise dans la chaîne hercynienne, la vieille chaîne du Massif central.
Yves Barbara
Mais si je ramasse un autre caillou.Tenez, celui-ci par exemple.Pouvez-vous me dire d’où vient cette pierre ?
Maurice Mattauer
Ah ça c’est une pierre un peu particulière, c’est une roche volcanique qui vient des Alpes.C’est une roche volcanique qui s’est déposée dans le fond de l’océan alpin, car toutes les chaînes de montagnes les Alpes comme les autres dérivent d’océans dans un premier stade.
Yves Barbara
Prenons celle-ci qui est noire ou à peu près.
Maurice Mattauer
Bon, c’est encore une roche qui vient des Alpes.C’est une serpentine et probablement qu’elle vient de la région du mont Viso.
Yves Barbara
Le mont Viso est situé où ?
Maurice Mattauer
Le mont Viso est situé dans les Alpes, dans les Alpes du Sud et il est constitué entièrement de roches qui formaient le substrat de roches océaniques, roches qui se sont formées dans la mer. Tout comme dans l’océan Atlantique, actuellement des roches se forment le long de la rive médio-atlantique.
(Musique)
Maurice Mattauer
Étant donné que ces cailloux ont été amenés par le paléo-Rhône, l’ancêtre du Rhône, on a des cailloux de toutes origines, et disons ceci une roche calcaire qui doit avoir environ 150 millions d’années.Et il y a beaucoup de roches ici qui ont 4 à 500 millions d’années.
Yves Barbara
Elles proviennent d’où alors ces roches qui sont un peu plus vieilles là ?
Maurice Mattauer
Le Massif central correspond à une chaîne ancienne qui s’est superposée à un océan encore plus ancien.Et la chaîne s’est formée vers 300 millions d’années et l’océan date de 4 à 500 millions d’années.
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