La formation du littoral languedocien
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Résumé
Depuis sa formation, il y a des millions d’années, la Méditerranée a subi des variations de niveau très importantes. Vers 6000 ans avant notre ère, le cordon littoral s’est constitué. Peu à peu, phénomènes naturels et action humaine ont contribué à modifier le trait de côte. Le film raconte cette évolution à l’échelle des temps géologiques.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
01 janv. 1985
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Contexte historique
Parchargé de Recherche au CNRS, Laboratoire Géosciences Montpellier, Université de Montpellier-CNRS
La Méditerranée occidentale (à l’ouest de l’Italie) est un bassin marin résultant des processus de la tectonique des plaques. Pendant la première moitié de l’ère Tertiaire, il y a 60 à 30 millions d’années (Ma), la chaîne des Pyrénées se forme lors de la collision entre les plaques continentales ibérique et européenne, générant des reliefs se prolongeant vers l’est sur la zone qui deviendra le golfe du Lion. La Méditerranée occidentale a été créée entre 30 et 20 Ma, lorsque la microplaque portant la Corse et la Sardaigne s’est détachée du sud de l’Europe et s’est déplacée vers l’est jusqu’à sa position actuelle. Ce mouvement de plaques s’est traduit par l’étirement et l’amincissement de la croûte terrestre, faisant disparaître les reliefs montagneux préexistants et créant ainsi un bassin qui a été envahi par la mer. Un processus analogue a créé ensuite la mer Tyrrhénienne à l’est du bloc corso-sarde. La création du bassin marin a été accompagnée par le soulèvement de ses bordures, créant les reliefs cévenols sur le bord est du Massif Central.
Dans le même temps, les reliefs des Alpes sont apparus au nord-est, résultant quant à eux de la collision entre les continents apulien (Italie) et européen à la suite de la fermeture de l’océan qui les séparait depuis le milieu de l’ère Secondaire. Ainsi s’est mise en place la géographie actuelle, avec le couloir du Rhône séparant Alpes et Massif Central et rejoignant la Méditerranée au sud. La mer ainsi créée a été sujette à d’importantes variations de niveau liées aux évènements tectoniques et climatiques. Pendant la plus grande partie de l’époque Miocène (qui a duré de 23 à 5 Ma), la mer envahissait le couloir rhodanien jusqu’aux pieds des Alpes et du Massif Central. En Languedoc, elle recouvrait l’actuelle plaine littorale, déposant les calcaires coquilliers exploités dans de nombreuses carrières de l’Hérault et du Gard ( pierre de Pignan, de Beaulieu, de Vers…
) et largement utilisés dans la construction régionale depuis l’Antiquité.
Vers 6 Ma a débuté la « crise messinienne » (le Messinien étant le dernier âge stratigraphique du Miocène), lorsque la combinaison de déformations tectoniques au niveau du détroit de Gibraltar et d’une baisse du niveau des océans a interrompu la communication de la Méditerranée avec l’océan Atlantique. L’évaporation étant plus importante que l’apport des fleuves, le niveau de la mer a alors baissé d’environ 1 500 m, transformant ainsi le bassin méditerranéen en un gigantesque marais salant. Des remises en eau partielles épisodiques depuis l’Océan atlantique (liées aux variations du niveau de l’océan) ont permis le dépôt de 1 000 à 1 500 m de sel dans la partie centrale du bassin. Dans le même temps les fleuves côtiers ont surcreusé leur lit pour rejoindre le fond du bassin, conduisant à la création de profonds canyons tel celui du Rhône qui atteignait 1 300 m de profondeur au niveau du rivage actuel.
Au début de l’époque Pliocène, vers 5,4 Ma, la remise en eau par le détroit de Gibraltar fut brutale. Le niveau de la mer est remonté plus haut que le niveau actuel, ce qui a provoqué le dépôt de sédiments comblant les canyons et recouvrant les plaines côtières (argiles de Fournès, dans le Gard, calcaires du bois des Aresquiers au sud de Montpellier). À partir du début du Quaternaire, vers 2,6 Ma, une alternance de glaciations et de déglaciations a provoqué des variations de niveau importantes. Ainsi, le niveau de la mer était environ 130 m plus bas qu’actuellement lors du dernier épisode glaciaire et il est progressivement remonté au cours des derniers 20 000 ans.
C’est lors de cette dernière remontée que s’est constitué le rivage actuel. Dans la région montpelliéraine, peu de sédiments sont apportés par les petits fleuves côtiers locaux, le sable et les galets étant amenés depuis les Cévennes et les Alpes par le Rhône, au large de la Camargue, puis déplacés vers l’ouest par les courants marins de la « dérive littorale ». Un cordon de sable émergé a commencé à se former à quelques kilomètres au large du rivage actuel il y a environ 7500 ans. Depuis, le rivage a reculé vers l’ouest en lien avec la hausse du niveau marin. C’est il y a environ 2000 ans que les grands graus se sont fermés, donnant le cordon sableux continu qui isole complètement les lagunes. Depuis, le rivage recule lors des tempêtes par érosion du sable des plages et de l’avant des dunes, ce sable transitant alors entre les dunes pour s’étaler en arrière dans la lagune. Rapide jusque vers 5500 ans, la hausse du niveau marin a ensuite fortement ralenti avant d’augmenter à nouveau depuis 250 ans pour atteindre actuellement environ 3.2 mm par an. L’accélération récente, liée au changement climatique d’origine anthropique, contribue au recul rapide de la côte. Par contre, il est moins sûr que le blocage de l’apport de sédiments grossiers par les barrages édifiés sur le Rhône et ses affluents joue un rôle important sur l’érosion de la côte car le stock de sédiments accumulés dans le delta du Rhône reste suffisant pour maintenir l’apport de sédiments par la dérive littorale.
Remerciements à Hubert Roy et aux archives départementales de l'Hérault.
Bibliographie
- Film conservé aux Archives départementales de l'Hérault sous la côte : FRAD034_2AV_00363_0001